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19/07/2024

Tik Tok, enjeux pour l’UE

Tik Tok, enjeux pour l’UE
 Mathieu Abeille
Auteur
Consultant spécialisé en product management et technologies numériques.

C’est l’Inde qui ouvrait le bal en juin 2020 : TikTok, interdit, au nom du respect de la souveraineté nationale après des affrontements meurtriers avec la Chine, à la frontière himalayenne. Depuis, le Canada, la Nouvelle-Zélande, l’Australie, certains pays européens et les institutions de l’UE ont à leur tour proscrit le téléchargement de l’application à leurs fonctionnaires, un rapport du Sénat français a préconisé son interdiction en juillet 2023 et aux États-Unis, la loi Protecting Americans From Foreign Adversary Controlled Applications Act ("protéger les Américains d’applications contrôlées par des adversaires étrangers") du 23 avril donne à TikTok 270 jours pour trouver des investisseurs non chinois, à défaut de quoi la plateforme sera interdite du sol américain. Aussitôt,  le 7 mai, TikTok déposait plainte pour non-respect de la liberté d’expression. Le climat de suspicion ou d’hostilité ne cesse donc de croître. Le 14 mai, 8 créatifs TikTok attaquent le gouvernement américain en justice au motif que cette interdiction violait le premier amendement sur la liberté d’expression aux États-Unis.

Dans le labyrinthe algorithmique aux multiples embranchements -  la Chine et les États-Unis, la protection des données des utilisateurs et celle des intérêts commerciaux d’acteurs économiques concurrents, la santé publique et la liberté d’expression - la France et l’UE sauront-elles trouver leur voie ? Entretien avec Mathieu Abeille.

 

Qu’est-ce qui distingue par nature TikTok d’autres plateformes de réseaux sociaux ? Comment définir le concept et la cible de cette application ?

TikTok a rejoint la galaxie des plateformes de réseaux sociaux en 2016. Développée par la société chinoise ByteDance, elle se distingue de ses consoeurs (Facebook, Twitter, Instagram, Snapchat …) à la fois par des différences d’usage, et par son origine, chinoise.

Ses différences fonctionnelles, tout d’abord, ont assuré son succès rapide auprès d'un public de jeunes adolescents et de jeunes adultes. TikTok se caractérise par son format unique de vidéos courtes, d’une durée comprise entre quinze secondes et trente minutes, là où ce format (les "reels" de Snapchat) n’est qu’une possibilité parmi d’autres dans l’offre des autres plateformes, qui permettent aussi de partager des images, des textes et des vidéos. Cette spécialisation et ce format unique ont permis à TikTok de développer un algorithme de recommandations particulièrement pertinent et sensible aux tendances. La personnalisation accrue des contenus offerts vaut à ce réseau social, à partir des interactions des utilisateurs, des "like", du temps de visionnage et des partages, des utilisateurs particulièrement fidèles et captifs. Notons également que l’écosystème des influenceurs TikTok se distingue de celui des autres réseaux : ils sont moins connus et sont sélectionnés en fonction de leur capacité à parler à un maximum de personnes du "quotidien" sans nécessairement avoir vocation à faire "rêver" comme c'est le cas sur les réseaux sociaux plus classiques. L’algorithme de TikTok est très performant : chaque vidéo est continuellement testée afin d’en évaluer le potentiel viral. Soumise à un petit échantillon d'utilisateurs, elle est propulsée, en fonction de son score d'interaction, à un niveau d’exposition supérieur où, si la vidéo obtient toujours un bon score, on l’exposera à un niveau de visibilité plus important, et ainsi de suite. C'est ainsi que TikTok a pu prospérer dans un environnement fortement concurrentiel.

L’algorithme de TikTok est très performant : chaque vidéo est continuellement testée afin d’en évaluer le potentiel viral.

Par ailleurs, l’autre différence majeure de TikTok est qu'elle n’émane pas de la Silicon Valley, où ont prospéré ses compétitrices : il s’agit d’une entreprise aux nombreuses ramifications mais dont la propriété finale est chinoise.

