Rechercher un rapport, une publication, un expert...
L'Institut Montaigne propose une plateforme d'Expressions consacrée au débat et à l’actualité. Il offre un espace de décryptages et de dialogues pour valoriser le débat contradictoire et l'émergence de voix nouvelles.
29/05/2012

Le diplôme, la garantie d’une carrière réussie ?

Imprimer
PARTAGER
Le diplôme, la garantie d’une carrière réussie ?
 Gunilla Björner
Auteur
Ancienne responsable des relations institutionnelles de l'Institut Montaigne



Tribune de Gunilla Björner, responsable recherche et relations chercheurs de l'Institut Montaigne, parue dans "Courrier cadres & dirigeants" de mai 2012.

Au pays de l’élitisme républicain, réussir son insertion professionnelle suppose trop souvent de décrocher, après une trajectoire scolaire linéaire, un diplôme initial sélectif (de type grande école), particulièrement valorisé par les employeurs.

Et celui-ci reste déterminant pour la suite du parcours professionnel, même au-delà de la première expérience[1]. Ce phénomène renforce la reproduction sociale des élites et prive les entreprises des talents qui, sans avoir le diplôme requis, ont les compétences nécessaires pour réussir.

Toutefois, il faut quelque peu nuancer l’idée de la prépondérance du diplôme. Plusieurs enquêtes confirment certes qu’une très grande majorité des employeurs accorde de l’importance au diplôme, mais celles-ci révèlent aussi que l’expérience d’un métier arrive en tête des critères de recrutement définis par les entreprises, avant l’exigence d’un diplôme spécifique[2].

Le vrai enjeu : développer l’employabilité tout au long de la vie

Si avoir le "bon diplôme" et la "bonne expérience" sont des conditions incontournables pour accéder à l’emploi, nous n’accordons pas suffisamment d’importance au développement de l’employabilité tout au long de la carrière. Or, le vrai enjeu est bien de permettre à chacun d’acquérir et d’actualiser en permanence ses compétences afin de s’adapter aux besoins du marché du travail. Trois mesures simples permettraient de développer l’employabilité.

La généralisation de la formation en alternance à tous les échelons de la formation initiale contribuerait à réduire le chômage des jeunes, particulièrement élevé en France (22,5 % en 2010). L’alternance est l’un des moyens les plus efficaces pour favoriser l’insertion professionnelle des jeunes diplômés et leur permettre d’acquérir des compétences opérationnelles.

Le renforcement de la formation professionnelle continue, essentiel pour favoriser la mobilité des travailleurs et améliorer notre compétitivité. Le système actuel profite surtout aux plus diplômés et aux salariés de moins de 50 ans. Pour le rendre plus efficace, il faut supprimer l’obligation légale de financement faite aux entreprises (calculée en fonction de la masse salariale) et la remplacer par un système où les entreprises et les particuliers sont subventionnés lorsqu’ils décident de suivre une formation labélisée. Cette subvention serait modulée en fonction d’objectifs ciblés (seniors, peu qualifiés, etc.).

La mise en place d’un bilan de compétences, gratuit et obligatoire, pour les salariés dès 40 ans, afin de renforcer l’employabilité des employés les plus expérimentés. Les résultats de ce bilan seraient ensuite mis en perspective avec les dispositifs de formation existants.

Enfin, pour favoriser l’emploi des personnes peu ou pas qualifiées, il faut privilégier l’aptitude sur le diplôme, surtout pour les postes qui ne requièrent qu’une faible qualification. Concrètement, il s’agirait de développer le recrutement sur compétences, en soumettant les demandeurs d’emploi concernés à une évaluation pratique en milieu du travail. Cette démarche permettrait de donner toutes leurs chances aux personnes qui, bien que compétentes, n’ont pas un diplôme pour le prouver.

Dans une économie mondialisée, le vrai sésame pour réussir sa carrière sera la capacité de chacun de rester "employable" tout au long de la vie.

Aller plus loin :
Formation professionnelle : pour en finir avec les réformes inabouties, octobre 2011
15 propositions pour l’emploi des jeunes et des seniors, septembre 2010
Pauvreté, exclusion : ce que peut faire l’entreprise, février 2006

Notes

[1] Des emplois pour les jeunes, OECD, 2009

[2] Cabinets de chasse de tête et de recrutement – Entre tabous et idées reçues, quelles pratiques et quelle contribution réelle ?, Oasys Consultants, 2011 ; Recrutement cadre : sélectionner sans discriminer, Apec, 2006.

Recevez chaque semaine l’actualité de l’Institut Montaigne
Je m'abonne