Sortir progressivement du nucléaire et condamner au moins 10 réacteurs d’ici 2035
« Nous sortirons du nucléaire. Nous ne construirons pas de nouvelles centrales, et nous fermerons progressivement les réacteurs actuellement en fonctionnement, au fur et à mesure de leur obsolescence et de notre capacité à les remplacer par des économies d’énergie et de l’électricité renouvelable. Nous organiserons dès 2022 la transition vers un monde sans carbone et sans nucléaire. Nous n’ouvrirons pas l’EPR de Flamanville au regard de l’impossibilité d’avoir des perspectives sur l’achèvement des travaux dans des délais, coûts et conditions de sécurité raisonnables. Nous fermerons progressivement les réacteurs actuellement en fonctionnement. Au moins 10 réacteurs nucléaires seront arrêtés d’ici 2035 ».
Chiffrage de l’Institut Montaigne
- Surcoût estimé entre 2 et 4 Md€/an sur la prochaine mandature, et à 19 Md€/an à horizon 2050 ;
- Ce scénario nécessite aussi de verser des indemnités à EDF pour cause de fermeture anticipée des centrales, pour un montant total de 2,5 Md€ environ.
L’atteinte de la neutralité carbone en 2050 et la mise en œuvre du plan Fit for 55 de la commission européenne nécessiteront la fixation d’orientations de politique énergétique à long terme lors du prochain quinquennat. Comme l’a montré l’étude réalisée par RTE sur les futurs énergétiques à l’horizon 2050, quel que soit le mix retenu, l’atteinte des objectifs représentera un challenge et nécessitera des investissements conséquents (entre 20 et 25 Md€ par an selon RTE), aussi bien dans le parc de production que dans les réseaux, même dans le cas d’un scénario avec du nucléaire. Le présent exercice de chiffrage compare les coûts complets annualisés du mix énergétique proposé par le candidat, par rapport au scénario N03 étudié par RTE dans son étude à horizon 2050, scénario le moins coûteux qui prévoit un mix 50 % nucléaire à horizon 2050 (1).
Le candidat indique souhaiter atteindre un mix 100 % renouvelables ce qui correspond au scénario M0 étudié par RTE, qui se passe de nucléaire à horizon 2050 et s’appuie sur un parc nucléaire de 30 GW en 2040 (2). Ce rythme de sortie du nucléaire n’est pas pertinent économiquement car revient à se passer d’un parc nucléaire existant dont les coûts de prolongation sont compétitifs par rapport au coût de production des EnR. Par ailleurs, il fait peser un risque sur la sécurité d’approvisionnement en électricité du pays, car nécessite de suivre une trajectoire de hausse des EnR très ambitieuse qui représente un défi industriel et une rupture de tendance par rapport à aujourd’hui. En particulier, elle nécessite une forte accélération de l’investissement sur la prochaine décennie. En outre, si la fermeture anticipée de centrales permet de limiter le risque nucléaire dans certaines centrales identifié par l’équipe de campagne, l’absence de moyens équivalents de production par ailleurs pourrait conduire à importer de l’énergie d’autres pays partenaires dont le mix énergétique est plus carboné.
Le choix d’un scénario 100 % renouvelables génère un surcoût a minima de 19 Md€/an à horizon 2050, en raison des adaptations coûteuses des réseaux de transport et de distribution et un recours massif et coûteux aux flexibilités, qui viendront très largement compenser la compétitivité des coûts de production des EnR à horizon 2050. Si le rythme de sortie du nucléaire choisi par le candidat devait être plus rapide que celui étudié par RTE, ce surcoût pourrait être augmenté de l’ordre de 3,5 Md€/an.
Commentaires de l’équipe de campagne
Contactée, l’équipe de campagne du candidat confirme qu’il n’est pas prévu de construire de nouvelles centrales et que les réacteurs actuellement en fonctionnement seront fermés progressivement, à un horizon non défini, au fur et à mesure de leur obsolescence et de la capacité à les remplacer par des économies d’énergie et de l’électricité renouvelable. Par ailleurs, aucun réacteur ne sera fermé sur le quinquennat, sauf avis de l’ASN allant en ce sens.
Enfin, selon l’équipe de campagne, il n’y aurait pas de coûts liés à une indemnisation d’EDF, puisqu’il s’agirait de non-prolongements et non de fermetures anticipées.
(1) 23 % de nucléaire existant et 27 % de nouveau nucléaire.
(2) Et 15 GW à horizon 2045.
