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Note
Mai 2022

Du permis à l’emploi :
roulez jeunesse

Auteur
Baptiste Larseneur
Expert associé - Éducation

Baptiste Larseneur était expert résident sur les questions d'éducation et responsable de projets liés au développement du capital humain et au développement économique des territoires à l'Institut Montaigne.

Personnes auditionnées

Contributeur spécial :

  • Pascal Lorne, CEO de Gojob 

Production de l’enquête Harris Interactive :

  • Magali Gérard, directrice adjointe du département Politique-Opinion, Harris Interactive
  • Diane Lamotte, chargée d’études au département Politique-Opinion, Harris Interactive
  • Jean-Daniel Lévy, directeur délégué Stratégies politiques et d’opinion, Harris Interactive
  • Julien Potereau, directeur d’études au département Politique-Opinion, Harris Interactive

Production de l’enquête Gojob :

  • Audrey Cohu, CRM & content manager, Gojob
  • Yoann Kassi-Vivier, head of social impact, Gojob
  • Agathe Lehodey, communications manager, Gojob
  • Séverine Templet, directrice de la communication, Gojob

Personnes auditionnées ou consultées : 

  • Soliman Chaouche, directeur de clientèle, Agence Proches
  • Emmanuel Combe, vice-président de l’Autorité de la Concurrence
  • Sébastien Danvel, directeur du pôle activités réglementées, SGS France
  • Laurent Davoine, délégué du pôle éducation routière de l’unité départementale des Hauts-de-Seine, Direction régionale et interdépartementale de l’environnement, de l’aménagement et des transports d’Ile-de-France
  • Romain Durand, co-fondateur et directeur général, Le Permis Libre
  • David-Alexandre Fournier, directeur des ressources humaines, Bolloré Transport & Logistics
  • Benjamin Gaignault, co-fondateur et directeur général, Ornikar
  • Marc Glita, directeur de cabinet, Plastic Omnium
  • Jérôme Harnois, directeur chargé de la préparation aux crises, des enjeux de sûreté, de conformité et des affaires institutionnelles, Groupe RATP
  • Anthony Jeanne, chef du service sécurité et éducation routière de l’unité départementale des Hauts-de-Seine, Direction régionale et interdépartementale de l’environnement, de l’aménagement et des transports d’Île-de-France
  • Sébastien Meunier, vice-président Relations Institutionnelles, ABB France
  • Édouard Rudolf, co-fondateur et directeur général, En voiture Simone !
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Levier économique, d’insertion, de mobilité, le permis de conduire est jugé indispensable par 86 % des 18-26 ans. Alors qu’il est perçu comme un réel sésame vers le monde du travail, son accès est freiné par des contraintes structurelles comme son coût, les délais de passage et les rigidités d’apprentissage. Donner aux 18-26 ans un accès plus simple à l’obtention du permis de conduire, sans faire de concession sur l’exigence de sécurité routière, constitue un enjeu clé. 

Partant des résultats d’une enquête Harris Interactive et de données fournies par l’agence d'intérim Gojob, l’Institut Montaigne propose une photographie inédite de la perception du permis de conduire par les jeunes en France. Il formule quatre propositions pour faciliter l’accès à cet examen et l’ancrer dans une politique en faveur de la jeunesse.

La note de l’Institut Montaigne s'appuie sur une enquête Harris Interactive réalisée en ligne entre le 8 et le 14 mars 2022, auprès d’un échantillon de 1 010 personnes représentatif des Français âgés de 18 à 26 ans ainsi que sur une seconde enquête conduite par l’agence d'intérim Gojob auprès de 2 477 personnes âgées de 18 à 26 ans représentatives de ses Users et Gojobbers.

Un examen jugé indispensable par les jeunes…

L’examen du permis de conduire est l’examen où se présente le plus grand nombre de candidats en France soit plus d’un million de prétendants chaque année. Entre 18 et 26 ans, un peu plus de 7 jeunes sur 10 déclarent avoir leur permis, et le taux de réussite à l’épreuve pratique lors du premier examen se situe autour de 60 %.

Pour l’accès à l’emploi en particulier, les jeunes considèrent à 85 % que le permis est un précieux sésame, en particulier pour le premier emploi, quasiment au même degré que le fait de disposer d’un diplôme reconnu (86 %). Preuve de plus, s’il en faut, 54 % d’entre eux déclarent que ne pas posséder le permis les a empêché d’accéder à une offre d’emploi (et parmi eux, 33 % à plusieurs offres d’emploi) ; 53 % de postuler à une offre d’embauche.

En moyenne, en région parisienne, 45 % des 18-24 ans détiennent le permis, mais ils sont 77 % en zone rurale. L’absence de permis de conduire est un handicap particulièrement important pour les jeunes vivant loin des métropoles - au sein des territoires épars - où l’accès aux transports publics est plus aléatoire ainsi que pour les jeunes les moins qualifiés, pour qui le permis de conduire est souvent une condition pour décrocher un emploi. Repenser la mobilité dans tous les territoires était déjà d’ailleurs un des axes clés du rapport de l’Institut Montaigne Rééquilibrer le développement de nos territoires paru en mars 2021.

