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17/07/2009

L’échec du modèle français d’enseignement supérieur

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 Institut Montaigne
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Cette année plus de 86 % des candidats ont été reçus au baccalauréat. Un record. Cette progression est, de l’aveu général, uniquement due à l’introduction d’une session de rattrapage au baccalauréat professionnel. Que penser alors de ces chiffres et plus généralement de ce sésame pour l’enseignement supérieur, obtenu par deux tiers des membres de chaque génération (parmi lesquels la moitié décroche un bac général, les seuls qui soient vraiment comparables à l’examen d’origine) ? Pas beaucoup de bien si l’on en croit la banque mondiale et son rapport passant au crible l’essentiel des systèmes d’enseignement supérieur mondiaux.

Dans ce rapport, consultable en français, l’organisation de Washington détaille les facteurs qui font la différence dans la compétition mondiale pour la formation des élites. Elle s’appuie notamment sur divers classements internationaux, qui mettent systématiquement les universités françaises en queue de peloton. Elle pointe du doigt un ensemble de raisons expliquant cet échec dont une est particulièrement taboue en France : l’absence de sélection à l’entrée des universités. Ce "dogme" français est pourtant qualifié de raison "évidente" de la mauvaise santé de nos facultés. Le faible taux de réussite en licence en atteste : seuls 64 % des inscrits à l’université en obtiennent une, très souvent après avoir redoublé. Ce taux médiocre s’explique notamment par la faiblesse du système d’orientation mais aussi par le fait que les places sont limitées dans les formations supérieures courtes (IUT, BTS…) et virtuellement illimitées dans les filières "généralistes". Quelle logique y a-t-il à limiter les formations courtes, professionnalisantes, et à laisser des bacheliers professionnels s’inscrire en licence d’anthropologie?

Deuxième point fondamental souligné par l’étude : la réussite des université est très reliée à leur budget, notamment pour ce qui est de la performance de la recherche scientifique. Or les dépenses par étudiant sont aux Etats-Unis deux fois supérieures à ce qu’elles sont en France. L’institut Montaigne a publié en octobre 2008 un document proposant des moyens innovants de combler ce retard.

Troisième problème majeur affectant la recherche en France : la dispersion des ressources humaines et financières, entre le CNRS et les universités d’une part, entre les grandes écoles et le reste de l’enseignement supérieur d’autre part. Les meilleurs étudiants français choisissent très majoritairement les grandes écoles, infiniment plus "riches" et "performantes" que les universités. Ils se trouvent par là même écartés des carrières scientifiques, les écoles formant très peu de doctorants.

Enfin le rapport souligne le caractère primordial des "éléments d’autonomie" pour le succès des universités, en termes scientifiques comme en termes de professionnalisation. Ici aussi la France est très en retard. Dès 2001 l’Institut Montaigne formulait des recommandations précises pour l’autonomisation des universités françaises. La loi LRU, votée en août 2007, introduisait bien des possibilités allant dans ce sens, pour les établissements volontaires. Deux ans plus tard, seules 18 universités ont saisi cette opportunité. Plus inquiétant encore : l’application du texte ne les satisfait pas du tout (consulter à ce sujet le courrier adressé par la Conférence des Présidents d’Université à Bernard Belloc, conseiller du Président de la République). Pour résumer, les ressources financières de ces universités ont baissé et la tutelle que continue d’exercer sur eux le ministère s’est plutôt renforcée, les contrôles s’opérant désormais a priori. Ainsi les recommandations formulées par l’Institut il y a plus de six ans sont plus que jamais d’actualité.

L’enjeu est d’importance. Il en va de la vitalité de notre recherche, de la compétitivité de notre économie, de la santé de notre marché de l’emploi mais aussi de la diversité de l’origine sociale de nos dirigeants, facteur que l’on ne saurait négliger au moment où se dessine un monde infiniment plus ouvert et changeant que celui d’hier.

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