Or, un réseau social chinois questionne, dans le nouveau contexte de rivalité entre les États-Unis et la Chine et de réflexion stratégique menée par l’Europe sur son positionnement, où la détention des données représente un enjeu majeur (qualité des informations, sécurité des données).

Dans quelle mesure ByteDance contrôle-t-elle la stratégie de TikTok et que sait-on de la proximité et de la collaboration de Bytedance avec les autorités chinoises ? Les projets Texas et Clover, lancés en mars 2023 et qui visent à héberger les données des utilisateurs américains sur le sol américain, et des utilisateurs européens sur le sol européen, apportent-ils des réponses satisfaisantes ?

ByteDance, la société mère de TikTok, qui en est le propriétaire et le développeur, exerce un contrôle significatif sur la stratégie de l'application et influence directement ses décisions opérationnelles, stratégiques et technologiques: les dirigeants de TikTok sont chinois ou d'origine chinoise (ainsi de la présidente de TikTok France jusqu’en août 2023, Zhao Tian, née en Chine mais naturalisée canadienne, depuis remplacée par l’Américain Adam Presser).

Dans la mesure où la Chine manipule adroitement les ressources de l'extraterritorialité de son droit (par exemple quand, à partir de 2018, l’Administration de l’aviation civile de Chine a contraint, sous peine de sanction, les compagnies aériennes étrangères à cesser de référencer l’aéroport de Taipei comme faisant partie de Taiwan mais à indiquer qu’il s’agissait de la Chine), et également parce que les réseaux sociaux sont devenus le moyen d'information préféré de 69 % des jeunes, la question d'une ingérence politique de Pékin via TikTok inquiète.

Ainsi, le 6 juillet 2023 paraissait un rapport sénatorial, La tactique TikTok, qui préconisait de poser un ultimatum à l’application, en menaçant de l’interdire au 1er janvier 2024 si elle ne répondait pas aux inquiétudes soulevées en matière d’ingérence étrangère et de sécurité des données.

Face à cette méfiance, et craignant les mesures qu’elle pourrait inspirer, TikTok s’attache à témoigner de sa bonne foi. Lancé en 2022 aux États-Unis, le projet Texas doit convaincre les autorités américaines que les données de TikTok sont hébergées aux États-Unis et qu’elles sont protégées. Dans cette optique, des centres de données ont été construits sur le sol américain. TikTok a lancé un projet jumeau en Europe avec le "projet Clover", qui veut répondre aux contraintes du Règlement Général sur la Protection des Données (2016). La plateforme initie également des audits indépendants, menés par le groupe de cybersécurité NCC Group, qui sont censés garantir que les données des utilisateurs sont bien stockées sur le sol américain ou européen et signaler tout incident de sécurité à TikTok et aux autorités compétentes, afin de rassurer les législateurs et les utilisateurs.

Le réseau a également déployé un programme de modération, constitué de "fact checkeurs" (souvent des universitaires ou des doctorants) dont le métier consiste à vérifier et attester la fiabilité des informations qui circulent. À travers une plateforme spéciale, des scientifiques indépendants téléchargent les vidéos, en font les transcriptions qu’ils soumettent à des vérifications factuelles, et sont rémunérés au nombre de verdicts rendus.

TikTok a lancé un projet jumeau en Europe avec le "projet Clover", qui veut répondre aux contraintes du Règlement Général sur la Protection des Données.

TikTok affiche par la suite ces verdicts : certaines vidéos comportent des bannières qui mettent en garde leur audience et indiquent que les informations présentées comportent des inexactitudes.

Ces initiatives ne sauraient toutefois apporter une réponse définitive aux réticences : à l'automne 2023, TikTok a reconnu que les données de ses utilisateurs européens étaient accessibles depuis la Chine, quoique stockées en Europe, et même si la société a démenti avoir transmis ces données au gouvernement chinois, c’est une possibilité qu’on ne peut écarter.De plus, dès lors que les fact checkeurs sont employés par TikTok, leur autonomie ne peut être absolument garantie. Les fausses nouvelles peuvent en effet présenter un intérêt économique pour TikTok (leur nature sensationnelle s'accompagne généralement d’une viralité élevée), voire politique, si la plateforme voulait influencer les opinions publiques. On ne cesse de rappeler combien les élections se jouent de plus en plus sur les réseaux sociaux, qui permettent de tester des idées de manière itérative, de mieux comprendre les électeurs flottants et de cibler très précisément les indécis en fonction des algorithmes de personnalisation.

