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Groupe de travail

Président

  • Yann Leriche, CEO, Getlink

Le comité de pilotage

  • Judith Hartmann, directrice générale adjointe et directrice financière, en charge des Achats Groupe et de la Responsabilité Sociétale de l’entreprise, ENGIE
  • Sylvain Lambert, associé, département Développement Durable, PwC France Maghreb
  • Géraldine Périchon, directrice administrative et financière, Getlink
  • Laure Philippon, sustainable finance and CSR transformation director, ENGIE
  • Gilles Vermot-Desroches, Corporate citizenship Senior Vice-President, Schneider Electric

Le conseil scientifique

  • Eric Chaney, conseiller économique, Institut Montaigne
  • Ulrich Hege, professeur, Toulouse School of Economics

L’équipe projet

  • Carla Bonnet, consultante département Développement Durable, PwC France Maghreb
  • Sophie Conrad, responsable du pôle Politiques publiques, Institut Montaigne
  • Marin Gillot, chargé d’études, Institut Montaigne
  • Élise Lannaud, assistante chargée d’études, Institut Montaigne
  • Olivier Müller, directeur département Développement Durable, PwC France Maghreb
  • Charles Nicolas, Decade for Change
Personnes auditionnées

Les personnes ayant contribué dans le cadre de la consultation menée, d’auditions ou des workshop

  • Diane Abrahams, directrice de la Stratégie, des Partenariats Transverses et de l’Innovation, Groupe La Poste
  • Etienne Anglès d'Auriac, vice-president Climate Strategy, TotalEnergies
  • Pierre Auberger, directeur de la communication, Groupe Bouygues
  • Muriel Barnéoud, directrice de l'engagement sociétal, La Poste
  • Fabrice Bonnifet, directeur Développement Durable et Qualité, Sécurité, Environnement, Groupe Bouygues
  • Claire Borsenberger, économiste, direction de la Régulation, de la Concurrence et des Relations institutionnelles, Groupe La Poste
  • Estelle ​​Brachlianoff, directrice générale adjointe en charge des Opérations, Veolia
  • Sandrine Brochon, directrice analyses stratégiques Banque-Assurance, Silver Economy Santé & Transition Énergétique, Groupe La Poste
  • Eric Campos, directeur de la RSE, Crédit Agricole SA et délégué général, Fondation Grameen Crédit Agricole
  • Alix Chosson, senior ESG analyst, Candriam
  • Frédéric Coirier, président directeur général, Cheminées Poujoulat
  • Vincent Compiègne, head of ESG Investments & Research, deputy global head, Candriam
  • Thierry Déau, founder et CEO, Meridiam
  • Patrick de Decker, senior climate advisor, TotalEnergies
  • Ulrike Decoene, group chief Communications, Brand and Sustainability officer, AXA
  • François Delabre, responsable Études et relations Think Tank, direction des Affaires Institutionnelles et Internationales, Air France-KLM
  • Guillaume Delacroix, senior vice-president Performance Minerals EMEA, Imerys
  • Walter Delage, responsable RSE, Groupe Iliad
  • Christine Deneriaz, group Environment vice president, Imerys
  • Arnaud Doré, South Europe managing director, EcoAct
  • Vincent Ducros, directeur Environnement, Getlink  
  • Christian Gollier, économiste et directeur général, Toulouse School of Economics
  • Alain Grandjean, associé fondateur, Carbone 4, et animateur du blog Chroniques de l’Anthropocène
  • Jérôme Grivet, directeur général adjoint, en charge des finances, Groupe Crédit Agricole  
  • Félix Héon, directeur du Développement Durable, Antin Infrastructure Partners
  • Loic Jacqueson, directeur RSE, Getlink
  • Ingrid Jaugey-Ndiaye, directrice RSE, Fives
  • Deborah Kuszner, sustainability analyst and MI manager, HSBC
  • Thomas-Olivier Léautier, chef économiste, EDF
  • Anne-Sophie Le Lay, secrétaire générale, Groupe Air France-KLM
  • Florent Menegaux, Président du Groupe, Michelin
  • Eric Nottey, chef de projet stratégie, Veolia
  • Christian de Perthuis, fondateur, Chaire Économie du Climat Paris-Dauphine
  • Xavier Ploquin, senior associate, Meridiam
  • Pierre-Yves Pouliquen, directeur du Développement Durable, Suez
  • Laetitia Puyfaucher, présidente et fondatrice, WordAppeal
  • Alain Quinet, directeur général exécutif Stratégie et Affaires Corporate, SNCF Réseau
  • Dominique Radal, Vice-President Sustainable Performance & Transformation, Michelin
  • Nicolas Ragache, chief economist, Association française des entreprises privées (Afep)
  • Mar Reguant, associate professor in Economics, Northwestern University et research fellow, Barcelona School of Economics
  • Céline Soubranne Weber, chief Corporate Responsibility officer, Axa Group
  • François Soulmagnon, directeur général, Association française des entreprises privées (Afep)
  • Jean-Christophe Taret, directeur stratégie, Veolia
  • Maud Thuaudet, vice-présidente Stratégie, Saint-Gobain