… mais dont le coût reste perçu comme étant le principal obstacle à son obtention

La principale difficulté identifiée par les jeunes est son coût moyen, estimé entre 1 600 euros et 1 800 euros : 68 % des jeunes estiment qu’il est difficile de financer son permis et 21 % des jeunes sans permis citent la baisse de son coût comme l’élément qui les motiverait le plus pour le passer.

De plus, 34 % déclarent que le coût du permis est trop élevé et cette proportion monte à 48 % pour les 24-26 ans (85 % des jeunes sont aidés par leurs parents).

Face à ces constats, comment diminuer le coût du permis de conduire pour favoriser l’employabilité des jeunes, particulièrement de ceux pour qui le permis de conduire est un tremplin essentiel pour obtenir un premier emploi ?

Proposition n°1 : Élargir le vivier d’agents publics examinateurs à l’épreuve pratique, sous le contrôle des inspecteurs du permis de conduire, garants de la qualité de l’examen

Le nœud gordien de l’examen du permis de conduire repose, pour une part importante, sur les délais de présentation à l’épreuve pratique. Ces délais sont principalement induits par l’insuffisance de créneaux disponibles pour le passage de l’examen pratique. Il est estimé que chaque mois de délai de retard entraîne pour le candidat un surcoût moyen de 200 euros.

Nous préconisons d’élargir le vivier de fonctionnaires autorisés à faire passer l’épreuve pratique du permis de conduire en procédant par exemple par la voie de détachements contractuels.

Proposition n°2 : Introduire une redevance lors du passage de l’épreuve pratique du permis de conduire en contrepartie de la réduction des délais de passage

Dans le prolongement de la première proposition, nous préconisons d’introduire une redevance d’un montant limité - elle pourrait être de 50 euros - que devrait payer chaque candidat pour le passage de l’examen pratique.

Il peut apparaître curieux de proposer l’instauration d’une redevance, alors que l’objectif que nous poursuivons, dans le cadre de cette note, est la réduction du coût du permis de conduire. Pour autant, la création d’une redevance permettrait non seulement l’autofinancement et l’acceptation des évolutions que nous préconisons, tout en contribuant in fine à une réduction du coût global du permis de conduire, par la diminution des délais nécessaires au passage de l’examen pratique.

Le surcoût actuel de présentation à l’épreuve pratique (environ 300 euros) dû à l’importance des délais de passage (environ 1,5 mois) serait nettement supérieur au surcoût induit par l’instauration de la redevance (50 euros), dès lors qu’elle permettrait de réduire les délais de passage de l’examen à deux semaines grâce au recrutement d’agents supplémentaires.

Selon nos projections, il pourrait en résulter une diminution de 56 % du coût réel moyen de présentation à l’épreuve pratique, soit une économie nette de 270 euros, en moyenne, pour chaque candidat.

Proposition n°3 : Instaurer une plus grande liberté pédagogique entre les auto-écoles assortie d’une plus grande transparence sur les résultats

Un autre levier de réduction du coût du permis de conduire est à chercher dans le recours aux simulateurs de conduite. En l’état actuel du droit, un maximum de cinq heures de conduite peut être réalisé sur automate.

Alors qu’en moyenne, une heure de formation à la conduite sur simulateur coûte deux fois moins cher qu’une heure de formation à la conduite en voiture (21,50 euros contre 43 euros), promouvoir le recours aux automates dans l’apprentissage de la conduite et lever la contrainte juridique actuelle - maximum de cinq heures - pour la porter à dix heures, permettrait à chaque candidat de réaliser des économies substantielles.

Par ailleurs, le recours aux simulateurs de conduite couplé à la promotion du permis sur boîte automatique permettrait une réduction accrue des coûts de passage du permis de conduire. Selon nos projections, le coût global de l’apprentissage de la conduite pourrait être réduit de 46 %, soit une économie nette d’environ 750 euros par rapport à un apprentissage de la conduite sur boîte manuelle sans recours à un simulateur.

Proposition n°4 : Envisager le passage du permis, voire sa prise en charge financière, dans le cadre service civique et du service national universel

Nous proposons d’étudier la possibilité de permettre aux jeunes qui opteraient pour un engagement tel que le service civique ou le service national universel (SNU) de passer leur permis de conduire gratuitement dans ce cadre. Il s’agirait à la fois d’un levier pour renforcer l’attractivité de ces dispositifs, ainsi que d’une façon de renouer le lien entre service de la nation et apprentissage de la conduite - tel qu’il prévalait à l’époque du service militaire.

Si cette proposition est plébiscitée par les jeunes interrogés, puisque 83 % d’entre eux y sont favorables, elle pose néanmoins des questions pour son financement et son organisation, qui pourrait justifier la mise en place au préalable d’une expérimentation au sein des départements volontaires.

En effet, ce dispositif nécessiterait plusieurs dizaines de millions d’euros pour être mis en œuvre. Néanmoins, ces coûts dépendent grandement du périmètre retenu. Ainsi, nous proposons que le financement du permis de conduire par l’État ne puisse bénéficier qu’à une partie des candidats sélectionnés sur critères sociaux. Enfin, le reliquat des ressources générées par la redevance que l’on propose d’introduire pour le passage de l’examen pratique pourrait en partie être fléchées pour financer ce dispositif.

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