AccueilExpressions par Montaigne[Sondage] - Réduire les dépenses publiques : oui, mais comment ?L'Institut Montaigne propose une plateforme d'Expressions consacrée au débat et à l’actualité. Il offre un espace de décryptages et de dialogues pour valoriser le débat contradictoire et l'émergence de voix nouvelles.02/10/2024[Sondage] - Réduire les dépenses publiques : oui, mais comment ? Vie démocratique Finances et fiscalitéImprimerPARTAGERAuteur Institut Montaigne Auteur Lisa Thomas-Darbois Directrice des études France, Experte Résidente Tous les mois, l'Institut Elabe interroge les Français pour Les Échos et l'Institut Montaigne. Ce mois-ci, la question posée porte sur les Français et la réduction des dépenses publiques.À une semaine de la présentation du projet de loi de finances 2025, les arbitrages budgétaires et fiscaux du gouvernement Barnier suscitent autant d’attente que d'inquiétude. La situation particulièrement préoccupante de nos comptes publics - plus de 6 % de déficit prévu pour la fin d'année - n'en finit plus d'inquiéter les Français : 82 % d'entre eux jugent qu'il est désormais urgent de réduire la dette publique. Pour y remédier, seules deux options sont possibles : augmenter la fiscalité ou diminuer les dépenses.Sur la fiscalité, force est de constater que les marges sont limitées - le taux de prélèvements obligatoires est de 48 % du PIB en France (contre 41 % dans la zone euro) - et les Français ont vu leur consentement fiscal s'éroder. Sur le plan des économies, la bonne nouvelle est que l'opinion publique semble majoritairement partager l'idée selon laquelle il est possible de réduire les dépenses publiques tout en conservant la qualité des services publics (pour 74 % d'entre eux). La mauvaise est qu'ils sont favorables aux réductions des dépenses qui pèsent le moins sur nos comptes (allocations familiales notamment) et défavorables à celles qui sont pourtant au cœur de la soutenabilité de nos finances publiques : les retraites.Le sentiment qu'il est urgent de réduire la dette est très élevé et continue de s'intensifier82 % (+2 depuis le 11 septembre 2024) des Français jugent urgent de réduire la dette publique en France, dont 41 % (+2 ; et +16 depuis mai 2023) très urgent et 41 % (stable) assez urgent. A l’inverse, 17 % (-2) considèrent que cela n’est pas urgent, dont 14 % (stable) pas vraiment et 3 % (-2) pas du tout.Tous les principaux électorats partagent le même regard et s’accordent à dire qu’il y a urgence à agir : électeurs de droite (LR, UDI, divers droite) au 1er tour des Législatives 2024 (90 % urgent, dont 55 % très urgent), électeurs d’Ensemble (90 %, dont 37 %), électeurs du Rassemblement National (86 %, dont 52 %) comme les électeurs du Nouveau Front Populaire (74 %, dont 31 %), un constat également partagé par les abstentionnistes (78 %, dont 37 %).Le sentiment d’urgence domine et dans toutes les catégories de population et de façon particulièrement marquée chez les 65 ans et plus (88 % urgent, dont 52 % très urgent).Pour les Français, les 3 postes de dépense publique qu’il faudrait réduire en priorité sont les aides aux entreprises, les allocations familiales et chômageLes trois domaines sur lesquels le plus de Français s'accordent pour réduire les dépenses publiques sont les aides aux entreprises (36 %, stable depuis mars 2024), les allocations familiales (32 %, -3) et les allocations chômage (32 %, stable). Les autres coupes budgétaires ciblées par les Français sont la culture (25 %, +3), l'environnement/la transition écologique et énergétique (22 %, -1), la défense/l’armée (19 %, +1), les transports (12 %, -1) et le logement (11 %, +2), les autres domaines étant cités par moins d'1 Français sur 10. À noter que 11 % des Français, une proportion en recul de 4 points, estiment qu’il ne faudrait baisser la dépense publique sur aucun de ces domaines.On observe de fortes disparités d’un point de vue politique :Les électeurs du NFP privilégient en priorité la baisse des dépenses en matière d'aides aux entreprises (53 %) et concernant la défense/l’armée (41 %)Pour les électeurs d'Ensemble, il faut avant tout réduire les allocations familiales (43 %), la culture (38 %), les allocations chômage (33 %) et les aides aux entreprises (32 %)Pour les électeurs de droite (LR, UDI, divers droite), les allocations chômage (43 %), les allocations familiales (40 %) et les aides aux entreprises (36 %)Et pour les électeurs du Rassemblement National, il faudrait baisser en priorité les allocations familiales (44 %), les allocations chômage (43 %) et les dépenses relatives à l’environnement et à la transition écologique et énergétique (35 %)3 Français sur 4 convaincus qu'il est possible de réduire les dépenses publiques tout en conservant la qualité des services publics74 % des Français pensent qu'en utilisant différemment l'argent public, on peut maintenir voire améliorer la qualité des services publics tout en réduisant les dépenses. A contrario, 24 % estiment que toute baisse d'ampleur des dépenses publiques aurait des conséquences négatives sur la qualité des services publics. Cette opinion est largement partagée par toutes les catégories de populations et croit avec l’âge (de 58 % chez les 18-24 ans à 82 % chez les plus de 65 ans). Politiquement, les électorats s’accordent également : 82 % des électeurs du camp présidentiel et du Rassemblement National, 77 % des Républicains et, dans une moindre mesure, 61 % des électeurs du NFP. Une opinion publique très critique sur le système fiscal : argent public mal employé, lutte insuffisante contre la fraude (sociale et fiscale) et