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12/07/2012

Les universités, enjeu de notre compétitivité

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Les universités, enjeu de notre compétitivité
 Laurent Bigorgne
Auteur
Ancien directeur



Dans une tribune parue dans le Figaro du 07/08 juillet 2012, Laurent Bigorgne, directeur de l'Institut Montaigne, fait valoir les mérites de l'autonomie accordée ces dernières années aux universités.

La crise dans laquelle nous vivons depuis l’automne 2008 consacre notre préférence pour le court terme. L’intérêt de l’opinion porte prioritairement sur "l’ici et le maintenant", sur les mesures immédiates qui pourraient améliorer ou dégrader notre compétitivité, ainsi que la crédibilité de nos finances publiques. L’enseignement supérieur et la recherche, objets de nombreuses attentions depuis 2007, échappent à cette règle ou plutôt, devraient absolument y échapper. Filière d’intérêt stratégique, ce secteur doit inscrire son effort de développement dans le temps long et échapper aux soubresauts du combat politique comme des schémas partisans.

Le gouvernement a annoncé une nouvelle loi d’orientation de l’enseignement supérieur et de la recherche pour le début de l’année 2013. La ministre garantit néanmoins que l’autonomie des universités ne sera "absolument pas" remise en question. Elle est devenue un point de convergence entre droite et gauche, il faut s’en réjouir. Tous ceux qui souhaitent que nos universités tiennent leur rang dans la compétition internationale seront attentifs à ce que les progrès réalisés soient préservés.

D’abord, l’émergence d’un conseil d’administration organisé autour du président d’université, gouvernable et à même de fixer un cap stratégique, équilibré à l’avenir par un sénat académique.

Ensuite, la diffusion sans aucune concession d’une culture de l’évaluation et de la transparence, seule à même de justifier un investissement croissant de la puissance publique et de préparer demain – débat difficile – une participation des familles au financement des universités à travers un système mesuré, progressif et redistributif. Des voix, à gauche, à droite, au sein de la Conférence des Présidents d’Université… plaident pour l’ouverture d’un tel débat.

Enfin, une acceptation intégrale de la logique de l’autonomie par l’ensemble des acteurs du système, à commencer par l’administration centrale du ministère. Cette dernière doit-elle encore valider ex ante les nouvelles formations créées par les universités ? Combien de temps d’ailleurs aurons-nous besoin d’un ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche ou du Conseil National des Universités (CNU) ? A moyen terme, l’Etat doit jouer un rôle de stratège et faire confiance aux universités devenues autonomes. Il doit renouveler en profondeur sa palette d’intervention à travers les agences qu’il a commencé à mettre en place (AERES et ANR).

Tout va très vite autour de nous et de nombreux pays en Europe et ailleurs mettent en place des politiques d’excellence visant à concentrer des moyens nouveaux sur les universités les plus à même de rayonner dans le monde entier et d’attirer les meilleurs étudiants et les meilleurs universitaires. René Ricol et ses équipes laissent un héritage considérable au Commissariat général à l’investissement (CGI). En effet, pour la première fois de l’histoire universitaire contemporaine, la politique des "initiatives d’excellence" ou IDEX a permis de concentrer de très importants moyens sur d’autres établissements universitaires que les grandes écoles…

En outre, les équipes du CGI ont légitimé la notion d’excellence en faisant arbitrer leurs choix par des jurys internationaux et en conditionnant à terme la libération de moyens considérables – plusieurs centaines de millions d’euros pour chaque IDEX – à une stricte évaluation des réalisations de chaque regroupement d’établissements concerné.

Beaucoup a été fait et beaucoup reste à faire pour nos universités. Si la dépense par étudiant doit continuer de progresser, une partie des moyens dont les universités ont besoin pour mieux encadrer leurs étudiants – et donc assurer leur réussite – et tout à la fois déployer une recherche de grande qualité se trouvent dans les organismes de recherche. Pourra-t-on débattre à l’occasion de la concertation souhaitée par le nouveau gouvernement d’un rapprochement plus important encore entre les universités et ces derniers ? C’est sans doute ce qui manque le plus à notre système universitaire pour rivaliser avec les grandes universités de recherche dont les noms sont connus dans le monde entier.

Avec l’autonomie, certaines universités vont être plus inventives et plus innovantes que d’autres. Certaines vont souhaiter dépasser le cadre de la loi de 2007 et même celui, quand il sera posé, de la nouvelle loi de 2013. C’est cet état d’esprit qu’il faut encourager, soutenir et diffuser. Au fond, après des décennies de tutelle, le moment est sans doute venu pour un Etat stratège et décentralisateur de laisser les universités assumer pleinement leur destin…

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