Assujettir aux cotisations sociales les revenus d’intéressement, de participation et d’épargne salariale
« Soumettre à cotisations sociales les revenus d’intéressement, de participation et d’épargne salariale ».
Les revenus d’intéressement, de participation et d’épargne salariale ne sont actuellement pas soumis à cotisations sociales employeur ou salarié. L’employeur est cependant assujetti au forfait social sur les sommes distribuées – en dehors des cas d’exonérations de forfait social créés par la loi Pacte en 2019.
L’assujettissement de ces revenus aux cotisations sociales se traduirait par un gain pour les finances publiques (9 Md€) au détriment des revenus des salariés (perte de 4,1 Md€ de revenus nets) et des employeurs (perte de 4,9 Md€).
Si les entreprises réduisent les sommes versées en participation, intéressement et abondement pour maintenir inchangé leur budget de dépenses de personnel, le gain pour les finances publiques serait plus limité (6,9 Md€), et la perte de revenu net des salariés serait accrue (7 Md€). Cette réduction pourrait se faire progressivement, au moment du renouvellement des accords d’entreprise.
Dans cette fenêtre, le résultat de la mesure dépendra notamment de la situation du marché du travail et des conditions de dialogue social au sein des entreprises, qui peuvent être plus ou moins favorables au partage de la valeur.
Le chiffrage est entouré de plusieurs aléas :
- Un aléa positif sur les recettes fiscales, si faute d’incitation pour les entreprises à verser de l’épargne salariale, elles portent ces sommes en salaires et primes, soumis à l’impôt sur le revenu ;
- Un aléa négatif sur les salaires et les rentrées sociales qu’ils génèrent, dans la mesure où il est possible que le renchérissement du coût des versements prévus par les accords d’intéressement et de participation en place s’accompagne d’une modération salariale par les entreprises ;
- Un aléa négatif sur l’activité et sur l’emploi du fait d’une hausse du coût du travail que représenterait la socialisation de l’épargne salariale ;
- Un effet incertain sur le dialogue social en entreprise, et par conséquent sur la productivité et l’emploi.
Commentaire de l’équipe de campagne
Contactée, l’équipe de campagne estime, à partir des données du PLFSS, le gain de cette mesure à 8,2 Md€ par an. Elle indique par ailleurs que le risque de modération salariale est écarté par les mesures du programme visant à stimuler les salaires ; que l’impact sur le pouvoir d’achat ne sera pas défavorable car « cela incitera plutôt à verser du salaire« , et que l’impact sur les entreprises sera neutre car « elles feront des économies sur la diminution des dividendes versés en raison d’autres mesures du programme« . Elle précise que « la caisse de péréquation interentreprises pour mutualiser la contribution sociale entre petites et grandes entreprises aidera par ailleurs les PME« .
Impact macroéconomique / sur le pouvoir d’achat
La mesure aurait un impact défavorable sur le pouvoir d’achat des salariés. En effet, ceux-ci seraient affectés par l’assujettissement des sommes distribuées aux cotisations sociales salariales et éventuellement par la réduction du volume des sommes distribuées soit une perte de revenu net comprise entre 4,1 et 7 Md€. Néanmoins, l’impact sur la consommation pourrait prendre du temps à se matérialiser, ces sommes étant généralement bloquées.
S’agissant des entreprises, elles seraient affectées par l’assujettissement des sommes distribuées aux cotisations patronales, partiellement compensées par la suppression du forfait social (perte de 4,9 Md€ la première année), à moins de réduire les versements aux salariés. La mesure constitue une hausse du coût du travail tout en ayant potentiellement des conséquences défavorables sur le dialogue social et les performances des entreprises.
Selon les données de la Dares, près de 8 millions de salariés reçoivent une prime d’intéressement, de participation, ou un abondement en 2019, pour un montant brut global de l’ordre de 20 milliards d’euros (soit en moyenne 2 600€ par an par salarié bénéficiaire). Le montant moyen de ces primes est de 1 499€ pour la participation, 1 909 € pour l’intéressement et 2 364€ pour les plans d’épargne d’entreprise.