Le sujet du prix du carbone est aujourd’hui omniprésent : taxes, marchés, réglementations... Si les émissions de gaz à effet de serre ont été réduites de 2,4 % en 2019, la décarbonation des activités humaines s’effectue encore à un rythme largement insuffisant. Pour respecter les engagements de l’Accord de Paris, il aurait ainsi fallu atteindre un rythme de -11,7 % par an. Sur ce sujet, et même si des efforts conséquents restent à faire, l’Union européenne ouvre largement la voie, à travers la mise en place de son système communautaire d’échange de quotas d’émission, le plus étendu au monde.

Au niveau individuel, et face à la nouvelle donne réglementaire et climatique, les entreprises sont de plus en plus nombreuses à se doter de mécanismes de tarification interne du carbone, avec pour objectif l’atteinte de leurs objectifs climatiques et la réduction de leur exposition au risque carbone. En 2021, plus de 2 000 entreprises dans le monde utilisaient ou comptaient mettre en place, sur un horizon de deux ans, un prix interne du carbone, soit 80 % de plus qu’en 2015. Cependant, même les entreprises qui ont adopté ce dispositif à date continuent de faire face à des questions structurantes, notamment sur ses perspectives d’évolution et sur son pilotage.

Sur la base d’une série d’entretiens réalisés auprès d’entreprises françaises et d’un questionnaire soumis à une vingtaine d’entreprises, l’Institut Montaigne offre un aperçu de la diffusion de cette pratique en France. En outre, le rapport formule cinq recommandations, qui visent à aider les entreprises désireuses de se doter de cet outil à identifier et appliquer un prix interne du carbone le plus efficace possible pour atteindre les objectifs climatiques fixés par l’Accord de Paris.

Ce travail s’inscrit dans la continuité de la note publiée en juin 2020 par l’Institut Montaigne, Dividende carbone : une carte à jouer pour l’Europe, qui posait déjà les bases des actions à mener pour atteindre la neutralité carbone à horizon 2050.

Qu’est-ce que le prix interne du carbone ?

Une boîte à outils de décarbonation

Sur le marché externe, il existe à ce jour deux leviers réglementaires de décarbonation des activités économiques :

  • la taxe carbone, soit un impôt direct et proportionnel aux quantités de gaz à effet de serre émises lors de la production économique ;
  • le système de quotas d’émission, qui fixe une limite globale d’émission de gaz à effet de serre et encadre l’échange de droits d’émission, tel qu’utilisé à l'échelon européen.

La décarbonation est pourtant aussi un objet de travail interne aux entreprises. Parmi les outils dont elles disposent, les mécanismes de tarification interne du carbone sont ceux qui se déploient le plus rapidement. Ainsi, ce mécanisme est employé par près de la moitié des 500 plus grandes entreprises en termes de capitalisation boursière. Initialement l’apanage de secteurs comme l’électricité ou les combustibles fossiles, cet outil s’étend aujourd’hui à de nombreux secteurs, et notamment celui des services financiers.

Les objectifs du prix interne du carbone

L’implémentation d’un prix interne du carbone répond à deux besoins complémentaires :

  • l’anticipation de l’évolution des taxes ou du prix du marché, et la gestion du risque climatique ;
  • la contribution à l’atteinte des objectifs de décarbonation de l’entreprise.

Raison la plus souvent citée, l’anticipation d’une trajectoire de croissance soutenue du prix du carbone sur le marché externe conçoit l’utilisation de la tarification interne du carbone comme un outil de management du risque. L’objectif pour l’entreprise est alors de s’assurer de la rentabilité et de la pérennité de ses activités, notamment en évitant l’investissement dans des projets carbonés qui pourraient devenir plus coûteux dans le futur.

La deuxième motivation, qui fait du prix interne du carbone un outil d’atteinte des objectifs de décarbonation de l’entreprise, est souvent liée à la responsabilité sociale et environnementale de celle-ci. À ce titre, elle est étroitement liée à la prise en compte et à la réduction des externalités négatives créées par l’entreprise en matière environnementale.

