« Supprimer le droit du sol et limiter l’accès à la nationalité à la seule naturalisation sur des critères de mérite et d’assimilation ».
Le principe d’attribution de la nationalité française (celle que l’on obtient à la naissance) depuis la loi de 1889 est le double droit du sol : est français celui ou celle qui est né sur un territoire français et dont un parent est également né sur un territoire français. De plus, l’enfant d’un Français est français, quel que soit son lieu de naissance (droit du sang).
En complément de ces principes, un enfant né et ayant vécu au moins cinq ans en France de parents tous deux nés à l’étranger peut devenir français à sa majorité s’il a sa résidence habituelle en France. Une loi de 2016 a élargi l’accès à la nationalité française par le droit du sol, en ouvrant la nationalité française à leur majorité, aux personnes vivant sur le territoire français « depuis l’âge de six ans et ayant suivi leur scolarité obligatoire en France lorsqu’elles ont un frère ou une sœur ayant acquis la nationalité française« . Cette loi crée une sorte de droit du sol dérivé, indirect, transmis par le lien de fratrie, qui ne nécessite pas d’être né sur le territoire français, mais d’avoir un frère ou sœur devenu lui-même français par le droit du sol.
La candidate propose de supprimer le droit du sol. Cette mesure peut être réalisée par une modification de la législation : il revient au législateur de fixer les conditions d’acquisition de la nationalité française par l’effet de la naissance sur le territoire français. En l’absence de principe constitutionnel qui protégerait un droit du sol automatique, cette évolution ne devrait pas appeler d’évolution de la Constitution.
Le cadre général de l’immigration
Il existe, en droit, quatre grandes catégories d’immigration :
- l’immigration dite « économique » ou de travail (un étranger vient exercer une activité professionnelle en France – on peut y inclure les étudiants) ;
- l’immigration familiale (regroupement) ;
- l’asile (ou protection subsidiaire) ;
- l’immigration irrégulière.
S’y ajoute par ailleurs la délivrance des titres de séjour au titre de la présence étudiante.
Aux termes de la décision du Conseil constitutionnel du 13 août 1993 : « Aucun principe non plus qu’aucune règle de valeur constitutionnelle n’assure aux étrangers des droits de caractère général et absolu d’accès et de séjour sur le territoire national ». L’étranger se trouve par définition dans une situation différente du national. Les étrangers hors citoyens de l’Union sont soumis, pour leur entrée et leur séjour en France, à un régime de police administrative.
Ainsi, si des motifs tirés des nécessités de l’ordre public et de l’intérêt de la défense nationale peuvent légalement justifier un refus de carte de séjour (CE, 22 juillet 1977, Mytteis-Hager), le juge administratif exerce en la matière un contrôle normal (c’est-à-dire qu’il regarde de près la proportionnalité entre la mesure de police administrative et le motif invoqué), y compris sur le point de savoir si la présence de l’intéressé en France constitue une menace pour l’ordre public (CE, Section, 17 octobre 2003, Bouhsane).
Une fois autorisés à séjourner et à travailler, les intéressés ne peuvent faire l’objet d’une mesure d’éloignement que pour des motifs d’ordre public.
Le Conseil d’État veille à ce que les arrêtés d’expulsion soient motivés en la forme comme l’exige la loi du 11 juillet 1979 (CE, Section, 24 juillet 1981, Belasri), même lorsqu’ils sont pris suivant la procédure d’urgence absolue (CE, Section, 13 janvier 1988, Albina).
Une étape supplémentaire dans la protection des étrangers a été franchie depuis que le Conseil d’État a jugé que l’article 8 de la CEDH sur le droit au respect de la vie familiale doit être appliqué par l’administration lorsqu’elle enjoint à un étranger de quitter le territoire national. Le juge administratif exerce un contrôle de proportionnalité entre la mesure portant atteinte au droit à la vie familiale et l’intérêt public à éloigner l’intéressé (CE, Assemblée, 19 avril 1991, Belgacem).
Il est loisible au législateur de définir un cadre plus restrictif. Il lui est même loisible, en ce qui concerne les étrangers présents sur le sol national, de modifier dans un sens plus restrictif le droit au séjour qui leur est accordé. Seule l’existence d’exigences constitutionnelles ou conventionnelles (c’est-à-dire garanties par un traité ou une convention internationale) comme le droit d’asile ou celui de mener une vie familiale normale peut borner l’intervention du législateur.
La marge de manœuvre juridique est faible en matière d’immigration familiale et d’asile, c’est-à-dire que les obstacles juridiques sont très difficilement surmontables. De son côté, l’immigration de travail peut être régulée.
Le durcissement des conditions du droit du sol sur l’ensemble du territoire national
Le principe d’attribution de la nationalité française (celle que l’on obtient à la naissance) depuis la loi de 1889 est le double droit du sol : est français celui ou celle qui est né sur un territoire français et dont un parent est également né sur un territoire français. De plus, l’enfant d’un Français est français, quel que soit son lieu de naissance (droit du sang). Toutefois, un enfant né et ayant vécu au moins cinq ans en France de parents tous deux nés à l’étranger peut devenir français à sa majorité s’il a sa résidence habituelle en France. Cette reconnaissance de nationalité française a été subordonnée de 1993 à 1998, date d’application des lois Pasqua-Debré à une demande préalable, elle est désormais automatique (sauf refus par l’intéressé), ou à partir de l’âge de 13 ans si ses parents en font la demande et si l’enfant réside en France depuis l’âge de huit ans.
