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29/11/2018

Egalité femmes-hommes : ce n’est pas qu’une question de salaire

Entretien avec Chiara Corazza

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Egalité femmes-hommes : ce n’est pas qu’une question de salaire
 Chiara Corazza
Directrice générale du Women’s Forum for the Economy and Society

Selon le Global Gender Gap report 2017, la France se place 11ème sur 144 pays en terme de parité homme-femme. Parmi les pays du G20, c’est le pays ayant le plus progressé ces dernières années, suivi de l’Allemagne et de la Grande Bretagne. Bien que ces données soient encourageantes, les inégalités persistent. Comment les éradiquer ? Chiara Corazza, directrice générale du Women’s Forum for the Economy and Society dont le Global Meeting a eu lieu du 14 au 16 novembre dernier à Paris, nous apporte un éclairage.

Le 22 novembre dernier, le gouvernement a présenté un "index de l’égalité femmes-hommes" en vue de mettre fin aux inégalités de salaires d’ici 2022. En France, les femmes sont en moyenne payées 9 % de moins que les hommes à poste et âge égaux, tandis que l’écart atteint 25 % pour tous postes confondus. Qu’est-ce qui explique qu’une si grande inégalité existe encore en France en 2018 ? Jugez-vous cette nouvelle mesure suffisante ?

Je tiens tout d’abord à féliciter l’excellente initiative prise par Muriel Pénicaud pour réduire les écarts de salaire entre hommes et femmes. La méthode qu’elle propose a pour moi le triple mérite d’être simple, pragmatique et transparente… tout en étant assortie d’une mesure financière incitative !

Cet index est composé de cinq critères objectifs, réduits à quatre pour les plus petites entreprises (de moins de 250 salariés), calculés automatiquement à partir du logiciel de paie. L’index sera appliqué dès mars 2019 ou en 2020 selon la taille de l’entreprise concernée. Il correspond complètement à l’esprit du Women’s Forum, partisan d’une émulation positive et non critique entre entreprises, et valorisera par ailleurs les entreprises les plus exemplaires. Il illustrera leurs meilleures pratiques par des exemples concrets. Enfin, il incitera les autres à en faire autant, ne serait-ce que pour l’attractivité de leur marque employeur.

Lors de la publication en 2011 de la note Hautes fonctionnaires, l’État doit montrer l'exemple de l’Institut Montaigne, la part des femmes dans les emplois de direction de la fonction publique ne dépassait pas les 16 %. En 2016, elle était de 26 %. Qu’est-ce qui peut être fait pour accélérer la féminisation des instances dirigeantes au sein des pouvoirs publics ?

Le Président Macron a déclaré que l’égalité entre les hommes et les femmes était l’une des grandes causes de son quinquennat. La composition paritaire du gouvernement, avec la nomination de femmes à des ministères stratégiques tels que les Armées, l’Emploi ou la Justice est la première illustration concrète de cette volonté.

La vraie égalité entre hommes et femmes n’est pas seulement une question d’égalité de salaire : c’est aussi la possibilité de faire entendre la voix des femmes, leur vision, de démontrer leur valeur ajoutée dans des thématiques pas seulement liées au genre.

Je note également qu’à Bercy, des postes clefs sont occupés par des femmes. Odile Renaud-Basso est directrice du Trésor, et Laure Bédier directrice des affaires juridiques. Je me félicite également de la nomination d’ambassadrices de France notamment en Russie, au Canada et au Mexique.

Je peux enfin témoigner, en tant qu’administratrice de la RATP, que cette déclaration se traduit bien dans les faits. En effet, Elisabeth Borne, appelée au gouvernement comme Ministre des Transports, a été remplacée par une autre femme, Catherine Guillouard, choisie parmi les 32 autres candidatures.

Le Women’s Forum, particulièrement sensible à la nécessaire exemplarité du secteur public, en a fait le premier point de son Manifesto publié l’été dernier à l’occasion du dernier G7 de Toronto. Pour accélérer la féminisation des instances dirigeantes des pouvoirs publics, il faut donc donner l’exemple à tous les niveaux, en commençant par les plus hauts d’entre eux.

En tant qu’observatrice des différentes situations internationales, quelles sont selon vous les bonnes pratiques dont la France devrait s’inspirer afin de réduire les inégalités de genre ?

En matière de droit du travail et de qualité de vie au travail, la France est plutôt, quoiqu’on en dise, bien avancée. Ces dernières années ont ainsi vu la mise en place du congé paternité, du congé parental, du télétravail parmi d’autres mesures encourageant la flexibilité, ainsi que d’un certain nombre de dispositifs permettant l’évolution professionnelle de chacun. A cela s’ajoute le lancement de ce nouvel index, vecteur de progrès, qui va propulser la France parmi les Etats exemplaires pour l’égalité salariale entre les hommes et les femmes.
 
Citons aussi les habituels, Danemark et Suède, bien connus de tous pour leur politique de parentalité. Le rapport mondial sur les salaires 2018/19 de l’Organisation Internationale du travail sur les "causes des écarts salariaux entre hommes et femmes" est sorti en début de semaine. Il y est observé que, parmi les pays à revenu élevé, une fois de plus, sans surprise, c’est en Suède que l’inégalité salariale est la plus faible et au Chili qu’elle est la plus forte… Aux Philippines, les femmes gagnent en moyenne 10,3 % de plus que les hommes. Pour trouver des solutions adaptées, il ne suffit pas de transposer les bonnes pratiques existantes. Il est à mon avis vital de bien tenir compte des particularités culturelles de chaque pays.

Egalité femmes-hommes : ce n’est pas qu’une question de salaire - classement

L’ambition du Women’s Forum est de contribuer à construire un monde plus inclusif en associant hommes et femmes. Promouvoir les femmes dans tous les secteurs d’activités et rechercher plus d’égalité dans les organisations n’est pas seulement un devoir moral, ni une action politiquement correcte, c’est également une impérieuse nécessité économique. Les femmes représentent plus de 50 % de la population mondiale et contribuent seulement à 37 % du PIB.

Les femmes représentent plus de 50 % de la population mondiale et contribuent seulement à 37 % du PIB.

Avec plus de parité d’ici à 2025 pourraient être créés 240 millions d’emplois nouveaux et 28 trillions de dollars injectés dans l’économie mondiale.

La vraie égalité entre hommes et femmes n’est pas seulement une question d’égalité de salaire : c’est aussi la possibilité de faire entendre la voix des femmes, leur vision, de démontrer leur valeur ajoutée dans des thématiques pas seulement liées au genre, mais qui concernent l’humanité toute entière grâce au lancement de groupes de travail consacrés à l’intelligence artificielle, aux STEM, au climat, à l’accès à la santé et à la féminisation des chaînes d’approvisionnement.

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