En menant des audits externes pour démontrer qu'elle respecte les législations de l'UE et des États-Unis en termes de sécurité des données, en mettant à disposition son code source, en rendant publiques ses pratiques en matière de sécurité, en soulignant son indépendance, TikTok veut donc démontrer sa bonne volonté. Il n’en reste pas moins que les garanties offertes par ByteDance ne sont pas absolues et que nos gouvernements pourraient ne pas vouloir s’en contenter. Dans ce cas, les seules solutions seraient soit d'interdire le réseau, soit de contraindre à ce qu’il soit cédé à des intérêts indépendants et privés.

Une voie médiane, qui consisterait à contrôler les agissements de l’entreprise en France, paraît laborieuse à mettre en place. Il en va de la technologie comme de la lutte anti-dopage dans le sport : les concepteurs de "solutions" ont toujours un temps d'avance sur les organes de contrôle... Ainsi, quand bien même TikTok mettrait à notre disposition son code source et ses modèles, cela ne nous offrirait toutefois pas une vision globale sur sa stratégie et sur le sort qu’elle réserve, dans ses bureaux chinois, aux données. Exiger une transparence totale ne pourrait jamais nous offrir de garantie véritable tout en portant atteinte, de manière dommageable, à la liberté d’entreprise, essentielle aux valeurs libérales d’une société démocratique

En quoi l'enjeu de la collecte des données par TikTok diffère-t-il de celui de la collecte des données par Meta ou Twitter ? Les plateformes américaines respectent-elles mieux les intérêts économiques et sécuritaires européens ?

De fait, les exigences européennes sont moindres à l’égard de Meta, Google et Twitter, ce qui est assez ironique étant donné que ces entreprises américaines sont moins transparentes que leur consoeur chinoise. Le modèle économique de ces entreprises, dans l’un et l’autre cas, est le même : elles tirent leurs revenus de la revente de données et de l'exploitation de ces dernières par des annonceurs. Meta et Google ont d’ailleurs été condamnés à plusieurs reprises en Europe pour avoir contrevenu au règlement RGPD. En 2023, Meta a été condamné à une amende record de 1,2 milliard d'euros pour avoir transféré des données personnelles d'utilisateurs européens aux États-Unis et en avoir hébergé un duplicata sur le sol américain (le RGPD interdit uniquement le stockage de données sur le sol chinois ou américain, ce qui n’empêche pas leur exploitation depuis la Chine). Le différentiel de traitement tient certes à l’écart de stratégie entre plateformes américaines et chinoises, les premières désireuses de maîtriser tous les chaînons des données de leurs utilisateurs tandis que les Chinois développent ce type d'algorithme pour surveiller leur population, dans une logique économique de planification : il tient aussi d’un enjeu géopolitique déguisé. Les Américains sont davantage nos partenaires politiques que les Chinois.

Les Européens sont-ils pris en otage entre les États-Unis et la Chine quand ils prétendent agir au nom de leur souveraineté ? Sont-ils en réalité sommés de s’aligner sur la politique décidée outre-Atlantique ?

Les Européens n’ont pas développé de réseaux sociaux propres. Ils sont donc obligés de se tourner vers l’offre existante, c’est-à-dire des plateformes américaines ou chinoises. On peut le déplorer : c’est bien l’Europe, en effet, qui a inventé le principe des réseaux sociaux, mais elle n’a jamais su faire prospérer les plateformes qu’elle avait imaginées. Viadeo, réseau français créé en 2004, était présent en Europe avant Linkedin, Dailymotion est né en même temps que YouTube (2005), Copains d'avant, créé en 2001, a devancé Facebook (2004). D’où nous vient ce retard dans la construction d’un groupe de collecte de données ? Pourquoi cette compétitivité défaillante ? On retrouve là une défaillance importante de l’économie européenne, qui n’est pas parvenue à mettre en place une industrie B2C applicative.