En vue de répondre à ces besoins, le prix interne du carbone répond à plusieurs objectifs :

  • accélérer les investissements bas-carbone ;
  • faciliter l’amélioration de l'efficacité énergétique de l’entreprise ;
  • encourager le changement de comportement en interne à travers une pédagogie de la transition vers des solutions bas-carbone ;
  • renforcer la capacité prospective pour l’évaluation des risques et l’identification d’opportunités de développement d’activités bas-carbone ;
  • accéder aux financements bas-carbone.

Un outil flexible

Le prix interne du carbone est un outil flexible : il est entièrement basé sur le volontariat et peut prendre plusieurs formes selon les objectifs visés par l’entreprise. On distingue trois formes principales de prix interne du carbone :

  • le prix directeur ou shadow price, qui attribue, en interne, une valeur économique aux décisions d’investissement. La valeur est alors théorique, et n’induit pas de flux financiers ;
  • la taxe carbone interne, qui cherche à lier coûts opérationnels et émissions de gaz à effet de serre. Le plus souvent, les flux financiers engendrés restent notionnels ;
  • le prix implicite ou coût réel de la décarbonation, calculé a posteriori, qui permet aux entreprises d’évaluer l'efficacité et la cohérence de leurs investissements.

 

Prix interne du carbone : une solution qui tombe à PIC pour les entreprises ?Prix interne du carbone : une solution qui tombe à PIC pour les entreprises ?

Quel prix interne du carbone ?

Le prix interne du carbone n’est pas une fin en soi, mais bien un moyen. Pour l’entreprise, il constitue un instrument d’amélioration de prise en compte des enjeux climatiques, mais il ne saurait suffire à assurer la transition d’une organisation vers un modèle neutre en carbone.

En outre, si l’utilisation d'un tel outil se développe fortement depuis quelques années, il existe encore autant de prix internes du carbone que d’entreprises. Et pour cause, il peut être compliqué pour l’entreprise de déterminer les références sur lesquelles s’appuyer dans la construction du prix, l’étendue de l’impact que cet outil peut avoir sur l’entreprise, la façon idoine de le piloter ou encore les perspectives d’évolution de celui-ci. Des lignes de force émergent, néanmoins, sur l’approche à adopter face aux trois dimensions fondamentales du prix interne du carbone : sa hauteur (le prix), sa largeur (le périmètre d’application) et sa profondeur (l’influence sur la prise de décision).

Trois dimensions fondamentales

Le niveau de prix ("hauteur")

Le caractère par essence uniforme et mondial de l’externalité carbone devrait induire l’adoption d’un prix unique pour favoriser une décarbonation efficace au niveau international. Pourtant, la réalité est aujourd’hui toute autre. Il existe une forte hétérogénéité des prix, entre les pays - avec un prix du carbone dix fois plus élevé en Europe qu’en Chine - et entre les entreprises - avec une valeur de la tonne de CO2 qui fluctue de quelques dollars à plus de 900 dollars.

Si certaines raisons objectives favorisent l’ajustement du coût du carbone à la réalité de chaque entreprise, la disparité des prix n’en constitue pas moins une limite à l’efficacité de l’activité climatique recherchée. Cette disparité peut également nuire à la compétitivité de l’entreprise : un prix interne sous-estimé par rapport au prix réel du carbone peut nuire à la rentabilité financière d’investissements qui n’auraient pas correctement évalué les coûts futurs liés au carbone, tandis qu’un prix interne surestimé peut nuire à la rentabilité de l’entreprise à court terme.

Le périmètre des émissions couvertes ("largeur")

Le périmètre des émissions couvertes par le prix interne du carbone est déterminé par l’inclusion ou non des émissions indirectes (scopes 2 et 3) de l’entreprise, en complément des émissions directes (scope 1). Selon le CDP, le prix interne du carbone ne couvre que les émissions directes de l’entreprise (scope 1) dans 90 % des cas. Pourtant, il est désormais admis que, pour se prémunir des risques liés au climat comme pour contribuer à la réduction des émissions mondiales de gaz à effet de serre, l’entreprise doit prendre en compte ses émissions indirectes, tout au long de sa chaîne de valeur, des fournisseurs aux clients.

Décider de l’intégration ou non du scope 3 dans le dispositif de tarification interne du carbone - en évitant les double comptes - revient d’abord à considérer l’impact que cette intégration aurait sur son environnement entendu au sens large, c’est-à-dire sa chaîne de valeur et son segment de marché. Il n’est pourtant pas sans danger : les effets de substitution (ou fuites de carbone) peuvent déplacer les émissions dans la chaîne de valeur au lieu de les réduire, voire les augmenter. C’est à cette aune que la pertinence de l’extension du prix interne du carbone au scope 3 doit d’abord être évaluée.

