AccueilExpressions par MontaigneCES 2019 : renforcer la confiance dans le numériqueL'Institut Montaigne propose une plateforme d'Expressions consacrée au débat et à l’actualité. Il offre un espace de décryptages et de dialogues pour valoriser le débat contradictoire et l'émergence de voix nouvelles.14/01/2019CES 2019 : renforcer la confiance dans le numérique TechnologiesImprimerPARTAGERAuteur Gérôme Billois Partner cybersécurité et confiance numérique chez Wavestone Le CES 2019 a, comme usuellement, apporté son lot d’annonces de nouveaux produits des plus utiles aux plus loufoques. Mais une nouvelle tendance est apparue cette année autour de la confiance dans le numérique. Tendance mise en avant de gré ou de force suite aux multiples scandales et cyberattaques ayant touchés les acteurs du numériques, au premier rang desquels Facebook. Gérôme Billois, associé cybersécurité et confiance numérique au cabinet Wavestone et rapporteur général de l’étude de l’Institut Montaigne Cybermenace : avis de tempête, décrypte ici l’événement, auquel il a assisté.La confiance numérique au cœur des enjeux pour le CESLa conférence introductive du CES donnait immédiatement le ton : après l'ère de la connectivité, 2018 ouvre l'ère de la donnée.Tout notre écosystème personnel ou professionnel est maintenant connecté et les prochaines révolutions viendront de l’usage des informations collectées. Ceci pose un enjeu clair : comment collecter et utiliser ces données tout en conservant la confiance et en respectant la vie privée des consommateurs ? Cet enjeu a bien été perçu et mis en avant par la CTA (Consumer Technology Association, organisatrice du CES) qui en a fait un thème central dans sa conférence CES Unveiled. Et même si le CES reste avant tout, et c’est bien normal, un salon dédié aux technologies grand public durant lequel les nouveaux usages sont fortement mis en avant, le thème de la confiance était présent chez de nombreux exposants, avec cependant une forte hétérogénéité entre les différents secteurs.Tout notre écosystème personnel ou professionnel est maintenant connecté et les prochaines révolutions viendront de l’usage des informations collectées.Aborder l’enjeu de la confiance dans le numérique est d’autant plus important à un moment où, au-delà des fuites de données dont nous entendons régulièrement parler dans les médias, tous les Etats font face aujourd’hui à une menace systémique et risquent de subir une attaque majeure qui pourrait la remettre fondamentalement en cause. Nous avions traité ce scénario dans le cadre du rapport de l’Institut Montaigne, Cybermenace : avis de tempête et le CES 2019 l’a lui aussi abordé dans une nouvelle zone, dédiée à la résilience (résilience cyber mais aussi résilience face aux catastrophes naturelles ou au terrorisme).Véhicules connectés et autonomes : la confiance, un pré-requis pour lâcher le volantAu CES de Las Vegas, le domaine qui mettait le plus en avant le thème de la confiance dans le numérique était clairement celui de l’automobile. Il était impressionnant de voir des publicités géantes ou des étalages entiers, de plusieurs centaines de mètres carrés, consacrés uniquement à ce sujet. Le nouveau constructeur Byton, potentiel futur concurrent chinois de Tesla, en faisait même un affichage très explicite sur son stand mettant en avant les innovations qu’il avait développées. Les démonstrations se succédaient aussi chez des acteurs dédiés comme IAV ou Karamba, pour montrer les attaques touchant des véhicules, mais aussi la manière de les prévenir. Les constructeurs et leurs sous-traitants sont conscients de cette obligation de sécurité : pour que les conducteurs acceptent un jour de lâcher le volant, il faut qu’ils soient en confiance. A ce titre, dans le cadre du rapport de l’Institut Montaigne, nous avons recommandé d’imposer la labellisation des équipements touchant aux vies humaines (par exemple la pédale de frein d’une voiture), garantissant leur bon fonctionnement même lorsque ceux-ci sont attaqués.D’autre part, les constructeurs ont fait des annonces sur l’usage de technologies de sécurité numérique pour faciliter le quotidien du conducteur, comme donner, à l’aide de son smartphone, un accès temporaire à son véhicule à des proches. Usage très pratique lors d’une utilisation familiale d’un véhicule, ou même pour permettre à un livreur de déposer un colis. La