Les Européens n’ont pas développé de réseaux sociaux propres. Ils sont donc obligés de se tourner vers l’offre existante, c’est-à-dire des plateformes américaines ou chinoises

L’Europe semble désormais s’être spécialisée dans le contrôle et les sanctions … Or, le seul cas avéré où un réseau a été interdit s’est trouvé quand un trouble à l'ordre public a pu être démontré. Ce fut le cas en Nouvelle-Calédonie ces dernières semaines, où TikTok a été interrompu pendant la durée de l’état d'urgence. es interdictions s’intègrent aussi à une logique de puissance, pour faire passer des messages aux pays pratiquant l’ingérence et démontrer que le gouvernement français ne laissera pas passer ces tentatives.

Le cabinet de Gabriel Attal a ainsi justifié cette interdiction au motif que la plateforme chinoise servait de "support de diffusion de désinformation sur les réseaux sociaux" et était "alimentée par des pays étrangers, et relayée par les émeutiers", en mettant en cause l'Azerbaïdjan.

Néanmoins, interdire ces réseaux pourrait s’apparenter à des atteintes à la liberté d’entreprise ainsi qu’à la liberté d’expression… L’association La Quadrature du Net a d’ailleurs déposé un référé-liberté le 17 mai contre cette mesure, suivi, après son rejet par le Conseil d’État le 23 mai, d’un recours en excès de pouvoir le 5 juin. Or, en Europe, le principe de la liberté d’expression a toujours primé, comme le montre le Digital Services Act (DSA, 2022) ou "législation sur les services numériques".

Quand Pékin interdit Facebook ou Twitter sur son sol (2019), on appelle cela "censure" : dans quelle mesure peut-on dresser un rapprochement avec la stratégie adoptée par Washington contre TikTok ?

La question est plutôt : comment ne pas faire le rapprochement ? Quel que soit le qualificatif qu’on leur appose, les stratégies sont les mêmes sur le fond mais la différence réside dans les recours légaux dont elles disposent, et dans les projets de société qu’elles défendent. Les réseaux sociaux servent à la fois d'outils de soft power et de renseignement, ce que les gouvernements comprennent bien. Mais là où les régimes libéraux des démocraties, avec leurs lois anti-censure ou favorisant la liberté d'entreprise, limitent l'interdiction des entreprises chinoises en Europe et aux États-Unis, le régime de la République Populaire de Chine facilite l'interdiction des entreprises occidentales en Chine.

Qu’est-ce qu’impliquerait l’interdiction de TikTok au motif de sa détention par une société chinoise pour le marché transnational des médias sociaux ?

Interdire TikTok au nom de sa détention par une société chinoise, dans le contexte transactionnel des réseaux sociaux, aurait des conséquences notables : l'impact économique, tout d’abord, ne serait pas négligeable, car TikTok est un annonceur important dont la disparition s'accompagnerait de pertes d'emploi et d’une diminution de l'activité économique ; de nombreuses TPE et PME pourraient rencontrer des difficultés à trouver une audience, faute des services de ciblage offerts par la plateforme. On estime que TikTok génère 900 millions d'euros de ventes en France et plusieurs milliards de dollars aux États-Unis.

Enfin, il ne faudrait pas minimiser l'impact politique - cela risquerait d'exacerber les rivalités sino-américaines, ni symbolique - le signal renvoyé sur la liberté d’expression en Europe.

On estime que TikTok génère 900 millions d'euros de ventes en France et plusieurs milliards de dollars aux États-Unis.

Dans quelle mesure peut-on considérer que la menace sécuritaire constitue un prétexte pour favoriser des intérêts en réalité économique, géopolitique voire idéologique (TikTok, c’est un certain modèle de société, un certain type de contenus qui sont mis en avant, et c’est en tant qu’application "récréative" que l’application est interdite aux fonctionnaires français ) ?

Sur le plan économique, interdire TikTok ou forcer son rachat par un entrepreneur américain renforcerait l'économie américaine (davantage que cela ne profiterait aux Européens), en confortant la puissance de groupes tels que Meta ou Twitter, ou en favorisant la constitution d’un nouveau mastodonte, dans des logiques de concurrence où l’Europe serait en position de faiblesse.

