« Les allocations familiales seront fixées à 70 euros par mois et par enfant, dès le premier enfant ».
Chiffrage de l’Institut Montaigne :
- Estimation médiane : 1,1 Md€ par an (soit 5,5 Md€ sur le quinquennat)
- Estimation haute : 1,9 Md€ si les allocations familiales sont versées indépendamment des ressources du foyer
Yannick Jadot propose de verser les allocations familiales aux ménages dès le premier enfant, à savoir 70 € par mois pour cet enfant, soit 840€ par an.
Le candidat précise de plus que le nouveau barème de 70€ par enfant et par mois s’appliquera à l’ensemble des tranches familiales, contre un système progressif actuellement. En retenant l’hypothèse du versement des allocations familiales aux ménages éligibles avec un seul enfant et un barème s’appliquant à toutes les familles, cette proposition devrait avoir un coût sur l’ensemble du quinquennat d’environ 5,5 Md€, soit 1,1 Md€ par an à la fin du quinquennat.
Il est ici fait l’hypothèse que le montant des allocations familiales demeure conditionné au niveau de ressources du foyer. Si les allocations familiales deviennent octroyées indépendamment des ressources du foyer, la mesure coûterait 1,9 Md€ par an.
Impact macroéconomique / sur le pouvoir d’achat
Approche | Court terme | Long terme |
Effet positif | Améliorer le pouvoir d’achat des ménages | Poursuivre un objectif nataliste |
Effet négatif | Coût pour les finances publiques | – |
Yannick Jadot inclut l’ensemble des familles dans un dispositif élargi des allocations familiales, de telle sorte à poursuivre un double objectif de soutien au pouvoir d’achat et de prime à la natalité. En retenant ce scénario pour les cinq prochaines années, 3,6 millions familles supplémentaires entreront dans le dispositif, portant le total à 8,3 millions de familles, contre 4,9 millions précédemment.
En 2018, selon le Rapport d’évaluation des politiques de sécurité sociale – Famille annexé au projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) 2022 et l’Insee, la France comptait 8 millions de familles avec un ou plusieurs enfants mineurs, sur un total de 9,3 millions de familles avec un ou plusieurs enfants à charge de moins de 25 ans. Les familles avec un seul enfant à charge représentaient 43 % de ces familles, alors que les familles avec deux enfants composaient 39 % du total. Les familles avec trois enfants et plus à charge représentaient quant à elles 19 % du périmètre. Le nombre de familles comptant 1 ou 2 enfants a par ailleurs progressé, conduisant à une augmentation de leur part dans l’ensemble des familles depuis 1975 (+ 6,5 points pour les familles avec deux enfants de 1975 à 2017).
Les allocations familiales sont versées aux personnes ayant au moins 2 enfants de moins de 20 ans à charge. Le montant des prestations dépend des ressources, du nombre d’enfants à charge et de leur âge. Les allocations sont versées tous les mois.
En 2019, 4,9 millions de familles percevaient des allocations familiales d’un montant moyen de 209€ par famille et par mois, soit un coût total annuel de 12,3 Md€ pour la branche famille de la Sécurité sociale.
Les coûts retenus sont repris de la proposition du candidat, à savoir 70€ par mois, soit 840€ par an et pour un enfant.
Jusqu’ici, les barèmes étaient progressifs en fonction du nombre d’enfants à charge dans un foyer, et dégressifs en fonction des ressources. En 2021, les allocations mensuelles pour la « tranche ordinaire » s’élevaient respectivement à 133, 303 et 473€ par famille de 2, 3 et 4 enfants à charge. Pour la « tranche intermédiaire », elles s’établissaient à 66, 151 et 236€. Enfin, pour la « tranche minimum », elles s’établissaient à 33, 76 et 118€ par famille.