reconnaissance faciale pour ouvrir sa voiture ou démarrer sans les clés était également présente sur de nombreux stands.Le domaine qui mettait le plus en avant le thème de la confiance dans le numérique était clairement celui de l’automobile.Mais il ne faut pas oublier qu’un véhicule connecté est aussi un véhicule qui peut dévoiler des informations sensibles sur notre vie privée : où nous allons, à quel horaire, avec qui… Ces informations sont collectées dans le véhicule mais aussi autour de lui : avec les radars et les caméras dont seront équipées toutes les voitures de demain, il est évident qu’il sera possible de suivre des personnes à la trace. Les équipementiers automobiles commencent à se saisir de cette problématique, rendue encore plus forte avec le nouveau règlement européen sur la protection des données à caractère personnel (RGPD). IAV montrait comment il est possible d’anonymiser en temps réel les visages des passants ou des autres automobilistes rencontrés sur la route tout en conservant les informations clés pour que la voiture comprenne son environnement (par exemple, déterminer qu’un piéton souhaite traverser car il regarde le véhicule, ou voir qu’un conducteur fait un signe de main pour laisser passer une voiture). Les techniques existantes, comme Google Street View par exemple, pixelisent l’intégralité du visage et font perdre des données essentielles comme l’orientation du regard. Les nouvelles techniques présentées permettent elles de modifier le visage afin de lui faire perdre toute ressemblance avec la personne, tout en conservant les informations clés pour l’analyse de la situation.Respect de la vie privée numérique : au CES les modèles Google et Apple s’opposentTrouver le bon équilibre pour encourager la confiance était une des interrogations majeures au CES : comment donner confiance au client ? Quels services fournir pour que ceux-ci acceptent de partager les données ? Plusieurs intervenants dans les conférences soulignaient qu’ils n’avaient pas encore trouvé la solution alliant le respect de la vie privée à la création de nouveaux produits disruptifs et leur monétisation. D’autant plus que le paysage réglementaire a très fortement évolué en 2018 avec l’arrivée en Europe du RGPD (décrié plusieurs fois dans des conférences) mais aussi des textes en Californie ou encore à Hong-Kong. La plupart des constructeurs étaient encore dubitatifs quant à la voie à suivre.Le paysage réglementaire a très fortement évolué en 2018 avec l’arrivée en Europe du RGPD mais aussi des textes en Californie ou encore à Hong-Kong.Cet équilibre semble d’autant plus difficile à trouver qu’Apple avait décidé de polariser le débat en lançant une campagne de communication très ciblée. Une affiche publicitaire géante, sur un hôtel de plus de 10 étages, mettant en avant un message simple "What is on your iPhone stays on you iPhone", clin d’œil à la célèbre phrase "ce qui se passe à Vegas reste à Vegas", mais surtout attaque frontale vis-à-vis de Google qui avait acheté de nombreux espaces pour valoriser son assistant vocal connecté "Hey Google". Star du CES, cette technologie est présente dans les interrupteurs muraux, les horloges, en passant par les sofas et les voitures !Apple, clairement en retard dans ce domaine, utilise sa posture forte sur le respect de la vie privée comme un différenciateur important face à ses concurrents. C’est d’autant plus facile pour lui que son modèle économique repose sur la vente de matériel, contrairement à son concurrent Google qui a besoin des données pour alimenter ses revenus dans la publicité. Attention cependant, avec les chutes récentes des ventes et l’orientation d’Apple vers plus de services, il faudra rester attentif.Le CES 2020 : l’année de l’équilibre ?Il est encore trop tôt pour dire quels seront les mouvements forts dans ce domaine, les évolutions réglementaires devant être prises en compte. Cependant, il est certain que l’importance du respect de la vie privée pour les consommateurs est entré par la grande porte dans les états-majors des constructeurs grand public qui veulent s’éviter des scandales à répétition. Nous verrons si, au CES 2020, les engagements de principe seront tenus et si un équilibre entre innovation et vie privée sera trouvé. Affaire à suivre. Crédit : ©CES2019ImprimerPARTAGERcontenus associés 28/05/2018 Les bienfaits de la donnée Institut Montaigne