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Note
Juin 2020

Les entreprises françaises
en Afrique

face à la crise du Covid-19

Auteurs
Mahaut de Fougières
Responsable du programme Politique internationale

Mahaut de Fougières était responsable du programme Politique internationale jusqu'à Février 2023. Dans ce cadre, elle pilote les travaux de l'Institut Montaigne sur la défense, la politique étrangère, l'Afrique et le Moyen-Orient, et mène des projets transversaux au sein du pôle international. Auparavant, elle était chargée d'études sur les questions internationales, depuis 2018.

Diplômée de King's College London et de University College London (UCL) en relations internationales, elle a également étudié à l'université américaine de Beyrouth (AUB).

Groupe de travail

Les opinions exprimées dans ce rapport n’engagent ni ces personnes ni les institutions dont elles sont membres.

 

  • Jean-Michel Huet, Partner, BearingPoint (président)
  • Bertrand Ambroise, Directeur international - Marché International de Rungis, Semmaris
  • Nicolas Andrieu, Vice-President Middle East & Africa, Sigfox
  • Régis Arnoux, Président-directeur général, CIS Catering
  • Yves Barraquand, CEO, CMR Group
  • Stéphane Couturier, International Development Managing Director, CVE
  • Jean-Pierre Dréau, Président, SNEF
  • Didier Fégly, Président, Groupe SACRED
  • Samuel Goldstein, Business Development - Africa, Meridiam
  • Antoine Huard, Directeur international, Générale du solaire, auteur de la note de l'Institut Montaigne Énergie solaire en Afrique : un avenir rayonnant ? (février 2019)
  • Valentin Jung, Director Overseas, Heppner
  • Philippe Labonne, Directeur général adjoint, Bolloré
  • Patrick Lawson, Deputy Head of Concessions, Bolloré
  • Stéphane Layani, Président-directeur général, Semmaris
  • Corinne Murcia Giudicelli, Directrice Affaires Stratégiques et Relations Institutionnelles, SURYS SAS
  • Patrick Poirrier, Président-directeur général, CEMOi
  • Lionel Raffin, Directeur général associé, GEOSAT
  • Eric Sauvage, Consultant et membre du Comité Stratégique de l'Institut Montaigne
  • Georges Serre, conseiller institutionnel, Groupe CMA CGM
  • David Sussmann, Président, Seafoodia
  • Renaud Tarrazi, Architecte, MAP

Avec seulement 3 % des cas de contamination au Covid-19 recensés dans le monde, l’Afrique semble, pour l’instant (à date du 26 juin 2020), relativement épargnée par la pandémie. Ceci étant dit, les 54 pays ont été touchés par le virus, qui ne cesse de gagner du terrain sur le continent : selon l’OMS, le nombre de cas a doublé - passant de 100 000 à 200 000 - en moins de 20 jours. Cette accélération est d’autant plus inquiétante que les mesures restrictives et de distanciation sociale sont difficiles à appliquer, alors que le secteur informel représente plus de 80 % des emplois africains, et 70 % de la population urbaine du continent vit dans des bidonvilles surpeuplés.

Par ailleurs, si le désastre sanitaire annoncé depuis l’apparition de l’épidémie ne s’est réalisé en Afrique, pour l’instant en tout cas, le continent subit les conséquences économiques de la crise. Il connaîtrait, pour la première fois depuis 25 ans, une récession économique, selon la Banque mondiale, qui estime celle-ci entre -2,1 % et -5,1 % (contre une croissance de 2,4 % en 2019). Cela s’explique en partie par la forte baisse des cours des matières premières dont les économies de plusieurs pays africains comme le Nigeria sont dépendants. De même, l’interruption brutale des activités touristiques, industrielles et des transferts d’argent depuis l’étranger due à la crise, heurte sensiblement les économies du continent.

Les entreprises en difficulté sur le continent

Dans ce contexte, les nombreuses entreprises françaises présentes en Afrique sont confrontées depuis le début de la crise à de multiples enjeux.