Mis en place en 1959, l’intéressement est un dispositif facultatif, ouvert à toutes les entreprises qui satisfont à leurs obligations en matière de représentation du personnel. Il permet d’associer les salariés aux performances de l’entreprise. Les sommes sont distribuées en fonction d’une formule librement définie dans un accord conclu entre la direction de l’entreprise et les représentants des salariés. Le choix des critères est très ouvert sous réserve que l’intéressement soit aléatoire et collectif.
La participation, instaurée en 1967, est un dispositif collectif obligatoire pour les entreprises de 50 salariés et plus, facultatif pour les entreprises plus petites. Il s’agit d’un partage des résultats financiers s’appuyant sur une formule légale définie par le code du travail. Si une formule dérogatoire peut être utilisée, elle doit accorder aux salariés des avantages au moins équivalents au régime légal. L’accord de participation organise les modalités de versement et de gestion des sommes versées aux salariés.
Les sommes d’intéressement et participation sont exonérées de cotisations sociales patronales et salariales, mais soumises au forfait social qui est une contribution à la charge de l’employeur, dès lors que l’entreprise dépasse 250 salariés pour l’intéressement et 50 salariés pour la participation.
Les sommes perçues par le salarié sont soumises aux contributions sociales (CSG-CRDS) mais sont exonérées d’impôt sur le revenu lorsqu’elles restent bloquées sur un support d’épargne salariale (plan d’épargne d’entreprise par exemple).
Par ailleurs, lorsqu’un salarié réalise des versements bloqués sur un support d’épargne salariale, l’entreprise peut les compléter par un abondement, exonéré d’impôt sur le revenu et de charges sociales employeur et salariales en dessous d’un certain plafond. L’abondement est soumis au forfait social si l’entreprise dépasse 50 salariés.
Réglementation en vigueur :
Régime socialo-fiscal en vigueur | Perception directe | Placement (bloqué) sur un support d’épargne salariale |
Intéressement | Exonération de charges sociales patronales et salariales ; forfait social si plus de 250 salariés
Impôt sur le revenu et CSG-CRDS |
Exonération de charges sociales patronales et salariales ; forfait social si plus de 250 salariés
Exonération d’impôt sur le revenu mais application de CSG-CRDS |
Participation | Exonération de charges sociales patronales et salariales ; forfait social si plus de 50 salariés
Impôt sur le revenu et CSG-CRDS |
Exonération de charges sociales patronales et salariales ; forfait social si plus de 50 salariés
Exonération d’impôt sur le revenu mais application de CSG-CRDS |
Abondement par l’entreprise suite à un versement du salarié sur le plan d’épargne d’entreprise | Exonération de charges sociales patronales et salariales ; forfait social si plus de 50 salariés
Exonération d’impôt sur le revenu mais application de CSG-CRDS |
La proposition du candidat consisterait donc à assujettir l’ensemble des versements d’intéressement, de participation et d’abondement aux cotisations sociales salariales et employeur, le cas échéant à la place du forfait social. Ces versements représentaient 20,3 Md€ en 2019 (9,8 Md€ en intéressement, 8,0 Md€ en participation et 2,4 Md€ en abondement – chiffres DARES, avant prélèvement de la CSG-CRDS).
Si la mesure s’appliquait à volume de versements inchangés :
- Cela constituerait un gain en termes de cotisations salariales de l’ordre de 20 % de ce montant, soit 4,1 Md€ ;
- Cela constituerait par ailleurs un gain en termes de cotisations employeurs de l’ordre de 40 % de ce montant, soit 8,1 Md€ ;
- Compensé par la suppression du forfait social prélevé sur ces sommes (3,2 Md€ en 2019 – calcul sur la base de données ACOSS – Les Comptes de la Sécurité Sociale – juin 2021).
L’effet brut de cette mesure pour les finances publiques serait donc un gain de l’ordre de 9 Md€. Ce montant résulterait en une hausse du coût du travail pour les employeurs (4,9 Md€) et une baisse de revenu net pour les salariés (4,1 Md€).