Toutes les analyses développées ci-dessous sont menées en comparant les coûts annualisés du scénario choisi par le candidat aux coûts du scénario N03, mix énergétique le moins coûteux étudié par RTE dans son rapport sur les futurs énergétiques à horizon 2050.
Le scénario étudié par RTE le plus proche de la proposition du candidat est le scénario M0 qui est sans nucléaire à horizon 2050. Ce scénario prend en compte un parc nucléaire de 30 GW à horizon 2040 (200 TWh environ) et 15 GW à horizon 2045. Jusqu’en 2030/2035, le rythme de sortie du nucléaire semble similaire, la proposition du candidat de fermer au moins 10 réacteurs d’ici 2035 étant similaire au rythme actuel de fermeture prévue par la PPE et reprise dans le scénario M0 de RTE. Après cette échéance, la proposition n’est pas suffisamment précise pour assurer une comparaison complète avec le scénario de RTE.
À long terme, les coûts de production des technologies renouvelables devraient baisser (même s’il reste des incertitudes notamment sur les coûts de raccordement de l’éolien offshore), alors que le coût du nouveau nucléaire devrait lui se situer en hausse par rapport au nucléaire actuel et est encore largement incertain. Cette dynamique inverse en matière de coût de production induit que les coûts de production annualisés à horizon 2050 d’un mix 100 % renouvelables (se basant sur les technologies EnR les plus compétitives, notamment les grands parcs) sont similaires voire légèrement inférieurs, par rapport à des scénarios avec développement de nouveau nucléaire.
Si la sortie du nucléaire venait à s’accélérer à un rythme supérieur à celui prévu dans les scénarios RTE, des surcoûts viendraient inévitablement grever les charges des producteurs d’électricité. Une accélération de la sortie du nucléaire viendrait dégrader les coûts de production annualisés. En effet, une sortie du nucléaire avant l’échéance des 60 ans des centrales actuelles, revient à substituer des actifs de production, dont la prolongation est compétitive, par des actifs de production dont le coût de production reste plus élevé dans les prochaines années. Le scénario N03 de RTE, qui est le seul scénario qui simule un ralentissement de la fermeture de réacteurs par rapport à la trajectoire prévue par l’actuelle PPE, illustre bien ce phénomène. Dans ce scénario, seuls deux réacteurs sont fermés d’ici 2035, et c’est le seul scénario qui voit une baisse de ses coûts complets d’ici 2040. RTE estime dans son rapport sur les futurs énergétiques à 2050 que les coûts restant à engager pour la poursuite d’exploitation des réacteurs existant se situent entre 30 et 40€ /MWh, alors que les coûts de production des EnR sont très variables et peuvent être estimés dans une fourchette située entre 40 et 160€/MWh à horizon 2030 et entre 30 et 110€/MWh à horizon 2050, selon les estimations de RTE. Une accélération de la sortie du nucléaire à partir de 2036 par rapport au scénario M0 (par exemple pour sortir du nucléaire d’ici 2040), entrainerait une augmentation des coûts de production, car ne permettrait pas de capter autant que possible la baisse de coûts des EnR. En considérant un coût moyen de production EnR de 62€/MWh (1) en 2030 diminuant de manière linéaire à 43€/MWh en 2050, et en considérant que l’accélération consiste à substituer 300 TWh de nucléaire entre 2030 et 2040, contre 100 TWh entre 2030 et 2040 puis 200 TWh entre 2040 et 2050 dans le scénario M0, une telle accélération de la sortie du nucléaire représenterait un surcoût de production de l’ordre de 3,5 Md€/an à horizon 2050. Ce surcoût de l’accélération évolue entre 3,3 et 3,7 Md€/an en cas de baisse respectivement moins et plus prononcée des coûts de production EnR.