L’influence du prix interne sur la prise de décision ("profondeur")

S’il s’agit d’un outil développé de façon volontaire par l’entreprise, l’efficacité du prix interne du carbone, dès lors qu’il est mis en place, n’en reste pas moins importante. Or, pour ce faire, il est important qu’il ne reste pas l’apanage de la direction RSE de l’entreprise à qui il incombe souvent de gérer les activités de décarbonation de l’entreprise. En effet, il ne se peut alors se concevoir comme un élément structurant de la prise de décision.

Au contraire, pour influencer durablement les décisions au niveau de l’entreprise, le prix interne du carbone devra associer toutes les directions compétentes de l’entreprise, notamment la direction financière. Afin de rendre le prix interne du carbone outil de transformation et de décarbonation de l’entreprise, il conviendra de le sortir de sa boîte noire, au-delà même des directions. L’expertise doit se développer au sein des métiers et dans les différentes géographies de l’entreprise. Favoriser la prise en compte du facteur carbone à chaque étage décisionnel d’une entreprise et considérer le coût du carbone dans le pilotage des activités de l’entreprise devient indispensable. Si cette intégration totale du prix interne du carbone en tant qu’outil ne se constate qu’encore rarement, il est notable qu’elle existe dans certains cas. Pourtant, cela ne se traduit pas encore par un consensus sur la pratique, ce qui laisse les entreprises face à des défis structurants pour appréhender au mieux ce mécanisme.

Cinq recommandations pour un prix interne du carbone efficace

L’objectif de ce travail n’est pas de rajouter un cadre normatif aux entreprises, mais plutôt de dépeindre un état des lieux de l’utilisation du prix interne du carbone en entreprise, et de faciliter la mise en place de cet outil par les entreprises désireuses d’accélérer leur travail de décarbonation. À ce titre, nous dressons une série de cinq recommandations actionnables par les entreprises en quête d’une tarification interne du carbone efficiente.

 

Pour maximiser l’efficacité du prix interne du carbone, l’entreprise devra d’abord retenir le prix de marché pour fixer sa trajectoire, plutôt que la valeur tutélaire du carbone. De la même manière, face à la fonte du budget carbone mondial, il conviendra pour l’entreprise de définir des trajectoires croissantes du prix interne, à différents horizons de temps. Ces trajectoires pourront être régulièrement révisées, dans une optique d’actualisation de leur anticipation de l’évolution des prix de marché et des coûts d’abattement.

La décision d’intégrer les émissions liées au scope 3 dans le dispositif de tarification interne du carbone doit d’abord trouver son sens dans sa capacité à aligner les décisions des clients et des fournisseurs de l’entreprise avec l’objectif global de réduction de l’empreinte carbone planétaire, et non uniquement de réduction de l’empreinte des seules activités de l’entreprise. L’entreprise qui améliorerait son propre bilan carbone en constatant que cette dynamique a entraîné, au total, un effet inverse se retrouverait dans une situation paradoxale.

Une première approche pourrait consister pour l’entreprise à expliquer, aux acteurs financiers en premier lieu, la composition de la panoplie d’outils qu’elle mobilise pour piloter la décarbonation de ses activités, et la place relative qu’occupe le prix du carbone dans cet ensemble.

La Commission européenne pourrait accélérer la convergence des prix, pas nécessairement autour d’un prix unique, mais en proposant une référence autour d’un corridor suivant une trajectoire de prix croissante, avec un plancher et un plafond, révisé régulièrement et compatible avec la réalité du marché EU-ETS. La création d’une agence ou d’une instance indépendante dédiée pourrait renforcer et crédibiliser ce processus.

Dans l’attente d’un tel dispositif, et en se gardant bien de toute nouvelle norme et contrainte réglementaire de reporting supplémentaire, les acteurs économiques pourraient déjà engager ensemble, dans un esprit de "coopétition" très légitime eu égard à la nature des enjeux concernés, une dynamique de partage des bonnes pratiques. Celle-ci pourrait se concentrer sur les priorités à fixer, les arbitrages à opérer ou les référentiels sur lesquels se fonder pour déterminer un montant et une trajectoire pour le prix interne du carbone. Le partage d’hypothèses et de données entre acteurs accroîtrait la finesse de l’information disponible. Des réflexions de place sur un corridor de prix et sur la pente d’évolution des prix pourraient également voir le jour.

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Rapport
(104 pages)
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