AccueilExpressions par MontaigneL'après-COP21 en quatre questionsL'Institut Montaigne propose une plateforme d'Expressions consacrée au débat et à l’actualité. Il offre un espace de décryptages et de dialogues pour valoriser le débat contradictoire et l'émergence de voix nouvelles.23/12/2015L'après-COP21 en quatre questionsImprimerPARTAGERAuteur Institut Montaigne Retour sur l'accord signé lors de la COP21 en quatre questions à Arnaud Aymé et Quentin Dérumaux, rapporteurs de la note Climat & entreprises : de la mobilisation à l'action ? Sept propositions pour préparer l'après-COP21.L’Accord de Paris a finalement été conclu le 12 décembre. Quels sont les principaux résultats obtenus à l’issue de ces 13 jours de négociations ?L’Accord de Paris a connu une gestation longue. Il est à la fois un point d’orgue et un acte fondateur. Il est le point d’orgue d’un processus visant à désembourber les négociations climatiques, suite à la Conférence de Copenhague qui avait consacré l’impasse du Protocole de Kyoto. Il est également un acte fondateur dans la mesure où il rassemble désormais l’ensemble des Etats membres dans une communauté d’objectifs, dont les moyens et la boîte à outils doivent encore largement être redéfinis.La COP21 est une très grande réussite sur le plan des principes. Elle aura reconnu, de façon universelle, la responsabilité humaine dans le dérèglement climatique, l’urgence d’apporter des solutions pour l’atténuer et la nécessité de viser un objectif plus ambitieux qu’un réchauffement de +2°C, limite au-delà de laquelle la fonte du permafrost entraînerait un point total de non-retour (saut de +2°C à +8°C). Elle entérine le principe d’une contribution de tous les pays à cet effort – quoique différenciée selon leurs capacités – sans faire référence à une responsabilité historique des pays développés ou à un droit moral à l’utilisation des fossiles par les pays émergents. En marge de l’Accord, les 100 milliards de dollars annuels d’aide aux pays en développement sont maintenus. L’ensemble a valeur juridique de traité international, théoriquement contraignant. L’Accord paraît également robuste, au sens où, peu disert sur les modalités, il est en l’état difficilement contestable.Qu’est-ce qui pourrait limiter sa portée ?Tout reste à faire sur les moyens et la boîte à outils pour atteindre l’objectif. La nouvelle méthode de mise en commun de contributions volontaires à la réduction des émissions mondiales est désormais validée. En revanche, les modalités de coordination de ces contributions pour garantir leur suffisance vis-à-vis de l’objectif sont inconnues. De même, aucun instrument d’incitation au respect des objectifs n’est mentionné dans l’accord (pénalisation, sanctions, etc.). L’ensemble de ces éléments est renvoyé à des décisions ultérieures. L’Accord est donc robuste, universel, théoriquement contraignant, mais il est encore impossible de dire s’il sera efficace.Vous avez rencontré une trentaine d’entreprises dans le cadre de la note Entreprises & climat : de la mobilisation à l'action. L’Accord vous semble-t-il en phase avec les attentes qu’elles expriment ?La concentration de l’Accord sur des questions de principe confortera les entreprises françaises dans l’approche que nous avons constatée au fil de ces rencontres. Elles ont, dans leur grande majorité, insisté sur la nécessité d’un accord contraignant, qui conduise à l’établissement d’un signal-prix sur les émissions de gaz à effet de serre (GES) qui soit lisible, prévisible et équilibré dans le cadre de la concurrence internationale. Elles n’ont généralement pas exprimé de préférences sur la forme de ce signal-prix, pourvu que les objectifs précités soient assurés. Pour la plupart d’entre elles, leur mobilisation ne doit pas être une conséquence de la réussite des discussions internationales mais en sera plutôt un prérequis. Elles reconnaissent, notamment depuis la Conférence de Copenhague, que leur mobilisation et les négociations sur le climat évoluent sur des échelles de temps différentes et que l’enjeu climatique ne peut attendre. Il doit être intégré dès à présent dans leur réflexion stratégique. Le secteur financier sert d’ailleurs d’exemple sur ce terrain, où la notion de « risque carbone » y reçoit l’accueil le plus attentif.Comment envisagent-elles désormais « l’après-COP21 » ?Leur perception de l’Accord de Paris est hétérogène. Il est très certain qu’il déçoive, à court terme, leur volonté de disposer d’un signal-prix pertinent pour les émissions de GES. Il est également à ce jour difficile d’en estimer les impacts économiques. Néanmoins, l’Accord initie une dynamique mondiale favorable et entérine la responsabilité de tous. Il les conforte donc dans la nécessité d’intensifier et de poursuivre leur mobilisation, en dehors du cadre des discussions internationales.Le caractère (re)fondateur de l’Accord de Paris signifie donc que la mobilisation de la société civile, des entreprises et des Etats ne doivent pas faiblir dans les années à venir. C’est indispensable pour que cette nouvelle dynamique conduise effectivement à des résultats concrets. Moins impliquées dans les discussions internationales, les entreprises françaises maintiendront en revanche leur haut niveau d’exigence dans la qualité de leurs relations avec les pouvoirs publics. Si le texte signé lors de la COP21 reconnaît que l’échec n’est pas une option dans le domaine climatique, les entreprises seront d’autant plus vigilantes sur le respect des conditions de la réussite : simplicité des approches réglementaires et fiscales, affirmation claire des priorités politiques, équilibre dans la répartition de l’effort, cohérence dans la durée, ambition en matière de commande publique, garantie d’une « conversation » de qualité entre société civile, entreprises et Etat. Les propositions que la note Entreprises & climat : de la mobilisation à l'action a formulées s’inscrivent dans cette logique et doivent permettre aux pouvoirs publics d’agir rapidement pour donner corps à l’accord de Paris. ImprimerPARTAGER