[Télésurveillance médicale] - Les soignants, moteurs d’une transformation durable

Vers des équipes de soins virtuels, augmentés et automatisés

À mesure que les systèmes de santé évoluent vers des personnels de soins augmentés et connectés, intégrant des technologies avancées et l’intelligence artificielle, chaque équipe devra revoir son organisation interne et ses relations avec les autres professionnels et spécialités. Dans cette nouvelle organisation des soins virtuels, le personnel paramédical occupe une place centrale. Il contribue non seulement aux contrôles de routine, mais également au soutien et à la formation des patients, indispensables pour maintenir leur engagement et leur adhésion aux plans de traitement. Les cliniciens interviennent, quant à eux, sur des problématiques complexes et spécialisées, apportant une expertise avancée aux cas critiques voire urgents. Ce rôle ciblé permet d’améliorer la personnalisation des soins, d'anticiper les complications et d'assurer un suivi plus proactif et préventif.

Cela implique une meilleure compréhension des flux de travail dans les soins virtuels, ainsi que la promotion de nouveaux professionnels, qui peuvent aider à l'identification de nouveaux patients moins à l’aise avec la technologie et au déploiement des programmes dans des zones où la densité médicale est faible.

Réorganiser les soins grâce à une meilleure compréhension des rôles de chacun 

Dresser une cartographie des flux de travail ("workflows") est une approche intéressante car elle permet d’appréhender les rôles et activités de chaque professionnel de santé, en présentiel à l’hôpital et en contexte virtuel, à distance. Cette démarche nécessite qu'une équipe de recherche dédiée passe du temps dans les différents services à observer et comprendre les processus et les activités impliqués dans un programme de télésurveillance des patients (TSP) donné. Au sein de NYU Langone Health, des chercheurs ont mis en lumière les différents rôles et missions dans le suivi à distance de l’hypertension artérielle en cardiologie. Ce programme se fait en cinq étapes : inscription du patient, configuration du dispositif, surveillance des données, suivi du patient et désinscription.

Comprendre les flux de travail dans un programme de télésurveillance médicale permet d’anticiper d’éventuelles pénuries de main-d'œuvre en fournissant des aperçus détaillés des processus, des tâches et des exigences de temps des diverses activités concernées. En France, il serait intéressant d’anticiper, avec l’aide conjointe des départements des ressources humaines et services informatiques, les besoins des équipes médicales en investissant dans des logiciels et infrastructures robustes pour soutenir le développement de la TSP tout en soulageant les soignants dans leurs tâches chronophages au quotidien. En parallèle, aborder proactivement l'épuisement professionnel associé à la combinaison des soins en personne et virtuels est essentiel au bon déploiement de la TSP. Ces nouvelles approches devront inclure la gestion de la charge de travail, la disponibilité de services en santé mentale pour accompagner les soignants, et des conditions de travail plus flexibles dans les soins à distance. 

Promouvoir la coordination et la délégation de tâches vers de nouveaux professionnels

Au sein de NYU Langone Health, les professionnels du secteur médico-social (appelés Community Health Workers) jouent un rôle clé dans la mise en place des programmes de télésurveillance auprès des patients les plus éloignés du système de santé. Ils agissent comme des intermédiaires entre les patients et les équipes de soins dans le but de faciliter la communication, l’adhésion aux programmes de télésurveillance et les résultats de santé. À ce titre, NYU Langone Health a créé en 2018 le Centre de recherche et de ressources pour les travailleurs du médico-social (le CHW-RRC ou Community Health Workers Research and Resource Center) au sein du Département de santé publique. Le CHW-RRC utilise l'expertise médicale et la met au service des acteurs du médico-social dans l’objectif de réduire les inégalités et de renforcer les usages par certaines populations des nouvelles technologies en santé. 

Faciliter la conduite du changement en standardisant les bonnes pratiques médicales

Au sein de NYU Langone Health, l'équipe du HiBRID Lab (Healthcare Innovation Bridging Research, Informatics & Design Lab) a développé des directives de bonne pratique pour le déploiement du suivi à distance des patients dans l’ensemble des spécialités. L’American Medical Association a également publié un guide qui promeut les meilleures pratiques à déployer afin d’homogénéiser les approches et d’éviter un fonctionnement en silo au sein d’un même établissement de soins.

La mise en œuvre opérationnelle de ces bonnes pratiques implique là aussi une coopération et une collaboration plus poussées des professionnels de santé entre eux et avec les professionnels du secteur médico-social. En France, différentes actions pourraient être envisagées comme la création de formation à et par la collaboration, en formant ensemble des étudiants médecins, infirmiers, pharmaciens et les métiers du médico-social afin de développer des approches de soins collaboratives et d’améliorer la communication, la coordination et la gestion globale des patients. 

Copyright image : Damien Meyer / AFP