L’Europe et la 5G : comment passer à la vitesse supérieure ?

L’Institut Montaigne a récemment publié deux notes sur le développement des réseaux 5G. La première, L’Europe et la 5G : passons la cinquième !, rédigée par des associés du cabinet Mazars et supervisée par Gilles Babinet, conseiller numérique de l’Institut Montaigne, présente les enjeux des réseaux du futur et formule des recommandations pour accélérer le développement de la 5G en Europe. Achour Messas, membre du comité exécutif, associé chez Mazars et co-auteur de la note, répond à nos questions sur ce sujet. 

Comment se positionne l'Europe par rapport au reste du monde dans le développement de la 5G ?

L’Union européenne a fixé des objectifs ambitieux en matière de connectivité avec le plan "Europe connectée : objectif 2025". Celui-ci ambitionne entre autres que tous les centres urbains et principaux axes routiers et ferroviaires disposent d’une couverture 5G ininterrompue d’ici 2025. Cependant, les opérateurs se heurtent à un manque d’harmonisation des règlementations en Europe, pourtant nécessaire afin de permettre aux acteurs européens de bénéficier pleinement de synergies au sein de l’Union européenne. Nos compétiteurs extra-européens, notamment la Chine et les Etats-Unis, bénéficient, eux, de marchés domestiques significatifs leur garantissant des conditions économiques très favorables et permettant de développer massivement leurs réseaux 5G et les écosystèmes industriels qui en seront dépendants. Il est nécessaire d’engager une politique européenne volontariste visant à créer, en Europe, les conditions d’un véritable "level playing field" s’inscrivant dans le cadre de la mise en place de règles de concurrence strictes, et garantissant une symétrie entre les conditions de marché en Europe et hors d’Europe.

La note de l'Institut Montaigne encourage la création d'un écosystème de la 5G afin de favoriser l'expérimentation. Pourquoi est-ce important ?

La création d’un écosystème 5G est absolument nécessaire pour permettre un développement rapide des réseaux 5G en soutenant les investissements des opérateurs. Alors que les acteurs européens sont pris en étau entre des équipementiers extra-européens qui disposent de moyens R&D colossaux grâce à un marché domestique acquis, et des opérateurs d’infrastructures cloud majoritairement américains, qui disposent d’une avance difficile à rattraper, les usages qui demain révolutionneront les grandes verticales restent à inventer. C’est une course pour le leadership mondial dans cette nouvelle économie numérique qui se joue. Pour la gagner, nous devons offrir le plus vite possible à nos entreprises innovantes un terrain d’expérimentation et de développement avec la 5G.

Quelle doit être la stratégie du gouvernement pour assurer le développement d'un écosystème 5G fort ?

Pour favoriser le développement de cet écosystème 5G fort, le gouvernement doit absolument encourager le développement des réseaux. Le gouvernement dispose à court terme d’un levier d’action extrêmement puissant à travers les futures attributions des autorisations d’utilisation de fréquences dites "5G". Nous avons pu constater lors du déploiement des réseaux de précédentes générations qu’une politique visant à maximiser les revenus à court terme, avec des montants d’enchères très élevés, pouvait ralentir le développement des réseaux domestiques. À contrario, la décision récente prise dans le cadre de la couverture mobile des territoires (le New Deal Mobile), constitue une première, en choisissant de favoriser un développement rapide de la connectivité de l’ensemble du territoire.