La loi du n° 2016-274 du 7 mars 2016 relative au droit des étrangers en France élargit par son article 59 l’accès à la nationalité française par le droit du sol, en ouvrant la nationalité française à leur majorité, aux personnes vivant sur le territoire français « depuis l’âge de six ans et ayant suivi leur scolarité obligatoire en France lorsqu’elles ont un frère ou une sœur ayant acquis la nationalité française ». Cette loi crée une sorte de droit du sol dérivé, indirect, transmis par le lien de fratrie, qui ne nécessite pas d’être né sur le territoire français, mais d’avoir un frère ou sœur devenu lui-même français par le droit du sol.
Le droit du sol a été adapté pour éviter l’afflux de femmes sur le point d’accoucher en provenance des Comores. Depuis la loi du 10 septembre 2018, pour qu’un enfant né à Mayotte puisse demander la nationalité française à raison de sa naissance et de sa résidence en France, il faut que l’un des parents réside en France de manière régulière et ininterrompue depuis plus de trois mois au moment de sa naissance. Il s’agit d’une condition supplémentaire par rapport au droit commun, validée par une décision du Conseil constitutionnel (1). Ce texte a été pris afin de limiter le nombre de femmes venant accoucher à Mayotte dans l’espoir que leur enfant devienne Français.
Un retour à l’état du droit instauré en 1993, afin de revenir sur le caractère automatique du droit du sol, n’est pas impossible : le Conseil constitutionnel, dans sa décision DC n° 93-321 du 20 juillet 1993 statuant sur la constitutionnalité de la loi ayant supprimé le caractère automatique de l’acquisition de la nationalité, a considéré en effet que le législateur pouvait très bien sans porter atteinte à tout principe de valeur constitutionnelle édicter une condition pour acquérir la nationalité française par l’effet de la naissance sur le territoire français. Il n’y a donc pas de principe constitutionnel qui protégerait un droit du sol automatique.
La condition de résidence d’au moins cinq ans depuis l’âge de onze ans, pour acquérir automatiquement la nationalité française à l’âge de 18 ans lorsqu’on naît de parents étrangers en France, pourrait également être rallongée, sans obstacle juridique.
Un durcissement du régime du droit du sol impliquerait de revenir, via le législateur, sur la loi du 7 mars 2016 (cf. supra). La mesure proposée par la candidate pourrait donc être mise en œuvre par une disposition législative.
Enfin, il convient de souligner que même si le droit du sol n’a pas été consacré par le Conseil constitutionnel comme un principe fondamental reconnu par les lois de la République, la pleine suppression du droit du sol pourrait présenter un risque d’inconstitutionnalité.
Historique de la mesure
En 1993, le gouvernement Balladur fait adopter une loi qui prévoit l’obligation de rédiger une lettre de motivation pour devenir Français pour les personnes nées en France de parents étrangers (loi n° 93-933 du 22 juillet 1993 réformant le droit à la nationalité, article 11 qui modifie l’article 44 du code de la nationalité). Le Gouvernement est revenu sur cette mesure en 1998 (loi n° 98-170 du 16 mars 1998 relative à la nationalité, article 2, qui modifie l’article 21-7 du code civil).
Dans la perspective des primaires de la droite et du centre pour l’élection présidentielle de 2017, Nicolas Sarkozy proposait un retour sur la notion de droit du sol en matière d’acquisition de la nationalité française (cf. déclaration du 13 juin 2015 lors de la première réunion des nouveaux adhérents aux Républicains).
Marine Le Pen, lors de la campagne de 2017 a proposé un ensemble de mesures concernant l’immigration dont la suppression du droit du sol sur l’ensemble du territoire national.
Benchmark
Le droit migratoire et d’acquisition de la nationalité diffère grandement d’un pays à l’autre.
Dans un pays comme les États-Unis, le droit du sol est intégral et automatique ; toutefois, l’immigration peut facilement être régulée, et le pays a pu édicter par le passé des quotas migratoires par pays.
Dans un pays comme l’Allemagne de tradition de droit du sang, un droit du sol – restrictif – a été introduit dans le code de nationalité depuis le 1er janvier 2000. Les enfants étrangers nés sur le territoire allemand, de parents étrangers également nés en Allemagne et y ayant vécu de façon durable, sont allemands à leur naissance.
(1) Décision n° 2018-770 DC du 6 septembre 2018.
Mettre fin à l’accueil des mineurs non accompagnés
Réserver le RSA et les prestations de solidarités aux étrangers ayant travaillé au moins 5 ans en France
Renvoyer les étrangers sans emploi depuis un an
Réformer la politique de l’asile
Accorder les prestations familiales aux seuls foyers dont au moins un des parents est français
Faire un référendum sur l'immigration
Restreindre l’immigration familiale
Interdire la régularisation des clandestins