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04/12/2019

La France et PISA : peut mieux faire

Trois questions à Christophe Gomes

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La France et PISA : peut mieux faire
 Christophe Gomes
Directeur d'Agir pour l'école

Les résultats de la dernière enquête PISA (Programme international pour le suivi des acquis), réalisée en 2018, confirment la situation du système éducatif français : le niveau des élèves est légèrement au dessus de la moyenne des pays de l'OCDE et les inégalités sont encore très fortes. Que retenir de cette dernière édition ? Analyse avec Christophe Gomes, directeur d’Agir pour l'école.

Quels sont les trois points qui retiennent votre attention, après la publication de cette nouvelle édition de PISA ?

La stabilité des résultats, l’inégalité qui demeure, l’espoir légitime que suscitent les dernières mesures. On peut bien sûr être heureux de la stabilisation de la situation, et même de la légère progression en compréhension écrite alors même que le contexte social, lui, a empiré : globalement, cette nouvelle édition PISA 2018 ne nous dégrade pas du point de vue des compétences.

Ce serait cependant oublier un peu vite la lourde couronne qui ne nous quitte pas. Notre système est un des plus inégalitaires : l’origine sociale des élèves pèse lourd dans l’explication de leurs résultats. Le décalage des résultats PISA et des mesures qui bénéficient aux plus jeunes élèves aujourd’hui, comme par exemple le dédoublement des classes en début de scolarité primaire qui montre déjà son efficacité, n’affecte pas encore les résultats dans cette étude OCDE. On peut donc légitimement espérer une belle performance dans de futures éditions PISA, et plus rapidement dans PIRLS (Progress in International Reading Literacy) par exemple.

Cette année la dominante est la “compréhension de l'écrit”, c'est-à-dire les compétences des élèves de 15 ans en lecture et en écriture. Concrètement, comment améliorer la compréhension en lecture chez les adolescents ?

L’étude le souligne une nouvelle fois et elle n’est pas la seule, la priorité doit être donnée à l’école maternelle et au primaire, ces premières années déterminant grandement la suite. La compréhension de l’écrit se construit très tôt, l’apprentissage de la lecture est une construction exigeante, parfois très longue pour les élèves les plus en difficulté. Le changement des pratiques en classe dans de nombreux cas est inévitable, il faut s’assurer que les nouveaux moyens mis à disposition de l’éducation prioritaire servent directement la réussite des élèves.

On parle beaucoup du caractère inégalitaire de notre système éducatif. À quel âge tout se joue-t-il, notamment pour la lecture, et quelles seraient à vos yeux les réponses à apporter pour un système moins inégalitaire ? Le Royaume-Uni est-il en cela un modèle à suivre ?

On ne peut en effet pas détourner le regard de cet élément dérangeant de cette édition PISA 2018 : les inégalités sont fortes et ne se résorbent pas. La stabilité à ce niveau élevé n’est pas une bonne nouvelle et il n’y a aucune fatalité dans ce résultat, des pistes sérieuses existent pour enrayer cet écart plus que jamais inacceptable.

On note très tôt une disparité dans l’aisance à lire un texte et en extraire une information ou son sens global.

Parmi les compétences les plus fondamentales, on note très tôt une disparité dans l’aisance à lire un texte et en extraire une information ou son sens global.Cette construction longue doit s’entamer dès le plus jeune âge, et se construire grâce à des démarches qui démontrent leur efficacité, et qui servent au mieux les efforts immenses que les enseignants ont à cœur de déployer quotidiennement.

En ce sens, la maternelle joue un rôle majeur dans la préparation de cet apprentissage, car un écart important existe déjà à l’entrée au Cours Préparatoire.

On songe vite à la comparaison avec la Royaume-Uni qui s’en sort nettement mieux que la France concernant le poids des inégalités sociales dans la réussite de ses élèves. De nombreuses mesures prises là-bas peuvent tout à fait nous inspirer, notamment l’accent mis sur le changement de pratiques pédagogiques et une exigence majeure sur les enseignants qui se saisissent des niveaux scolaires les plus critiques. Mais si on peut s’en inspirer, il nous faut bien entendu construire, grâce à ces pistes, un modèle qui nous est propre, en veillant à accompagner la meilleure performance du bien-être professionnel de ceux qui accomplissent chaque jour cette mission si exigeante.

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