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24/04/2013

Projet de loi relatif à l’Enseignement supérieur et à la Recherche : des conséquences préoccupantes

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Projet de loi relatif à l’Enseignement supérieur et à la Recherche : des conséquences préoccupantes
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Long et complexe (35 pages et 69 articles), le projet de loi relatif à l’Enseignement supérieur et à la Recherche qui est soumis au Parlement paraît s’inscrire à contrecourant de l’autonomie des universités.

Quels objectifs pour l’Enseignement supérieur et la Recherche ?

La loi relative aux libertés et responsabilités des universités (LRU) votée en 2007 constituait un réel progrès et créait une dynamique nouvelle en concrétisant le principe d’autonomie des établissements. Elle les dote en effet d’une gouvernance crédible qui leur permet de gérer leur masse salariale et de se regrouper si nécessaire au sein de pôles de recherche et d'enseignement supérieur (PRES). Cinq ans après sa mise en œuvre, une évolution législative est certes nécessaire, tant pour amender la loi LRU que pour engager une deuxième phase dans la « longue marche vers l’autonomie » afin de permettre à nos établissements les plus performants d’aborder la compétition internationale à armes égales et non avec des boulets aux pieds.

Un projet de loi relatif à l’Enseignement supérieur et à la Recherche devrait se fixer comme principaux objectifs :
- de favoriser l’insertion professionnelle des étudiants tant diplômés que décrocheurs ;
- d’améliorer la situation des laboratoires d’excellence et de leurs chercheurs ;
- de favoriser les retombées de la recherche fondamentale sur l’économie ;
- d’entraîner le retour dans nos établissements des membres les plus éminents de notre diaspora scientifique.

Or le projet soumis actuellement au Parlement semble loin de favoriser ces objectifs.

Une vision centralisatrice peu propice à l’autonomie

Dans le projet de loi que s’apprête à examiner le Parlement, la désignation des présidents d’universités est une mesure qui va dans le bon sens. Dorénavant, tous les membres du Conseil d’administration, y compris les personnalités extérieures, participeront à cette désignation. C’était là l’une des insuffisances de la loi LRU.
Malheureusement, les effets de cette décision seront entravés par l’élargissement jusqu’à 36 membres des conseils d’administration : on n’administre pas à 36 ! C’est une assemblée générale.

Deux points forts du projet de loi mettent en œuvre une vision centralisatrice contraire aux mouvements d’autonomie des établissements :

1 – La création des conseils académiques, conçus comme l’équivalent des "sénats académiques" existant dans de nombreuses universités étrangères, pose question.
Le texte fixe dans le détail la composition, le mode de désignation et les prérogatives d’un tel conseil, indépendamment de la taille et des dominantes disciplinaires de l’établissement (scientifique, médicale, lettres et sciences humaines, pluridisciplinaire).
Dans le contexte d’une évolution législative pertinente et intelligente, un seul article eut suffi : "Il peut être créé dans chaque établissement un conseil académique. Les statuts de l’université prévoient la composition, le mode de désignation et les prérogatives de ce conseil".

2 –La coopération et le regroupement des établissements seront la source d’une forte complexité administrative.
En effet, le texte impose sur un territoire donné une coordination de tous les établissements publics d’enseignement supérieur et des organismes de recherche qui relèvent du ministère de l’Enseignement supérieur. L’Etat désigne un seul établissement pour l’organisation de cette coopération territoriale. A noter qu’une dérogation est prévue pour la région Île de France... Le texte fixe dans le détail, la composition des différents conseils de ces nouvelles entités et leur mode de gouvernance. Là encore est-il besoin d’un texte a priori ?

Dans le cadre de leur autonomie, rien n’interdit aujourd’hui à un établissement d’envisager des coopérations avec d’autres établissements, sous des formes diverses pouvant aller jusqu’à des fusions ou vers la création d’entités spécifiques (de droit public ou privé). C’est à ce niveau que le législateur pourrait intervenir a posteriori pour rendre possible des structures, des modes de coopération et de gouvernance qui ne le seraient pas dans le cadre de la législation actuelle. Des évolutions de ce type permettraient un réel progrès et répondrait positivement aux deux questions formulées en préambule.

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