L’essentiel du surcoût des scénarios 100 % EnR par rapport aux scénarios nucléaires du rapport RTE provient de coûts supplémentaires d’adaptation des réseaux électriques à ces nouveaux moyens de production et de flexibilités supplémentaires (moyens de production pour les phases de creux de production inévitables pour certaines EnR). Si le différentiel de coût de production s’inverse entre EnR et nouveau nucléaire, les scénarios EnR, sans nouveau nucléaire, restent plus coûteux lorsque l’on raisonne en coûts complets car nécessitent de développer des moyens de flexibilités de manière très importante, pour faire face à l’intermittence de ces énergies, et demandent également plus d’adaptation des réseaux de transport et de distribution d’électricité en raison du caractère plus décentralisé de la production. S’agissant du coût de la flexibilité nécessaire, le chiffrage est difficile et dépend de nombreux paramètres, comme l’évolution des technologies de stockage, le coût de moyens thermiques décarbonés ou encore le mix EnR considéré. On peut néanmoins estimer ce coût des flexibilités en comparant les différents scénarios du bilan RTE 2050. Si l’on compare les scénarios M0 et N03, on observe un surcoût lié à l’équilibrage du système de 14 Md€/an à horizon 2060 (2). À ces coûts de flexibilité, s’ajoute un différentiel de coûts d’adaptation des réseaux, estimé entre ces deux scénarios à 5 Md€/an à horizon 2060 (2). À cet horizon donc, le coût de la sortie du nucléaire peut être estimé à 19 Md€/an. Ce surcoût va croitre progressivement en fonction du rythme d’évolution du mix. Toujours d’après le bilan de RTE, cet écart de coût entre ces deux scénarios essentiellement portés par les coûts de flexibilité et de réseaux, est estimé à 5 Md€/an à horizon 2030, 15 Md€ à horizon 2040 pour se stabiliser autour de 19 Md€/an dès 2050. La proposition de Yannick Jadot consiste à sortir graduellement du nucléaire : il est raisonnable de penser que le scénario proposé par le candidat génèrera donc les mêmes surcoûts que ce scénario M0 à horizon 2030, 2040 et 2050. Néanmoins, si la sortie était accélérée à partir de 2036 (date à laquelle le rythme de sortie prévue par le candidat reste floue) le surcoût aux horizons 2030 et 2050 resteraient inchangés mais seraient augmentés en 2040.
Enfin, une accélération des fermetures occasionnerait aussi des surcoûts en matière d’indemnisation : une fermeture anticipée des réacteurs existants, dont le prolongement de vie à 60 ans semble acquis technologiquement parlant, nécessiterait en effet probablement d’envisager une indemnisation de l’exploitant EDF, comme cela a été fait pour Fessenheim (377 M€ pour 2 réacteurs, soit un peu moins de 200 M€ par réacteur). Les trois quarts de la capacité installée du parc actuel a été mis en service entre 1980 et 1990 et l’âge moyen des réacteurs était de 34,25 ans en 2020. La fermeture de Fessenheim est intervenue alors que la centrale était en service depuis 42 ans. Yannick Jadot propose de sortir graduellement du nucléaire avec la fermeture d’au moins 10 réacteurs d’ici 2035. Ce scénario nécessiterait jusqu’en 2035 de fermer environ un réacteur par an, puis 3 réacteurs par an si le candidat suit le rythme de sortie étudié par RTE dans son scénario M0 (ou 9 réacteurs par an jusqu’en 2040 en cas d’accélération de la sortie après 2036). En considérant que les réacteurs sont fermés par âge décroissant, les réacteurs seraient alors fermés autour de 50 ans jusqu’en 2035 puis autour de 54 ans jusqu’en 2050 (ou 44 ans jusqu’en 2040 en cas d’accélération de la sortie). Les réacteurs de Fessenheim ont été fermés après une durée de vie d’un peu plus de 40, on pourrait donc considérer que l’ordre de grandeur de la fermeture d’un réacteur autour de 44 ans pourrait être similaire à l’indemnisation pour Fessenheim, soit environ 200 M€ par réacteur. Ce montant constitue cependant une estimation basse, puisque ne tient pas compte de la puissance des réacteurs (les réacteurs de Fessenheim proposaient une puissance de 900 MW comme 60 % du parc environ, mais un palier technologique a été franchi autour des années 1980 et les 40 % du parc restant ont donc une puissance supérieure à 1 300 MW (3)). Pour les réacteurs fermés jusqu’en 2035, la durée de vie résultant diminuant de moitié, on pourrait alors imaginer que les indemnités avoisineraient les 100 M€ par réacteur. Enfin pour les réacteurs fermés après 2035 dans le cas d’une sortie selon le rythme du scénario M0, on peut estimer que le coût d’indemnisation diminuerait encore de moitié soit 50 M€ par réacteur. Les coûts d’indemnisation d’EDF pour combler les coûts engendrés par la fermeture précoce de certaines centrales, estimés à 100 M€/an jusqu’en 2035, puis à 150 M€/an entre 2036 et 2050 (4), représenteraient alors un total de près de 2,5 Md€. En cas d’accélération de la fermeture des réacteurs à partir de 2036, l’indemnisation pourrait augmenter à 1,8 Md€/an (5) entre 2036 et 2040, pour un total de près de 10 Md€.