Ces deux effets (surcoût pour les entreprises, baisse du revenu pour les salariés) affecteraient sans doute les montants distribués. Les montants versés par les entreprises pourraient s’ajuster à mesure que les accords d’intéressement ou de participation arriveraient à expiration (ou seraient dénoncés) :
- Le volume des primes de participation, dont la mise en place est obligatoire dans les entreprises de plus de 50 salariés et dont la formule doit être au moins plus favorable que la formule légale, est le moins susceptible de se contracter. Une réduction est néanmoins à attendre dans les entreprises ayant mis en place le dispositif de manière facultative, puisqu’il est possible de mettre fin au dispositif lorsque l’accord a prévu une date d’expiration (généralement au bout d’un an) ;
- L’effet pourrait être nettement plus important s’agissant du volume des primes d’intéressement, dont la mise en place est entièrement facultative et pour une durée limitée à 1 à 3 ans ;
- De même, les conditions d’abondement pourraient être substantiellement revues.
Les employeurs pourraient chercher à neutraliser entièrement le coût de la mesure sur leur budget de personnel. Pour cela, ils réduiraient les volumes de primes de participation (dans le cas des dispositifs mis en place de manière facultative), d’intéressement et d’abondement distribués pour quel le coût employeur de ces dispositifs ne change pas. Dans cette hypothèse, les 3,8 % des salariés dans les entreprises employant entre 10 et 50 salariés qui reçoivent des primes de participation ne seraient alors plus couverts (environ 200 000 salariés) soit une perte de 400 M€. Par ailleurs, pour maintenir un coût employeur identique compte tenu de l’augmentation des coûts des dispositifs, les versements d’intéressement et d’abondement devraient être drastiquement réduits (avec des volumes diminués d’environ 25 %).
Dans ce scénario, le pouvoir d’achat des salariés diminuerait plus fortement (les revenus nets de cotisation passant de 20,3 Md€ avant la mesure à 13,5 Md€ soit une perte nette de près de 7 Md€) et les recettes publiques augmenteraient moins fortement (à 10,1 Md€).
(En Md€) | Situation présente, avant la mesure | Mesure appliquée à versements constants | Mesure appliquée à coût employeur constant |
Recettes publiques | 3,2 | 12,2 | 10,1 |
– dont cotisations salariales | 0,0 | 4,1 | 3,4 |
– dont cotisations patronales ou forfait social | 3,2 | 8,1 | 6,8 |
Montants nets perçus par les salariés | 20,3 | 16,2 | 13,5 |
Coût employeur total | 23,5 | 28,4 | 23,5 |
NB : Avant l’entrée en vigueur de la mesure, les recettes publiques se composent du forfait social payé intégralement par les entreprises (3,2 Md€). Les salariés perçoivent 20,3 Md€ de revenus (hors prélèvement de la CSG/CRDS). Si lorsque la mesure s’applique, le volume des versements est inchangé, des cotisations sociales employeur sont prélevées conduisant à une hausse des charges patronales de +4,9 Md€ (dont +8,1 Md€ de cotisations patronales et -3,2 Md€ de forfait social), ainsi que des cotisations pesant sur les salariés (+4,1 Md€). En conséquence, les montants nets perçus par les salariés se réduisent à 16,2 Md€.
Si les employeurs ajustent leurs versements pour maintenir constant leur budget de dépenses de personnel, les montants nets perçus par les salariés diminuent plus fortement encore (à 13,5 Md€), les recettes publiques augmentent moins fortement (10,1 Md€).
Les recettes publiques supplémentaires procurées par la mesure se situeraient donc dans une fourchette comprise entre 6,9 Md€ et 9 Md€, en fonction de la manière dont les employeurs ajusteraient les montants versés.
Le chiffrage est entouré de plusieurs aléas :
- Un aléa positif sur les recettes fiscales, si faute d’incitation pour les entreprises à verser de l’épargne salariale, elles portent ces sommes en salaires et primes, soumises à l’impôt sur le revenu ;
- Un aléa négatif sur les salaires et les rentrées sociales qu’ils génèrent, dans la mesure où il est possible que le renchérissement du coût des accords d’intéressement et de participation en place s’accompagne d’une modération salariale par les entreprises ;
- Un aléa négatif sur l’activité et sur l’emploi du fait d’une hausse du coût du travail que représenterait la socialisation de l’épargne salariale ;
- Un effet incertain sur le dialogue social en entreprise, et par conséquent sur la productivité et l’emploi.