Il est fait l’hypothèse que les allocations familiales demeurent soumises à conditions de ressource et que les différentes tranches subsistent. En revanche, l’allocation par enfant ne varierait pas en fonction du nombre d’enfants. Ainsi, pour chaque enfant dans une famille à revenus de la « tranche ordinaire » (89,5 % des familles éligibles aux allocations familiales en 2019), l’allocation de serait de 70€ par mois. Pour les revenus de la tranche intermédiaire (5,2 % des familles) ils s’établiraient à 35€ par mois. Et ceux de la tranche minimum à 17,5 € par mois.
Allocations en € et par mois | Familles avec 1 enfant à charge | Familles avec 2 enfants à charge | Familles avec 3 enfants à charge | Familles avec 4 enfants à charge et plus | |
« Tranche ordinaire » | Actuel | 0 | 133 | 303 | 473 |
Réforme | 70 | 140 | 210 | 280 | |
« Tranche intermédiaire » |
Actuel | 0 | 66 | 151 | 236 |
Réforme | 35 | 70 | 105 | 140 | |
« Tranche minimum » |
Actuel | 0 | 33 | 76 | 118 |
Réforme | 17,5 | 35 | 52,5 | 70 |
Actuellement, les familles concernées par les allocations sont réparties de la manière suivante.
Nombre de familles concernées (en milliers) | Familles avec 1 enfant à charge | Familles avec 2 enfants à charge | Familles avec 3 enfants à charge | Familles avec 4 enfants à charge et plus |
« Tranche ordinaire » |
3 222 | 2 911 | 1 002 | 337 |
« Tranche intermédiaire » |
187 | 169 | 58 | 20 |
« Tranche minimum » |
191 | 172 | 59 | 20 |
Il peut être fait l’hypothèse que le nombre de naissances sera stable sur le quinquennat. Le coût annuel supplémentaire de cette mesure s’élèverait à 1,1 Md€, soit un coût cumulé sur l’ensemble du quinquennat de 5,5 Md€.
Coût pour les finances publiques (en M€) | Familles avec 1 enfant à charge | Familles avec 2 enfants à charge | Familles avec 3 enfants à charge | Familles avec 4 enfants à charge et plus | |
« Tranche ordinaire » | Actuel | 0 | 4 646 | 3 643 | 1 913 |
Réforme | 2 706 | 4 890 | 2 525 | 1 132 | |
« Tranche intermédiaire » |
Actuel | 0 | 134 | 105 | 57 |
Réforme | 79 | 142 | 73 | 34 | |
« Tranche minimum » |
Actuel | 0 | 68 | 54 | 28 |
Réforme | 40 | 72 | 37 | 17 | |
Surcoût annuel total | + 1 109 | + 2 825 | + 263 | – 1 166 | – 813 |
Source : Institut Montaigne
Le candidat n’a toutefois pas précisé si les prestations allaient continuer à être conditionnées aux ressources d’un foyer ou si les tranches de ressources allaient être supprimées. L’estimation peut donc être revue à la hausse si les prestations sont considérées comme indépendantes des ressources d’un foyer. Ainsi, chaque enfant (au nombre de 15 millions) bénéficierait d’une allocation mensuelle de 70 € par mois, indépendamment du niveau de ressources d’un ménage. Au total, le surcoût de la mesure s’établirait à 1,9 Md€ par an.
Le chiffrage réalisé se fonde sur des hypothèses démographiques qui ne prennent pas en compte d’éventuelles hausses ou baisses de natalité, avec un pourcentage de premières naissances approximé. Le chiffrage ci-dessus peut dès lors être considéré comme un plancher.
Historique de la mesure
Prenant ses origines dans un décret-loi du 12 novembre 1938 et d’une loi du 22 août 1946, les allocations familiales ont été instaurées, à la base sans conditions de ressources à partir du deuxième enfant, pour poursuivre un objectif nataliste. En 1981, les allocations familiales étaient revalorisées de 25 % alors qu’à partir de 1995, un débat s’installe autour du cantonnement des allocations familiales ou bien de leur expansion. Les allocations ne sont finalement pas soumises à des conditions de ressources en 1998 mais le deviennent en 2015 avec un régime dégressif pour les plus hauts revenus.