Enfin, une sortie du nucléaire présenterait un coût social important pour les employés de la filière nucléaire française : la fermeture des deux seuls réacteurs de Fessenheim a impacté quelques 2 000 emplois – selon le Gifen, syndicat professionnel de la filière, 220 000 emplois seraient liés en France à l’énergie nucléaire. Si l’ensemble des emplois ne serait pas menacé à court terme par la fermeture des réacteurs, le démantèlement des sites et le traitement des déchets pouvant notamment mobiliser un certain nombre de ces employés, l’impact sera néanmoins majeur et impactera plusieurs dizaines de milliers d’emplois. Le programme du candidat identifie ce sujet d’accompagnement et de reconversion des employés du secteur d’activité nucléaire. Un plan d’accompagnement de ce type avait été mis en œuvre dans le cadre de la reconversion de la filière automobile en France en 2021 pour plusieurs dizaines de M€ (6).
En synthèse, le scénario de mix proposé par M. Jadot représente un surcoût par rapport à un scénario avec développement du nouveau nucléaire de l’ordre de :
- entre 2 et 4 Md€/an sur la prochaine mandature (pour moitié en raison de la substitution d’actifs nucléaires dont la prolongation est avantageuse économiquement par des actifs EnR avec des coûts de production supérieurs et pour moitié en raison des besoins en flexibilités induits par l’augmentation de la part des EnR)
- autour de 20 Md€/an à horizon 2050 (à cette échéance le surcoût est essentiellement porté par les coûts d’adaptation des réseaux et le recours croissant aux flexibilités)
À ces surcoûts liés aux investissements dans les actifs de production et dans les réseaux, s’ajouteront les coûts d’indemnisation d’EDF pour combler les coûts échoués engendrés par la fermeture précoce de certaines centrales, estimés à 100 M€/an jusqu’en 2035, puis à 50 M€/an entre 2036 et 2050, soit un total de près de 2,5 Md€.
Le coût complet du scénario proposé par Yannick Jadot représenterait à horizon 2050, un coût annuel de l’ordre de 80 Md€/an. Ce coût complet, tel que le défini dans le rapport RTE précité, correspond à un coût complet de l’énergie à l’horizon 2050 et non pas du surcoût par rapport à aujourd’hui. Ce coût complet est actuellement d’un peu plus de 40 Md€ et correspond à tous les coûts annualisés – y compris d’investissements – de l’ensemble des filières de production mais également des besoins de flexibilité et de réseau. Le scénario de référence de RTE pris en compte dans ces chiffrages, correspondant au scénario N03, est le moins cher et représenterait un coût complet d’un peu moins de 60 Md€ à l’horizon 2050, soit de l’ordre de +20 Md€ par rapport à aujourd’hui.
Complexité du chiffrage
Le chiffrage de la sortie du nucléaire est un exercice compliqué qui doit prendre en compte un très grand nombre de paramètres et de données, qui ne sont pas toutes publiques. Par ailleurs, il existe de nombreuses incertitudes sur le coût et la disponibilité de certaines technologies, nécessaires autant dans les scénarios de sortie que de poursuite du nucléaire. Enfin la proposition du candidat est relativement imprécise sur le rythme de sortie du nucléaire, malgré la mise en avant de quelques jalons, 2035 et à horizon 20 ans, et sur les moyens précis développés pour compenser la perte d’énergie nucléaire (le candidat parle notamment de l’installation de 6 000 éoliennes, qui ne peuvent s’avérer suffisantes pour remplacer 400 TWh de nucléaire, et de la mise en place de communautés citoyennes de l’énergie).
Historique de la mesure
La PPE actuelle prévoit la fermeture de de 14 réacteurs d’ici 2035 : à date seuls les deux réacteurs de la centrale de Fessenheim ont été fermés, alors que l’exploitant EDF considérait que leur durée de vie pouvait être prolongée.
Benchmark
Suite à la catastrophe de Fukushima en 2011, le gouvernement allemand a pris la décision radicale de fermer l’ensemble de ses centrales (au nombre de 17), d’ici 2022, neuf mois seulement après des décisions très favorables à la filière (augmentation du quota d’énergie produite par la filière, prolongation de la durée d’exploitation de 12 ans en moyenne). Le rythme de fermeture prévu a été globalement tenu.
Les producteurs d’électricité (Eon, RWE, Vattenfall) ont alors porté plainte. La Cour constitutionnelle allemande a rendu le 6 décembre 2016, soit cinq ans après l’annonce, un verdict engendrant des conséquences financières non négligeables pour l’Allemagne. En effet si la décision de sortie du nucléaire a été considérée comme conforme à la Constitution (Loi fondamentale) allemande, la Cour constitutionnelle a considéré que les énergéticiens sont en droit de réclamer des compensations. Le gouvernement allemand devrait ainsi verser 2,4 Md€ d’indemnités aux trois exploitants.