L’effet macroéconomique pourrait être limité à court terme, les versements d’épargne salariale étant en général bloqués sur des supports d’épargne et non consommés, mais l’impact via la hausse du coût du travail et l’effet sur le dialogue social en entreprise peut être assez rapide à se manifester.
Concernant les aléas, ce chiffrage ne prend pas en compte la proposition formulée par ailleurs par le candidat consistant à relever de 0,25 point le taux de cotisation vieillesse chaque année du quinquennat (soit 1,25 points). Le possible effet de modération salariale n’est pas non plus pris en compte. Enfin, la temporalité joue un rôle, dans la mesure où les accords d’entreprises sont conclus pour une certaine durée : les entreprises pourraient donc ajuster progressivement les montants versés aux salariés.
Historique de la mesure
La mesure n’a pas été appliquée en France en tant que telle; et s’inscrit plutôt à rebours des dernières mesures adoptées.
À l’origine, les primes d’intéressement, participation et l’abondement n’étaient pas assujetties aux cotisations sociales. Le forfait social a été mis en place en 2009. Son taux normal, initialement de 2 % des sommes distribuées, a été progressivement relevé pour atteindre 20 % en 2012.
Des taux réduits ont ensuite progressivement été mis en place (8 % sur le premier accord conclu en 2016, 10 % sur les abondements en actionnariat salarié en 2019) voire des exonérations complètes par la loi Pacte en 2019 pour les petites et moyennes entreprises (moins de 50 salariés pour les primes de participation et l’abondement ; moins de 250 salariés pour les primes d’intéressement).
La hausse du taux du forfait social au début des années 2010 n’a pas empêché une croissance spontanée de l’assiette, mais le taux restait très incitatif par rapport aux cotisations sociales appliqués sur les salaires. La proposition du candidat supprime en revanche le caractère incitatif de la participation et de l’intéressement par rapport au versement de salaire (le seul avantage reste l’exonération d’impôt pour les sommes bloquées).
Benchmark
La proposition n’a pas été appliquée ou avancée à l’étranger, la France se caractérisant par une grande diffusion des dispositifs de partage de la valeur par rapport notamment aux autres pays européens. Cette diffusion tient à la fois au caractère obligatoire de certains dispositifs et aux incitations socialo-fiscales associées (notamment à l’exonération de cotisation sociales salariales ou employeurs).
Ainsi, la réintégration des revenus de l’intéressement, de la participation et de l’épargne salariale dans le champ des revenus du travail, avec une perception de cotisations sociales, en lieu et place le cas échéant du forfait social, rapprocherait la France de ses voisins européens dans lesquels les incitations socialo-fiscales sont limitées voire inexistantes pour ce type de dispositifs.
Mise en œuvre
La mise en place de cette mesure nécessiterait une inscription en loi de financement de la sécurité sociale de manière à modifier les dispositions applicables aux cotisations sociales et au forfait social.
Les organisations professionnelles d’employeurs s’opposeront probablement à l’intégration des revenus de l’intéressement, de la participation et de l’épargne salariale dans l’assiette des cotisations sociales compte tenu du surcoût immédiat que cela représenterait pour les entreprises.
S’agissant des salariés, les revenus nets seraient par ailleurs immédiatement diminués de la mise en place de cotisations sociales salariales et cette perte de pouvoir d’achat se poursuivrait les années suivantes du fait de la réduction des volumes versés par les entreprises.
Supprimer la flat tax et imposer les revenus du capital comme ceux du travail
Rendre la CSG progressive sur 14 tranches
Augmenter le Smic à 1 400 € net
Encadrer les loyers partout sur le territoire et à la baisse dans les grandes villes
Mettre fin au quotient conjugal
Augmenter les droits de succession sur les plus hauts patrimoines et créer un héritage maximal de 12 M€
Rendre l'impôt sur le revenu plus progressif avec un barème à 14 tranches
Réduire la TVA sur les produits de première nécessité et réinstaurer une TVA grand luxe pour la financer
Plafonner les frais bancaires
Imposer les autres transactions immobilières par une taxe progressive
Instaurer une tarification progressive de l'énergie