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[Le Monde de Trump vu par lui-même] - Walter Russell Mead "Trump est l'ambiguïté stratégique faite homme"

[Le Monde de Trump vu par lui-même] - Walter Russell Mead
 Michel Duclos
Auteur
Expert Résident, Conseiller spécial - Géopolitique et Diplomatie
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Le monde de Trump

Pour Walter Russell Mead, membre de l’Hudson Institute, un centre de réflexion américain conservateur, et chroniqueur au Wall Street Journal, la politique étrangère de Donald Trump est instinctive et révolutionnaire. Cela ne signifie toutefois pas que des typologies très rationnelles issues de la tradition politique américaine ne puissent en rendre compte. Le géopolitologue, interrogé par Michel Duclos et Soli Özel, analyse le fonctionnement et les ambitions d’un président américain qui est le symptôme plus que le déclencheur des mutations profondes de l'ordre international. L'épisode liminaire de la série [Le monde de Trump] offre ainsi une définition et une mise en perspective du trumpisme.

Institut Montaigne - Comment caractériser le "trumpisme" en tant que politique étrangère ? Qu’en est-il en tant que phénomène domestique ? Ces deux aspects sont-ils compatibles ?

Thomas Jefferson (1743- 1826 / président des États-Unis de 1801 à 1809) : néo-conservatisme qui se caractérise notamment, en matière de politique étrangère, par une diplomatie pacifique marquée par la restriction des budgets militaires et le refus de toute intervention. La tendance jeffersonienne  est une variante de la jacksonienne, moins la dimension populiste.

Alexander Hamilton (1757-1804, Secrétaire au trésor de George Washington de 1789 à 1795) : les hamiltoniens sont caractérisés par le nationalisme, désireux de favoriser la liberté du commerce et la stabilité de l’ordre mondial qui est nécessaire à la prospérité économique. Le Hamiltonianisme représente, avec le Wilsonianisme, l’une des deux grandes tendances de la politique américaine.

Andrew Jackson (1767-1845, président des États-Unis de 1829 à 1837) : le Jacksonianisme peut être résumé comme un populisme patriotique à l’intérieur et un isolationnisme en politique étrangère : les États-Unis ne doivent pas jouer de rôle dans le monde mais se concentrer sur la prospérité du peuple américain.

Woodrow Wilson (1856-1924 / président des États-Unis de 1913 à 1921) : un certain idéalisme en politique étrangère, appuyé sur une diplomatie ouverte et le respect des traités internationaux dans un ordre multilatéral visant à promouvoir le libéralisme. Le Wilsoninianisme peut se traduire par une dimension plus offensive visant à imposer la démocratie par la force. 

Walter Mead - Depuis la Guerre Froide, et encore depuis les années 1990, la tendance dominante en matière de politique étrangère aux États-Unis était celle d’une coalition des "globalistes", partisans de la globalisation : on y trouvait les héritiers des hamiltoniens, promoteurs d’une économie affranchie des barrières douanières, et les Wilsonianistes, favorable à la propagation de la démocratie et de défense des droits de l’Homme. C’était le vieux monde de l’Ordre Libéral, avec toutes ses nuances et ses divergences internes. Au sein des Wilsonianistes, par exemple, les libéraux internationalistes s’opposent aux conservateurs favorables au "Regime change", tandis que certains défenseurs du droit international et des droits de l’Homme adeptes d’une diplomatie dite "idéaliste" refusent de traiter - même pour des questions d’ordre strictement économique - avec des puissances souveraines telles que la Chine ou la Russie. Deux autres écoles inspiraient les dirigeants américains, tout en restant exclues de la prise de décision officielle jusqu’à 2016 : l’école Jacksonienne et l’école Jeffersonienne. Les Jacksoniens ont émergé après le 11 septembre et redonné de l’énergie au néoconservatisme. 