Au-delà de ces conséquences financières, la sortie du nucléaire en Allemagne a également eu un impact environnemental globalement négatif. Ainsi, une étude réalisée à Berkeley en 2020 (7) sur la sortie du nucléaire en Allemagne, estime que la fermeture anticipée de 10 réacteurs entre 2011 et 2017 a induit en moyenne une hausse de la production des centrales thermiques de +15 %, une hausse des importations de +37 % et par ricochet une hausse des prix de gros au niveau européen de +4 %.
Trois autres pays européens qui avaient opté pour une sortie du nucléaire, suite à divers incidents notamment, sont finalement revenus sur leur décision au fil du temps. C’est le cas de la Suède, des Pays-Bas et de la Belgique.
La Belgique est probablement le cas le plus intéressant car le plus récent. Ainsi si une loi en 2003 a proscrit la construction de nouveaux réacteurs et fixé la durée maximum d’exploitation des centrales existantes à 40 ans, une nouvelle loi en 2015 a prolongé de 10 ans la durée de vie de certains réacteurs. D’autres prolongations étaient attendues, notamment suite à des études qui montrent (8) qu’à horizon 2050, sans nucléaire, la production nationale belge ne couvrira pas les besoins. En décembre 2021 un accord a finalement été trouvé pour la fermeture des centrales actuelles, à horizon 2025. Néanmoins, le gouvernement belge semble ne pas fermer complètement la porte au nucléaire, en investissant notamment 100 millions d’euros dans la nouvelle technologie nucléaire, en particulier sur les petits réacteurs modulaires.
À la suite d’un référendum en 1980, la Suède avait décidé de sortir progressivement du nucléaire. Cependant le pays est revenu sur sa décision, considérant que le changement climatique devait être traité en priorité par rapport à la fermeture des centrales nucléaires. En 2010, le renouvellement des centrales a ainsi été autorisé dans la limite de 10 réacteurs. Aux Pays-Bas la fermeture de l’unique centrale avait été actée pour 2004 mais son exploitation a finalement été prolongée jusqu’en 2033.
Mise en œuvre
La sortie du nucléaire nécessite une montée en puissance très importante des EnR, alors même que le rythme de déploiement actuel se situe en dessous des prévisions. Ainsi, miser sur un mix 100 % renouvelable représente un véritable défi industriel pour la filière mais aussi pour les gestionnaires de réseaux, RTE et Enedis, compte-tenu du volume de projets et de la complexité de certains d’entre eux (il existe ainsi une forte incertitude sur le raccordement offshore, qui s’avère extrêmement complexe et coûteux).
Par ailleurs, si cette montée en puissance ne devait pas être au rendez-vous, la France n’aurait alors pas d’autres choix que d’augmenter ses importations (au risque d’importer depuis un pays au mix moins décarboné que le mix français, présentant donc un coût environnemental difficilement chiffrable) ou d’augmenter le recours à des centrales thermiques.
(1) En prenant les hypothèses de coûts de référence du rapport RTE à horizon 2030 et en considérant un mix EnR 1/3 solaire (moitié sol et moitié grandes toitures), 1/3 éolien terrestre et 1/3 éolien offshore.
(2) Cf. graphique 11.30 page 506 et graphique 11.31 page 508 du rapport RTE précité
(3) Un chiffrage un peu plus fin correspondant à la puissance utilisée ne présente pas de différence flagrante : si l’on considère que l’indemnisation dépend de la capacité de production du réacteur, le déclassement d’un réacteur coûterait alors en moyenne : 235 M€ = 200 M€ x 60 % + 200 x 1 300/900 x 40 %. D’ici 2035, ce seraient surtout les réacteurs de première génération qui seraient déclassés et le coût de 200 M€ / an apparaît être une bonne approximation.
(4) 3 réacteurs fermés par an et indemnisés à hauteur de 50 M€.
(5) 9 réacteurs fermés par an et indemnisés à hauteur de 200M€.
(6) Cf. page 22 du rapport, Accompagner les reconversions professionnelles dans les territoires.
(7) « The Private and External Costs of Germany’s Nuclear Phase-Out » Stephen Jarvis, Olivier Deschenes, and Akshaya Jha January 2020.
(8) Étude menée par le cabinet PWC notamment, commandée en 2016 par le Forum nucléaire belge.
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