Mais cette explication quantitative reste insuffisante dans la mesure où la corrélation entre nombre de startups en amorçage et nombre de licornes est loin d'être parfaite. Israël, par exemple, finance moins de deux fois moins de startups en amorçage que la France et n'en possède pas moins 24 licornes, soit une de plus que la France, tandis que la Suisse finance, proportionnellement à son nombre d’habitants, 2,9 plus d’entreprises en amorçage que la France, mais n'en dispose, toujours par habitant, "que" 1,9 fois plus de licornes que l'hexagone. Si le nombre d’entreprises initialement créées et financées a son importance, ce n’est donc pas le facteur surdéterminant.
D'autres facteurs semblent donc en jeu comme le nombre d’établissements d’enseignement supérieur spécialisés dans le numérique. Si l'on prend le classement QS World University Rankings, en sciences informatiques (computer sciences), on trouve au sein du top 200 : 49 établissements situés aux USA (715 licornes), 17 au Royaume-Uni (47 licornes), 3 en Israël (23 licornes) et 7 en France (24 licornes). Si l’on s’attache aux établissements qui se concentrent sur l'entrepreneuriat, les résultats sont encore plus probants. Différentes études, dont celle du Time Higher Education, montrent qu'une part significative des fondateurs d'entreprises digitales proviennent des établissements proposant ces formations.
Une analyse montre qu'aux USA, 34 des 73 licornes nées au cours de l'année 2021 ont au moins un fondateur ayant étudié à Stanford, Harvard ou au MIT, les trois établissements situés en haut du classement "digital entrepreneurship" du Time higher Education. En Suisse, quatre des six licornes ont un lien direct avec l’EPFL (École polytechnique fédérale de Lausanne) ou l’ETH (École polytechnique fédérale de Zurich), établissements se situant respectivement à la 9ème et 10ème place du classement QS World University Rankings, section Computer Sciences et proposant des formations à l’entrepreneuriat dans leurs majeures numériques.
D'une façon plus générale, Stanford, Harvard, le MIT ou Cambridge University (RU) semblent mener la course en tête en matière de création de startups. Le MIT en particulier, peut se targuer d’être à l'origine d’environ 1 100 startups créées par ses élèves ou anciens élèves, dont une centaine directement incubés au sein de l'établissement ("From the Basement to the Dome"). Une caractéristique commune à toutes ces écoles se trouve dans le fait qu’aux côtés des disciplines techniques qu’elles enseignent, elles s'attachent à proposer des ressources pour les aspirants entrepreneurs de haut niveau. On y trouve des cours d'entreprenariat numérique considérés comme figurant parmi les meilleurs au monde, des stratégies d’incubation sophistiquées, des liens forts constitués avec des fonds de capital-risque, des organisations d’événements de premier plan dans différents champs technologiques. Tout ceci constitue des facteurs importants de succès pour les startups en devenir. Les conséquences s’expriment concrètement dans les chiffres : Stanford aurait créé directement 5 000 entreprises depuis 1983 ("Startups and Stanford University"), tandis que 18 % des élèves du MIT deviendraient entrepreneurs (Entrepreneurship and Innovation at MIT -Edward B. Roberts, Fiona Murray, J. Daniel Kim) et que les startups d’origine universitaire au Royaume-Uni parviendraient à attirer rien moins que £5 mds d’investissement en 2021 ("Busting myths and Moving Forward"), Cambridge et Oxford se taillant vraisemblablement la part du lion dans ces montants levés.
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