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22/06/2012

L’Europe, homme malade du G20 - et cible privilégiée mais ménagée des BRICS

L’Europe, homme malade du G20 - et cible privilégiée mais ménagée des BRICS
 Christophe Jaffrelot
Auteur
Expert Associé - Inde, Démocratie et Populisme



Le sommet du G20 a réuni les dirigeants des principales puissances mondiales les 18 et 19 juin derniers à Los Cabos au Mexique. La situation européenne a été au cœur des négociations surdéterminées par les pays émergents.

Le président de la Commission européenne, José Manuel Barroso, a eu la témérité de rappeler d’entrée de jeu à Los Cabos que la crise actuelle de l’Union européenne (UE) trouvait son origine aux Etats-Unis et, surtout, d’indiquer que l’Europe n’était pas là pour recevoir des leçons. Il en a été pour ses frais - en raison, notamment, de l’acharnement des pays émergents. Guido Mantega, le ministre brésilien des Finances a ainsi tiré les conséquences de la perte de confiance des marchés dans la zone euro dans des termes choisis: "That means that the measures which are being taken are not enough to fix the problems because instead of reducing, they are increasing."

Dans le même temps, les BRICS (Brésil, Russie, Inde, Chine et Afrique du Sud), conscients de leur dépendance envers les marchés (et parfois les banques) de l’UE, ont cherché à se montrer constructifs. Comme l’a si bien dit Man Mohan Singh, le Premier ministre de l’Inde - un économiste de formation - "the Los Cabos Summit needed to send a strong signal to the markets that the eurozone countries will make every effort to protect the banking systems and the global community will back a credible eurozone effort and response.". Hu Jintao, le Président chinois, lui fit écho d’une manière fort diplomatique : "China has offered a variety of aid to Europe within its power since the start of the eurozone debt crisis and China will continue to back the EU's efforts to achieve economic recovery and growth."

L’engagement des pays émergents

Mais le soutien que les pays émergents ont accepté d’apporter à l’Europe n’est ni considérable, ni sans contrepartie. Ils ont ainsi accepté d’abonder les ressources du FMI de manière variable. La Chine s’est engagée à verser 43 milliards de dollars de plus, le Brésil, la Russie et l’Inde se sont chacun engagés à hauteur de 10 milliards, tout comme le Mexique - le pays hôte - tandis que l’Afrique du Sud se contentait d’annoncer 2 milliards. Dans un communiqué commun, les pays des BRICS ont toutefois fait savoir que : "These new contributions are being made in anticipation that all the reforms agreed upon in 2010 will be fully implemented in a timely manner, including a comprehensive reform of voting power and reform of quota shares". Les membres de l’UE - dont certains ont déjà laissé leur place à des pays émergents aux premières places des contributeurs du FMI - sont appelés à céder encore du terrain.

De leur côté, les BRICS ont tenu - sous l’égide de M. Singh - une réunion parallèle au cours de laquelle ils ont envisagé des accords de swap et la création d’un fond de réserves leur permettant de protéger leurs monnaies contre les chocs externes. Les pays émergents se rapprochent ainsi en vue de la catastrophe annoncée au sein du Vieux Continent. Le sommet de l’UE des 27 et 28 juin dira, peut-être, s’ils surestiment ou sous-estiment les risques d’explosion de la zone euro.

La balle est en tout cas dans le camp des Européens qui ne peuvent rester paralysés plus longtemps: ou bien ils font un (grand) pas de plus vers l’intégration, ou bien ils revisitent le périmètre de l’euro.

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