AccueilExpressions par MontaigneUn accord qui bénéficie avant tout à l'emploiL'Institut Montaigne propose une plateforme d'Expressions consacrée au débat et à l’actualité. Il offre un espace de décryptages et de dialogues pour valoriser le débat contradictoire et l'émergence de voix nouvelles.18/01/2013Un accord qui bénéficie avant tout à l'emploi Régulation Cohésion socialeImprimerPARTAGERAuteur Angèle Malâtre-Lansac Déléguée générale de l'Alliance pour la santé mentale Tribune d'Angèle Malâtre-Lansac, directrice des études de l'Institut Montaigne, parue dans la rubrique Idées du Monde.fr le 17 janvier 2013. L'accord du 11 janvier constitue un bel exercice d'équilibrisme entre les besoins des entreprises – compétitivité et flexibilité – et ceux des salariés – sécurisation. Le grand gagnant en est l'emploi. Les vingt-huit articles du texte penchent en effet tantôt du côté des salariés, avec les droits rechargeables à l'assurance chômage, la généralisation des complémentaires santé ou encore la taxation des CDD, tantôt du côté des entreprises qui ont notamment obtenu les accords de maintien dans l'emploi et l'assouplissement des procédures de licenciements.Sur la forme, l'aboutissement de cette négociation difficile va bien dans le sens d'un renforcement du rôle de la négociation sociale. L'accord, négocié dans un contexte économique et social extrêmement dégradé, montre la capacité des partenaires sociaux à adopter une logique de compromis et de recherche de nouveaux équilibres entre compétitivité des entreprises et protection des salariés. Deux hypothèques pèsent encore sur cet accord. Tout d'abord, le choix que feront les parlementaires de retranscrire – ou non – l'accord tel quel dans la loi. Après tous les efforts consentis par les uns et les autres, c'est à souhaiter. Le gouvernement a d'ores et déjà appelé sa majorité à faire preuve d'une solidarité sans faille sur ce sujet. En second lieu, l'attitude des juges, dont l'interprétation et la jurisprudence seront décisives dans la réalité des mesures adoptées. Sur le fond, cet accord présente des avancées conséquentes. Il ne règle bien entendu pas tout. Ainsi, deux chantiers réclamant davantage de courage politique de la part des partenaires sociaux et du gouvernement restent encore entiers : l'unification des contrats de travail et la formation professionnelle. En 2011, 75 % des recrutements se sont fait en CDD. Le marché du travail tend à réserver les emplois stables aux personnes les plus expérimentées et à condamner les jeunes et les peu qualifiés aux contrats courts. La majoration de la cotisation d'assurance chômage pour les CDD prévue à l'article 4 de l'accord va dans le sens d'une baisse des embauches en CDD. Cependant, pour mettre fin au dualisme sur le marché du travail, la mise en place d'un CDI assoupli et sécurisé pour tous est nécessaire. Les négociations ont montré à quel point ce sujet est sensible et complexe. Enfin, le véritable levier de la mobilité des salariés reste la formation. Chaque année, 150 000 jeunes quittent le système éducatif sans qualification. Quel avenir professionnel peut-on leur proposer ? Seule une formation continue de qualité pourra leur permettre de réussir sur le marché de l'emploi. Or malgré les 30 milliards d'euros dépensés chaque année dans la formation professionnelle, celle-ci bénéficie avant tout aux plus diplômés. Et il y a peu de chances que le compte personnel de formation prévu à l'article 5 de l'accord du 11 janvier suffise à rendre le système efficace pour ceux qui en ont vraiment besoin. Ces résultats médiocres s'expliquent en grande partie par le financement peu transparent qui entoure notre système de formation professionnelle, financement qui bénéficie aux organisations syndicales et patronales. La nécessaire remise à plat de la formation professionnelle ne fera pas l'économie d'une réflexion approfondie sur le financement du paritarisme. Cela implique courage, lucidité et responsabilité de la part des partenaires sociaux.ImprimerPARTAGER