  • Sécuritaires, d’abord : alors que le respect des mesures restrictives - qui font l’objet d’une contestation grandissante - mises en place dans un grand nombre de pays africains pour faire face à la crise sanitaire vient s’ajouter aux priorités habituelles des forces de l’ordre (menace djihadiste, contrebande, piraterie, etc.), les expatriés français n’ont pas eu le réflexe du départ. Les entreprises doivent s’assurer de la sécurité de leurs employés, locaux comme expatriés, dans des contextes de tensions accrues. S’ajoute à cela la question de la sécurité alimentaire, mise à mal par la crise et notamment par la fermeture des frontières.
     
  • De production, ensuite, la crise du Covid-19 et les mesures restrictives associées ayant considérablement ralenti celle-ci. L’interruption des vols entre l’Afrique et la France constitue également un frein à l’activité de nos entreprises. Enfin, en Afrique comme en Europe, la problématique des masques - mais également des visières, des gants, ou tout matériel de protection nécessaire pour éviter la transmission du virus - est incontournable.

À ces urgences causées par le Covid-19 s’ajoute la nécessité d’opérer dès maintenant une relance des économies et des échanges, tout en tirant les leçons de la crise - en matière de digitalisation par exemple. Le contexte s’y prête d’ailleurs bien, avec l’allègement progressif des mesures restrictives des deux côtés de la Méditerranée. Sur ces deux aspects, les autorités françaises doivent être au rendez-vous auprès de nos entreprises, afin de pérenniser les relations commerciales entretenues par les groupes français qui opèrent en Afrique.

Nos recommandations

À court terme : gérer les urgences liées à la crise

Sécurité des personnes, sécurité alimentaire, interruption des vols, matériel de protection, orientation des financements : les entreprises françaises présentes sur le continent africain doivent faire face à de nombreux enjeux de court terme liés à la crise du Covid-19. Elles nécessitent, sur tous ces points qui menacent leurs activités sur le continent, l’assistance des autorités françaises. 

Encourager la réouverture rapide des vols vers et depuis l’Afrique pour motif professionnel, en soutenant une étroite coordination intra-africaine du fait des escales fréquentes pour ces vols.

Intégrer les risques liés à la crise du Covid-19 dans les conditions traditionnelles des ambassades et consulats français de rapatriement des ressortissants français.

Mettre en place une ligne de financements afin de soutenir les initiatives agricoles locales, accompagner l’agriculture vivrière et former des agriculteurs locaux pour en faire de véritables agri-entrepreneurs.

Permettre aux ambassades d’encourager l’investissement, notamment français, dans des industries locales de production de masques, gants, visières et blouses, dont pourraient bénéficier les entreprises implantées localement. Envisager de faire de l’Afrique un espace supplémentaire de production de ce matériel permettant d’en diversifier l’approvisionnement pour les pays européens.

Prévoir un mécanisme de garantie exceptionnelle post-crise abordable pour le lancement de projets déjà mûrs afin de dérisquer les investissements. Dans cette optique, élargir les mécanismes existants de Bpifrance et d’autres organismes, en prenant en compte la possibilité pour ces financements extérieurs (Banque mondiale, BEI, AFD) de passer par des organismes internes aux États, voire les banques centrales.

Outre les investisseurs historiques concernés par ces garanties, proposer des aides spécifiques aux primo-investisseurs pour les encourager.

Orienter les financements existants français et européens en priorité vers les entreprises africaines et européennes, dont françaises, tout en accélérant le montage des projets par une simplification des procédures de passation de marché.

Encourager la création d’une ligne spécifique de financement pour les entreprises françaises.

À moyen et long termes : relancer durablement les économies

Parallèlement, alors que les mesures restrictives liées au Covid-19 sont progressivement allégées des deux côtés de la Méditerranée, des impulsions doivent permettre un redémarrage durable de l’activité et des échanges.

Soutenir, via le pouvoir politique et les ambassades, les entreprises françaises implantées en Afrique pour les prémunir contre des politiques fiscales confiscatoires.

Prôner une plus grande formalisation de l’économie et une meilleure gouvernance par la digitalisation, que la crise a poussé certaines administrations africaines à adopter.

Cibler les investissements et les financements des bailleurs tels que l’AFD vers les secteurs énergétique, alimentaire et digital, et non seulement sur le secteur sanitaire, en donnant la priorité à une articulation public-privé rendant le risque acceptable pour les investisseurs.

Créer un poste de Commissaire européen à l’Afrique au sein de la Commission européenne, en proposant une réciprocité au niveau de l’Union africaine.

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