Pourtant, depuis 2011, le nombre de naissances se met à fléchir (- 3 % en quatre ans) avec une accentuation de la chute de la natalité entre 2015 et 2017 (- 3,7 % en trois ans). La baisse s’est ensuite poursuivie avec – 4,2 % de 2017 à 2021, creusant le solde naturel de la France en passant de + 278 337 en 2011 à + 81 000 en 2021.
La baisse de la fécondité est l’une des raisons de cette érosion de la natalité, avec 1,84 enfant né par femme en 2020 contre 1,88 en 2018 et 2,01 en 2011, du fait notamment que les jeunes femmes de 25 à 30 ans donnent moins naissance en 2021 (1,04 enfant par femme) qu’en 2011 (1,27) et 2001 (1,32).
Dès lors, la mesure de Yannick Jadot aurait pour objectif d’inciter le retour à la natalité avec un apport financier annuel de 840 €.
Benchmark
En dépit de la chute de fécondité depuis 2001, la France reste le pays européen le plus fécond avec un nombre d’enfants par femme de 1,84 en 2020 dépassant ainsi la moyenne de l’Union européenne s’établissant à 1,56.
Si des pays tels que l’Espagne et la Grèce, aux systèmes d’allocations familiales très peu développés présentent des taux de fécondité très réduits (1,23 et 1,34 enfants par femme), l’Allemagne et la Belgique présentent un modèle similaire d’allocations familiales à celui pratiqué en France, avec des résultats de fécondité pourtant proches de la moyenne européenne entre 1,54 et 1,6 enfant par femme. L’Allemagne a de plus décidé de mener des revalorisations de ses allocations familiales mensuelles pour tous les ménages en 2019 et 2021 (+ 12,5 % au total), alors qu’elles sont déjà accessibles dès le premier enfant à l’inverse de la France qui se limite pour l’instant aux familles à partir de deux enfants.
La Pologne s’est aussi lancée en 2017 dans un programme d’allocations familiales similaire au système français, avec 125€ par famille et par enfant à partir de la deuxième naissance, sans condition de ressources, soit un niveau mensuel équivalent à 25 % du salaire médian polonais (600€). Si des effets ont été vérifiés sur la hausse du pouvoir d’achat des ménages polonais, l’impact sur l’objectif nataliste a été plus diffus avec une hausse dans un premier temps du taux de fécondité de 1,39 à 1,48 de 2016 à 2017, puis une baisse jusqu’à 1,44 enfant par femme en 2019.
Il semblerait dès lors qu’au-delà de l’outil financier incitatif, la conciliation entre vie professionnelle des parents et accompagnement du développement éducatif des enfants constitue un des leviers prioritaires de politiques publiques qui pourrait structurellement contribuer à l’objectif nataliste.
Mise en œuvre
L’élargissement du périmètre des familles éligibles aux allocations familiales doit intervenir dans le cadre d’une loi de financement de la Sécurité sociale.
De plus, la base mensuelle de calcul des allocations familiales (BMAF) est l’outil permettant de régir les hausses ou les baisses des prestations.
Ce montant est fixé par décret publié au journal officiel, et sert de base pour les législateurs, qui fixent, dans le cadre de la loi de financement de la Sécurité sociale, le niveau des prestations familiales en pourcentage de la BMAF. À partir de 2012, la BMAF peut être revalorisée une seule fois par an, au premier avril, et suit généralement les prévisions de l’indice des prix à la consommation pour l’année suivante.
Dès lors, dès l’automne prochain dans le cadre du projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2023, le Gouvernement pourra proposer un nouveau pourcentage des allocations familiales par rapport à la BMAF d’avril 2022, en attendant un nouveau rehaussement par décret de cette base en avril 2023, tout en élargissant le périmètre actuel des familles éligibles.
Déconjugaliser et revaloriser l'allocation aux adultes handicapés
Porter à 400 euros le chèque énergie pour les ménages qui ont bénéficié du chèque de 100 euros cette année
Mettre en place une assurance universelle sur les loyers
Insérer des conditions sociales et environnementales pour bénéficier des aides publiques