Las ! Ce monde a vécu et Donald Trump incarne son renversement. Il coalise une révolte contre ce consensus, dont on peut identifier deux composantes : 

  • une composante jacksonienne faite de nationalisme et animée du désir de voir les États-Unis prendre part à l’ordre mondial, sans engagement idéologique dans la communauté Atlantiste. S’ils n'attachent pas particulièrement d’importance au droit international, et encore moins aux institutions multilatérales, il ne s’agit pas pour eux de les renverser totalement. Ils soutiennent le budget militaire mais ne souhaitent pas projeter la puissance militaire américaine au-delà de ses frontières. Le rêve des Jacksoniens est de mettre à bas la bureaucratie du Pentagone et de sabrer les dépenses militaires. En revanche, il n’ont rien contre le déficit budgétaire, du moment qu’il bénéficie à la classe moyenne. C'est parmi les Jacksoniens qu’on retrouve les "Hawks". 
  • une composante jeffersonienne, rassemblant les "Réalistes", comme ils se nomment eux-mêmes. Plutôt d’obédience libertarienne, ils veulent un pouvoir régalien resserré et considèrent avec suspicion le FBI ou les agences gouvernementales - sur ce point ils rejoignent les Jacksoniens. Ils s’en distinguent sur les questions budgétaires, soucieux qu’ils sont de réduire la dette et de limiter les dépenses. 
  • Trump navigue dans cette coalition au gré de ses soutiens électoraux, et on peut lui reconnaître une certaine habileté managériale : il a donné Israël aux Jacksoniens, et l’Ukraine aux Jeffersoniens.

Les États-Unis ne dérogent pas à la règle qui veut que la politique extérieure soit fondée sur la politique domestique. Ce que la pratique trumpienne a d’inédit, c’est que désormais tout repose sur le plan intérieur.

Il ne faut pas oublier que les États-Unis ne dérogent pas à la règle qui veut que la politique extérieure soit fondée sur la politique domestique. Ce que la pratique trumpienne a d’inédit, c’est que désormais tout repose sur le plan intérieur. Il est prêt, on l’a vu, à cesser la livraison de missiles antimissiles Patriot à l’Ukraine, compromettant dramatiquement la défense antiaérienne du pays envahi. La trêve en Iran s’explique aussi par cette pression jeffersonienne.

IM - Vous analysez beaucoup le trumpisme au prisme de la rationalité : est-ce à juste titre ? Les Hamiltoniens voulaient une économie globalisée, mais en même temps étaient attachés à la protection de l'industrie américaine : l'équilibre était extrêmement délicat. L’incompétence qui caractérise le personnel de la Maison-Blanche n’interdit pas d’utiliser la typologie en grandes écoles de doctrine politique ?

WM - La rationalité n’est pas le principe dominant des décisions de Trump, je vous l’accorde. Mais on la retrouve dans les soubassements si j’ose dire archéologique, de ses choix : oui, Trump agit par intuition. Mais ses intuitions sont inspirées, malgré qu’il en ait, par une culture collective, quasi par des archétypes : en les mettant au jour, on comprend mieux ses décisions, même si on reste loin de la rationalité qui inspirait les analyses stratégiques dont Nixon recouvrait ses fameux papiers jaunes ! La méthode de Trump est chaotique mais une sorte de "motif dans le tapis" à la Henry James se dégage pour l’observateur scrupuleux. Utiliser une approche analytique ancrée dans l’histoire des idées, formaliser les écoles de pensée et chercher à les appliquer à la doctrine Trump permet de constater l’existence de constantes "américaines" dans les choix de Donald Trump et de saisir ces fondements de la politique extérieure des États-Unis.

IM - Vous dites que Donald Trump fonde ses décisions sur sa base électorale. Si tel est le cas, comment comprendre le "Big Beautiful Bill" ? 

WM-La politique économique de Donald Trump est aussi complexe que sa politique étrangère. Elle répond à des stimuli et des forces contradictoires, d’autant plus que l’agenda hamiltonien a évolué dans le temps. Les intérêts économiques et commerciaux des années 2000 ne sont pas ceux des années 2010 ou 2020 ! Après la Guerre Froide, les Hamiltoniens étaient favorables au libre-échange, à la libéralisation des marchés de capitaux, à un capitalisme post-nationaliste qui devait être le vecteur du succès américain. En attaquant le modèle du libre-échange, Donald trump n’a pas pour autant rompu avec les principes qui justifiaient les choix des Hamiltoniens : en réalité, les intérêts des grands capitalistes américains ne sont plus aux mêmes endroits. Peu importe, pour la Silicon Valley, qu’on érige des barrières douanières : Google se passe bien de protectionnisme, puisqu’il n’importe ni n’exporte aucun bien matériel. De même, restreindre l’immigation met en difficulté certains secteurs tels que le bâtiment ou l’industrie mais la Tech n’a pas besoin d’une masse de main-d'œuvre considérable : il lui faut seulement des talents. On assiste donc à l’émergence d’un agenda capitaliste "techno-pète", en butte à l’agenda capitaliste traditionnel

