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01/03/2016

La perte d’influence de la France à Bruxelles est-elle inéluctable ?

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La perte d’influence de la France à Bruxelles est-elle inéluctable ?
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Mai 2014. Elections européennes. A l'approche du scrutin et une fois son résultat connu, l'Institut Montaigne, comme d'autres voix dans le débat public, s'inquiétait de la place de la France dans les futurs travaux du nouveau Parlement européen comme de la Commission Juncker. Le rapport que deux députés viennent d'y consacrer fait le constat du déclassement de la France dans les institutions européennes.

Le jeudi 4 février 2016, les députés Christophe Caresche et Pierre Lequiller ont présenté le rapport d’information qu’ils ont consacré à l’influence française dans l’Union européenne. Elargissements successifs à l’Est, difficultés du pays à moderniser son économie, crédibilité atteinte par le non-respect des engagements budgétaires : tels sont les ressorts de l’affaiblissement de la voix de la France à Bruxelles.

L’usage moins fréquent du français dans les textes de la Commission illustre cet affaiblissement : de 16,5 % en 2005, ils ne sont plus que 5 % à être rédigés en français aujourd’hui.

  • Les chiffres de la présence française à Bruxelles
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Le rapport Caresche - Lequiller, qui détaille les chiffres de la présence française dans les institutions européennes, montre que les fonctionnaires européens français sont plutôt nombreux à la Commission, au Parlement et à la Cour de justice. Cependant, la présence française fait défaut dans certaines directions générales majeures de la Commission : budget, commerce, agriculture, pêche.

Mais les fonctionnaires européens s’engageant pour le projet européen et non pour des intérêts nationaux, leur nombre ne traduit pas l’influence d’un pays au sein des organes européens. 

  • Au Parlement européen
En revanche, au sein de l’assemblée élue qu’est le Parlement, la qualité des représentants de chaque pays et leur adhésion au projet européen sont déterminantes pour le poids que pèse chaque Etat membre.

Et la France y est aujourd’hui affaiblie.

Comme le démontrait une enquête de la Fondation Robert Schuman conduite en 2014, l’implication des eurodéputés français est insuffisante : 18 % démissionnent en cours de mandat pour une autre fonction (contre 4 % pour les Allemands et 6 % pour les Britanniques) et 40 % cumulent leur mandat européen avec un mandat national (contre 4 % pour les Britanniques). Deux tiers des Français désapprouvent cette tendance au cumul selon un sondage CSA pour l’Institut Montaigne. Elle induit à la fois un absentéisme chronique dans les travaux en commission et un turn-over bien plus prononcé que chez nos voisins.

Le scrutin de 2014 a confirmé ces tendances, plaçant dans l’hémicycle européen, parmi les Français, une majorité d’élus disposant d’un capital politique national moindre, marginalisées par leur parti ou revendiquant un inversement du processus d’intégration. Ces profils réduisent d’autant leur capacité d’influence, l’utilité de leur contribution aux débats et la reconnaissance de leurs pairs, cette dernière étant indispensable pour accéder aux fonctions stratégiques de rapporteur, de shadow rapporteur et de président de commission.

  • Comment améliorer le travail de nos parlementaires européens
Améliorer la qualité de la représentation française dans les institutions européennes est une exigence citoyenne. Il est ainsi légitime de demander aux eurodéputés français :
- de consacrer tout leur temps à leur mission de législateur européen ;
- de s'engager à ne pas se présenter à un scrutin national pendant la durée de leur mandat ; et aux partis qui les ont soutenus de ne pas les investir pour des élections nationales dans le même temps.

Il pourrait même être envisagé de former le personnel politique français dans son ensemble aux problématiques européennes par un passage obligé à Bruxelles au cours de leur carrière. 

Mettre en pratique ces actions constituerait un premier pas vers une adhésion retrouvée de nos concitoyens à l'Europe. A l'heure où le projet européen est soumis à des crises sévères, la qualité et l'engagement des élus qui nous représentent est un enjeu capital. Il faut qu’ils n’aient d’autre ambition que de rendre à nouveau audible la voix de l'Europe.

Pour aller plus loin

  • Le sondage de l’Institut Montaigne réalisé par l’Institut CSA le 25 mai 2014

Par Ingrid Lanoë pour l'Institut Montaigne

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