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28/09/2009

Pittsburgh : le long terme refait surface

 François Rachline
Auteur
Directeur général de l'Institut Montaigne de 2009 à 2010

Au-delà des apparences, le G20 de Pittsburgh constitue un point d’inflexion. Certes, bien des sujets restent en suspens : le rôle du dollar dans l’économie mondiale, la réforme des agences de notation, la modification radicale des normes comptables, la réglementation des fonds spéculatifs, l’organisation en un véritable marché des CDS (Credit Default Swaps) qui représentent toujours la moitié des transactions financières mondiales. Sur tous ces points, le G20 ne dit pas grand-chose, en tout cas rien de visible. Pourquoi donc s’agit-il d’un changement ?

C’est une évolution de quatre points de vue :

1/ Dans la lutte qui oppose le court terme au long terme, le second vient de marquer un point à Pittsburgh
2/ Le glissement du G8 au G20 marque un tournant de la gouvernance économique mondiale
3/ L’émergence d’un monde multipolaire est confirmée
4/ L’Europe a présenté un front uni.

1/ La croissance, le développement, l’emploi exigent du temps. La finance de marché vit aujourd’hui dans un présent continu. Tandis que le chef d’entreprise espère de la stabilité pour investir, le trader ne veut que de l’agitation pour jouer sur la variation des cours. Tandis que le marché privilégie par tendance le court terme, l’activité économique a besoin de long terme. Cette contradiction est au cœur des débats sur les bonus, les normes comptables, la spéculation sur fonds propres et autres pratiques financières aujourd’hui sous les feux de la rampe. Les orientations du G20 vont dans le bon sens en limitant dans le temps les bonus, en introduisant des malus, en étalant une large partie des primes sur trois ans. C’est la tendance qui se dessine, certes encore faiblement, mais c’est une évolution sensible par rapport aux dernières décennies. Cette inflexion peut faciliter la prise d’autres mesures qui lutteraient contre l’envahissement du court terme (actionnariat, par exemple). (Voir à cet égard ce qu'écrivait l'Institut Montaigne en mars 2009)

2/ Si, au conseil de sécurité (politique), on en reste encore à l’après seconde guerre mondiale, dans le domaine économique, on a changé de monde. L’augmentation des droits de vote des pays émergents au sein du FMI (+ 5%) n’est pas considérable mais elle est reconnue et enregistrée concrètement.

3/ La reconnaissance du rôle majeur de l’Asie est désormais un fait. La montée en puissance de la Chine est une bonne chose : plus celle-ci sera partie prenante à des opérations multipolaires, plus la menace d’un G2 entre les Etats-Unis et l’empire du Milieu s’éloignera.

4/ Pour la première fois depuis longtemps, l’Europe a parlé d’une voix décidée, grâce notamment au rapprochement sensible entre la France et l’Allemagne (voir à cet égard ce qu'écrivait l'Institut Montaigne en septembre 2009).

Il ne faut cependant pas se leurrer. Le monde reste encore envahi par le court terme. Si l’idée du long terme refait surface, c’est très timidement. Mais c’est tout de même une bonne nouvelle.

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