Un changement comparable s’observe concernant le patriotisme : le capitalisme, dans les années 1990, se pensait de façon transnationale et les grandes entreprises de la tech n’avaient aucune frontière. Au contraire, la Silicon Valley affectionne des catégories identitaires et se réaligne avec des principes tels que celui de l’État-Nation. Cela forme le terreau d’un alignement inédit entre le populisme jacksonien et le capitalisme hamiltonien, sans lequel Donald Trump n’aurait pas pu gagner l’élection. Cette coalition baroque est grosse de potentiel.

IM - Quelles sont les conséquences de ce réalignement pour le monde ?

WM - L’Indo-Pacifique est désormais l’arène de la compétition géo-économique mondiale. C’est pourquoi la Russie est perçue comme un contrepoids face à la Chine, et que Donald Trump caresse l’espoir d’une sorte d’entente avec le Kremlin : il espère que, Vladimir Poutine ayant réglé ses affaires avec l’Ukraine et s’estimant satisfait, il pourra délaisser sa frontière Ouest et se concentrer à l’Est.

M.Trump ne croit pas qu’une victoire en Ukraine puisse renforcer la Russie au point d’en faire un péril.

Il existe à l’inverse des courants, très minoritaires, qu’on pourrait dire néo-brzezińskiens (Zbigniew Brzeziński, conseiller à la Sécurité nationale de Jimmy Carter de 1977 à 1981, avait rompu avec la politique de Détente qui prévalait vis-à-vis de l’URSS), qui voient la Russie comme une menace, mais M.Trump ne croit pas qu’une victoire en Ukraine puisse renforcer la Russie au point d’en faire un péril.

Incapable de saisir l’essence de l’impérialisme poutinien, il sous-estime largement la Russie au nom d’une sorte de conception fantasmagorique selon laquelle l’Allemagne post-guerre Froide s’est enrichie en se faisant la partenaire économique de la Russie, tout en profitant du parapluie de défense américain : Trump voudrait faire des États-Unis la nouvelle Allemagne, c’ets-à-dire profiter des avantages économiques offerts par la Russie et reléguer les questions de défense aux Européens. Quant à savoir si la Moldavie ou la Géorgie (suivant l’Ossétie et l’Abkhazie) intègrent le giron russe : il n’en a que faire. 

IM - Face à l’émergence sans cesse plus concrète de l’Asie, faut-il conclure que l’Europe est hors jeu dans les affaires du monde ? 

WM - Aujourd'hui, l’Europe n’est pas un acteur géopolitique. D’ailleurs, si on cherche qui est l’héritier de l’Europe, on est bien en peine de répondre. La Turquie, naguère attirée par l’Europe ? Elle se tourne désormais vers le Levant. La Russie ? Elle se ramasse dans ses frontières - dont l’acception est bien entendu largement extensive ! L’Afrique ? Jadis contestée entre les Italiens et les Français, elle fait le jeu de la Russie et de la Chine (retrait définitif de Barkhane en août 2022).

Faut-il pour autant établir le constat de décès de l’Europe ? Ce serait trop dire. L’Europe n’a pas totalement disparu mais elle n’est plus un acteur militaire et est en peine d’agir sur la gouvernance des pays en difficulté : le Groenland, le Liban, la Méditerranée … Il est possible que ce panorama très sombre la galvanise ? L’histoire européenne depuis 1918 laisserait penser que non, mais je ne suis pas déterministe ! Il faudrait toutefois un très important changement. 