D'un point de vue géopolitique, cela permettrait aussi aux États-Unis de renforcer leur avantage sur la Chine en matière de collecte de données, manne indispensable pour l'entraînement des algorithmes d'intelligence artificielle.

Enfin, sur le plan idéologique, cela signifierait se couper des possibilités d'une ingérence chinoise, toujours dans ce contexte de rivalité.

Face aux accusations françaises et européennes, quelle est la réponse de TikTok, via notamment son directeur des Affaires publiques en France Éric Garandeau, ancien président du CNC ?

À chacune de ses interventions, Éric Garandeau œuvre à faire ressortir la bonne foi de TikTok et sa volonté à travailler en accord avec les régulations et à se soumettre aux règlements.

Le 8 juin 2023, auditionné par une commission d'enquête au Sénat, Éric Garandeau a d'abord présenté la structure de TikTok France, qui est supervisée par la structure du Royaume-Uni, elle-même sous l'égide de ByteDance Limited, enregistrée aux îles Caïmans : ceci afin de témoigner de la distance qui existe avec la société mère chinoise. Il a également présenté ses entrepôts de données basés en Irlande (comme c'est le cas pour Meta et Twitter) et a souligné le respect de toutes les législations européennes en termes de RGPD.

Il a ensuite exposé les externalités économiques positives générées par TikTok pour les économies européennes : rémunération des influenceurs, des créateurs de contenus et des artistes, possibilité offerte aux PME de rencontrer leur marché et de promouvoir leurs services.

Il a aussi étayé les nombreux travaux entrepris par TikTok, ses engagements à la fois globaux pour la prévention de l'addiction aux réseaux sociaux et à la désinformation, mais aussi ses engagements locaux pour l'aide à la création de contenu dans des zones plus défavorisées.

Éric Garandeau œuvre à faire ressortir la bonne foi de TikTok et sa volonté à travailler en accord avec les régulations et à se soumettre aux règlements.

Dans ce contexte, on imagine aisément quels arguments seraient ceux de TikTok s’il devait répondre en justice à son interdiction : son comportement vertueux, son respect des règlements européens, les risques d’atteinte à la liberté de choix, à la propriété privée et à la liberté d'entreprendre dont se rendrait coupable l’Europe

La légalité de la loi Protecting Americans From Foreign Adversary Controlled Applications Act ("protéger les Américains d’applications contrôlées par des adversaires étrangers") est attaquée par TikTok. Une loi semblable, portée en 2020 par Donald Trump, avait été suspendue au motif qu’elle ne respectait pas la liberté d’expression. La procédure lancée par TikTok aux États-Unis a-t-elle des chances d’aboutir de nouveau ?

En 2020, le Congrès n’avait pas été unanime et avait invalidé cette interdiction au nom de la liberté d'expression. La situation actuelle diffère de celle de 2020 : cette fois-ci, le Sénat et la Chambre des représentants se sont accordés pour interdire TikTok.

TikTok dispose donc désormais de douze mois pour trouver un repreneur, faute de quoi le réseau sera interdit aux États-Unis. Pour l’instant, le milliardaire Frank McCourt a lancé un consortium afin d’être l’éventuel repreneur de TikTok. TikTok pourrait tenter de faire suspendre cette décision devant les tribunaux afin de gagner du temps.

Il semble difficile de prédire avec certitude si cette interdiction a une chance d'aboutir. Tout d'abord, 2024 est une année électorale aux États-Unis, et le contexte politique américain pourrait évoluer. Ensuite, de nombreuses entreprises américaines utilisent TikTok pour atteindre leurs clients ; des activités de lobbying pourraient donc tendre à défendre le réseau. Par ailleurs, alors que l'argumentaire juridique invoque des principes au cœur de la constitution américaine, une menace sur la sécurité nationale semble illusoire. Enfin, l'opinion publique accueille très mal l'idée d'une interdiction, car TikTok compte plus de 150 millions d'utilisateurs aux États-Unis.

Propos recueillis par Hortense Miginiac
Copyright image : Lionel BONAVENTURE / AFP

 

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