une trop faible redistribution des richesses. Le consentement à l’impôt ("justifié car il finance les services publics") reste majoritaire mais recule depuis marsConcernant le système fiscal aujourd’hui en France, 80 % (+1 depuis mars 2024) des Français estiment que le montant des impôts et taxes n’est pas bien utilisé par les pouvoirs publics, 77 % (+1) que les pouvoirs publics ne luttent pas suffisamment contre la fraude fiscale et 76 % (-1) contre la fraude sociale, et 71 % (stable) estiment que le système fiscal actuel ne permet pas la redistribution des richesses entre les différentes catégories de la population.Ces critiques sont largement partagées dans tous les pans de la société et électorats, notamment par les retraités (5 à 12 points de plus que l’ensemble des Français) et par les électeurs du Rassemblement National (5 à 9 points de plus). La critique sur le manque de redistribution des richesses entre les catégories de la population est particulièrement exprimée par les Français qui doivent se restreindre pour boucler leurs fins de mois (78 %, contre 65 % chez les Français qui les bouclent facilement). En parallèle, le consentement à l’impôt (le paiement des impôts et taxes est justifié car il finance les services publics) reste majoritaire (58 % d'accord) mais est en baisse (-3) depuis mars 2024. Une baisse observée dans la plupart des catégories de la population et électorats, et de manière particulièrement marquée chez les retraités (59 %, -13) et les Français les plus aisés qui bouclent facilement leurs fins de mois (65 %, -6). Cette question clive d’un point de vue politique : le consentement à l’impôt reste majoritaire parmi les électeurs du NFP (77 %), d'Ensemble (76 %) et de droite (LR, UDI, divers droite, 70 %) mais est minoritaire chez les électeurs du Rassemblement National (46 %). À noter que les Français qui paient l’impôt sur le revenu en sont plus convaincus (62 % d'accord) que ceux qui ne le paient pas (53 % d'accord). Une des solutions parfois évoquées dans le débat public, à savoir que l'ensemble des ménages devrait payer l'impôt sur le revenu, rencontre désormais une opposition majoritaire dans l’opinion publique (55 %, +4). L'opposition progresse dans la plupart des catégories de population, en particulier chez les retraités (54 %, +11), et est particulièrement forte parmi les électeurs du Nouveau Front Populaire (65 %) et les Français qui doivent se restreindre pour boucler leurs fins de mois (69 %). Enfin, les Français payant l'impôt sur le revenu sont plutôt favorables à cette proposition (60 %) mais ceux qui ne le paient pas la rejettent fortement (74 %). Les Français estiment qu'une hausse de fiscalité pour les très grandes entreprises et pour les particuliers les plus fortunés serait efficace pour réduire la dette, ils sont plus sceptiques sur l'augmentation des droits de succession, le gel du barème de l'impôt sur le revenu et l'écotaxe automobilePour réduire la dette publique, différentes mesures ont été évoquées dans le débat public ou envisagées par le gouvernement de Michel Barnier. Entre 6 et 8 Français sur 10 jugent efficaces :L'augmentation des impôts pour les très grandes entreprises qui réalisent des profits importants (79 %)L'instauration d’une contribution exceptionnelle (impôt ou taxe) pour les Français les plus fortunés (74 %)L'instauration d’une taxe sur le rachat d’actions pour les grandes entreprises (68 %) L'augmentation de la "flat taxe" (61 %)L'augmentation des taxes pour les loueurs de logements meublés (60 %)En revanche, l'opinion est plus partagée concernant l'augmentation des droits de succession pour les particuliers les plus fortunés (51 % efficace, 48 % pas efficace) et considèrent en majorité que le gel du barème de l'impôt sur le revenu (58 %) et l’augmentation de l'écotaxe automobile ne sont pas efficaces pour réduire la dette (59 %).D'un point de vue politique :Les électeurs du camp présidentiel jugent majoritairement que l’ensemble des mesures seront efficaces (de 86 % sur les impôts des très grandes entreprises à 53 % sur le gel du barème de l'impôt sur le revenu)Les électeurs du NFP partagent également ce point de vue sur la plupart des mesures (62 % à 86 %), sauf sur le gel du barème de l'impôt sur le revenu (63 % pas efficace) et l'écotaxe automobile (59 %)Les électeurs des Républicains approuvent également la plupart de ces mesures, ils sont toutefois divisés sur le gel du barème de l'impôt sur le revenu (49 % efficace) sur l'augmentation des droits de succession (46 %) et sont plutôt sceptiques quant à l'augmentation de l'écotaxe automobile (57 %)Les électeurs du Rassemblement National partagent la même opinion que la moyenne nationale avec cependant une critique plus nette sur le manque d'efficacité de l'augmentation des droits de succession pour les plus fortunés (43 % efficace vs 51 % pour l'ensemble des Français). Copyright image : Bertrand GUAY / AFP Antoine Armand, ministre de l'Économie, des Finances et de l'Industrie , à Paris le 23 septembre 2024ImprimerPARTAGERcontenus associés à la uneOctobre 2024Finances publiques : la fin des illusionsLa France fait face à une crise des finances publiques, avec une dette à 110,6 % du PIB et un déficit à 5,5 %. Pourquoi nous est-il à ce point impossible de nous emparer collectivement d’un sujet si crucial et prioritaire pour l’avenir de notre pays ?Consultez la Note d'enjeux 12/09/2024 [Sondage] - Dette publique : l'urgence d'agir Institut Montaigne Lisa Thomas-Darbois 07/03/2024 [Sondage] - Comment réduire la dette publique ? Institut Montaigne Lisa Thomas-Darbois