IM -La difficulté, pour l’analyste, est qu’on dit en même temps que Donald Trump est moins différents de ses prédécesseurs qu’on ne l’affirme, et qu’il est prêt à faire un "deal" avec la Chine ! Faut-il considérer que Trump est un homme des sphères d’influence ? Ou des coalitions ? 

Trump n’est pas un dogmatique ! Et quand bien même le paradigme d’une nouvelle Guerre froide États-Unis/Chine serait-il réactivé, ce sera en passant par des moments de détente, par des accords, par des sursauts de tensions, par de l’hostilité brutale.

WM - On peut dire ce que l’on veut : Trump n’est pas un dogmatique ! Et quand bien même le paradigme d’une nouvelle Guerre froide États-Unis/Chine serait-il réactivé, ce sera en passant par des moments de détente, par des accords, par des sursauts de tensions, par de l’hostilité brutale … Exactement comme durant la Guerre Froide ! Essayant d’aligner les actions de Donald Trump avec des paradigmes cohérents de politiques étrangères conduit droit à l’impasse. Trump est un opportuniste. Il sert ses intérêts où qu’ils soient.

IM - On le voit précisément avec la Chine : Trump est prêt à retourner sa veste ! 

WM - Le changement et le revirement sont presque des fins en soi pour Donald Trump. La Chine est un excellent cas d’école : Donald Trump a imposé ses droits de douane de 145 % le 1er avril ("Liberation Day") avant de décréter une pause de 90 jours et de les faire passer à 30 %. Il va changer de nouveau : nul besoin d’être Nostradamus. 

IM - On dit que Donald Trump confirme le "pivot asiatique" : mais on voit qu’il ne traite pas mieux ses alliés européens qu’il ne traite ses alliés asiatiques ! Regardez avec Taiwan ! Dans une de vos tribunes au Wall Street Journal, vous affirmiez d’ailleurs qu’il n'était pas certain qu’en cas d’attaque, les États-Unis réagissent .. 

WM - Il ne faut pas oublier que c'est le propre de l’ambiguïté stratégique de la doctrine américaine envers Taiwan depuis 1968. Trump est l'ambiguïté stratégique faite homme… Et en cela, il s’inscrit finalement dans une tradition classique de la politique étrangère américaine. 

IM - Il y a eu des doctrines solides, si l’on pense à Henry Kissinger [Secrétaire d'État de Richard Nixon]. 

IM - Qu’en est-il des autres pays en Asie du Sud-Est ? 

WM -L’Inde et l’Australie ont des approches divergentes. En Inde, Donald Trump et ses équipes n’ont pas mesuré l’effet détestable produit par certaines déclarations sur le Pakistan, après les attaques terroristes perpétrées le 7 mai au Cachemire : Donald Trump s’était prévalu sur son réseau Truth social d’être parvenu à une médiation - ce que conteste New Delhi - et Marco Rubio, le secrétaire d’État, a affirmé que les deux parties étaient convenues d’entamer des pourparlers un large nombre de sujets - ce que réfute, de même, Delhi. Narendra Modi reproche à la Maison-Blanche de renvoyer dos-à-dos son pays et le Pakistan et de remettre en cause sa politique. Dans ce contexte, l’Inde fait en quelque sorte figure de "swing state" plutôt que de pays acquis aux États-Unis. En même temps, Pékin fait peser de lourdes menaces et il faut s’attendre à ce qu’elle ne s’illustre pas par sa tempérance, si elle est convaincue des vulnérabilités de ses adversaires …. Cela force d’une certaine manière Washington et Delhi à s’entendre, mais dans le court ou moyen terme, les relations entre MM. Modi et Trump devraient rester tumultueuses

En Corée du Sud, les précédentes tentatives de Trump pour essayer de reconfigurer la relation avec la Corée du Nord sont bien perçues (au cours de son premier mandat, Donald Trump avait rencontré trois fois Kim Jong Un, en juin 2018, février 2019 et juin 2019) et incitent la Corée à ne pas trop remettre en cause la relation avec Washington, malgré les difficultés économiques dans lesquelles la met la guerre commerciale. En revanche, la Corée du Sud se fie de moins en moins à la garantie américaine, et considère que la menace nucléaire de la Corée du Nord l’oblige à se doter de sa propre arme nucléaire et à se rapprocher du Japon. Dès lors, la réaction de la Corée du Nord serait à craindre. 

La situation est entièrement différente avec l’Australie ou l’Indonésie (cette dernière faisant un peu figure de terra incognita de la politique étrangère américaine) et toute la région : si l’Inde, l’Indonésie, Taiwan, le Vietnam ou le Malaisie continuent de croître économiquement et de réduire l'écart avec la Chine, la région deviendra trop prospère, trop puissante, pour une confrontation frontale avec la Chine, et dépendra moins des systèmes d’alliances multilatérales au profit des "anticorps" que lui procureront une cohésion interne solide.

Si l’Inde,  l’Indonésie, Taiwan, le Vietnam ou le Malaisie continuent de croître économiquement et de réduire l'écart avec la Chine, la région deviendra trop prospère, trop puissante, pour une confrontation frontale avec la Chine.

Mais tout reste suspendu à Taiwan : si Pékin s’empare de l’île, et parvient à contrôler la Mer de Chine méridionale, le Japon et la Corée du sud seront forcés de s'entendre avec la Chine pour continuer à commercer avec le reste du monde. Les positions de l’Australie ou de l’Inde seront aussi considérablement fragilisées, car les promesses de sauvegarde américaines paraîtront complètement irréalistes.

La "bonne" nouvelle est que Xi est pour l’instant concentrée sur le renforcement de son armée : on peut donc espérer avoir 16 mois sans opération extérieure majeure… 

IM - Trump est un président révolutionnaire : sous son mandat, l’Amérique ne fait pas vraiment de "deal avec le reste du monde, contrairement à ce qu’on dit, parce que le rapport de force est déséquilibré. Cette stratégie peut-elle tenir sur le long terme ? N’y a-t-il pas un risque que les États-Unis s'affaiblissent ? 

IM - Quelle que soit la combinaison des quatre écoles de politique étrangère, les États-Unis peuvent-ils continuer à évoluer seuls dans un paysage bientôt riche de multiples centres de puissance ? Ce n’est peut-être pas "l’apogée des puissances moyennes", mais d’autres acteurs majeurs surgiront, et nombre d’entre eux préféreront contrebalancer Washington plutôt que de se rallier à elle. L’avantage démographique que conserve l’Amérique sur la plupart des pays développés, conjugué à d’autres atouts structurels, suffira-t-il à maintenir son rang de première puissance mondiale ?

WM -Aucune certitude n’existe. Je ne peux que m’en remettre - sortant du sévère périmètre de l’analyse doctrinale - à l’espoir qu’une Providence bienveillante ou une Divinité omnipotente protège l’humanité contre ce qui pourrait advenir de ses propres errements. Mais sans cette hypothèse, l’horizon reste ténébreux et impénétrable.

La révolution de l’information que traverse le monde dépasse en amplitude la révolution industrielle ; elle bouleverse notre mode d’être, modifie notre façon d’interagir, transforme l’accès aux biens… Toutes les institutions - État, famille, entreprise - sont en passe d’être reconfigurées en profondeur.

Donald Trump n’est pas la "cause" de cette révolution, pas plus que Napoléon n’était celle de la Révolution française. L’époque actuelle est intrinsèquement révolutionnaire. Comme Emerson le disait déjà, "les événements sont en selle et chevauchent l’humanité". Ce n’est pas l’homme qui conduit la locomotive, c’est elle qui le conduit, et on ne "surfe" pas sur Internet : c’est Internet qui "surfe" l’humanité.

À l’ère des armes de destruction massive autant que des interdépendances économiques et culturelles, les sociétés sont contraintes à coexister. De là un “optimisme de la  volonté” qui m’oblige à trouver notre époque résolument passionnante.

Si l’on ne peut attendre de notre “âge de bronze” qu’il soit celui de l’harmonie idyllique, doté d’institutions parfaitement stables, il n’en demeure pas moins que, à l’ère des armes de destruction massive autant que des interdépendances économiques et culturelles, les sociétés sont contraintes à coexister. De là un “optimisme de la  volonté” qui m’oblige à trouver notre époque résolument passionnante.

Propos recueillis par Hortense Miginiac
Copyright image : AlanDucarre

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