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Marine Le Pen
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BIOGRAPHIE

Marine Le Pen est une avocate et femme politique française. Elle est la candidate du Rassemblement national à l’élection présidentielle de 2022.


Née en 1968, elle est diplômée d’une maîtrise de droit et d’un DEA de droit pénal de l’Université Panthéon-Assas. Elle devient avocate au barreau de Paris en 1992. En 1998, elle pilote la création du service juridique du Front national, parti fondé par son père Jean-Marie Le Pen.

Elle est élue conseillère régionale de la région Nord-Pas-de-Calais et occupe ce poste de 1998 à 2004 puis de 2010 à 2015. Elle est également élue conseillère régionale d’Île-de-France entre 2004 et 2010, puis conseillère régionale des Hauts-de-France de 2016 à 2021. Elle est députée de la circonscription du Pas-de-Calais depuis 2017. En 2004, elle est élue députée européenne puis réélue en 2009 et en 2014.

En 2007, elle prend en charge la direction stratégique de la campagne à l’élection présidentielle de Jean-Marie Le Pen  et en 2011, elle lui succède à la direction du parti. Elle se présente à l’élection présidentielle d’abord en 2012, puis en 2017 où elle atteint le second tour face à Emmanuel Macron. En 2018, le Front national devient le Rassemblement national.

En janvier 2020, elle annonce sa candidature à l’élection présidentielle de 2022 et renonce en juillet 2021 à la direction du parti pour se consacrer à sa campagne.
Site de campagne

Mettre fin à l’accueil des mineurs non accompagnés

« Je réformerai la politique de l’asile qui coûte une fortune à notre pays : les demandes d’asile seront faites depuis les ambassades de France à l’étranger et je mettrai fin à l’accueil des mineurs non accompagnés ». 

Source : programme de Marine Le Pen

Estimation
Économie par an
Par l'Institut Montaigne
1,2 Md€
1,2 Md€ estimation basse
2,1 Md€ estimation haute
Précision
Par la candidate
Pour faire voter au référendum le projet de loi envisagé, contenant des modifications législatives et une révision constitutionnelle, la candidate devra suivre les procédures d’adoption, relativement longues, décrites aux articles 11 et 89 de la Constitution.

Au même titre que le droit d’asile, les mineurs non accompagnés représentent pour Marine Le Pen une forme d’immigration illégale à combattre. Selon la candidate, ces jeunes isolés sont souvent majeurs, sont inexpulsables et exploitent le système français de protection pour faire venir leur famille en France au nom du regroupement familial. Elle avait émis l’idée de les renvoyer dans leur pays d’origine en raison de la criminalité qu’ils génèrent à ses yeux et de leur coût financier qu’elle juge exorbitant (1). Elle prévoit aujourd’hui de mettre fin à leur accueil à l’aide nouvelles restrictions qu’elle envisage d’inscrire dans la Constitution, en faisant voter une révision constitutionnelle par la voie du référendum.

La mesure de la candidate provient du fait que les mineurs isolés étrangers qui accèdent au territoire français, légalement ou clandestinement, sont automatiquement pris en charge par l’État et ne peuvent faire l’objet d’une mesure d’éloignement en vertu du droit interne (2), conformément au principe de l’intérêt supérieur de l’enfant proclamé par la Convention européenne des droits de l’homme et la Convention internationale des droits de l’enfant. Dans sa décision du 21 mars 2019 consacrant l’exigence de protection de l’intérêt supérieur de l’enfant, le Conseil constitutionnel a posé que tout jeune se présentant comme mineur isolé est présumé l’être tant que l’évaluation administrative de sa situation n’est pas terminée (3). À cet égard, un peu plus de 50 % des jeunes ne sont pas considérés comme mineurs à l’issue du processus d’évaluation de leur âge (4).

Concernant la délinquance associée à ces mineurs, un rapport d’information du Sénat (5), publié le 29 septembre 2021, pointe un véritable sujet de préoccupation pour les pouvoirs publics et constate une augmentation des infractions commises par ces mineurs depuis 2016, qui sont de plus en plus graves et violentes. Cependant, le Sénat met en garde contre les rapprochements inexacts entre MNA et délinquance  : une très grande majorité des faits de délinquance commis par des mineurs étrangers ou des personnes se présentant comme tels ne sont pas le fait de MNA pris en charge par l’État (à travers l’Aide Sociale à l’Enfance) – dont seuls 5 à 10 % font l’objet de mesures pénales – mais plutôt de « jeunes en errance » présentant un profil sociologique distinct (6).

Da façon plus générale, la Cour des comptes estime dans un rapport du 8 octobre 2020 qu' »il n’existe pas, aujourd’hui, d’étude rigoureuse qui rapporterait la situation des MNA à celle de l’immigration et de la demande d’asile. S’il semble établi que les trois phénomènes ne sont pas sans lien, il est plus hasardeux, au vu des données disponibles, d’esquisser des relations de cause à effet entre les trois situations« .

Commentaire sur le chiffrage des mesures 

Un mineur non accompagné (MNA) ou mineur isolé étranger (MIE) est un enfant de moins de 18 ans, de nationalité étrangère, arrivé sur le territoire français sans être accompagné par l’un ou l’autre des titulaires de l’autorité parentale ou par un représentant légal. Lorsqu’un jeune migrant arrive en France sans adulte référent, il est d’abord mis à l’abris puis sa minorité est évaluée (entretiens, documents d’identité, examen médical dans certains cas). S’il est reconnu comme MNA, il est inscrit à l’aide sociale à l’enfance (ASE) qui est prise en charge par le département. Si sa minorité n’est pas reconnue (ce qui est le cas dans 55 % des cas (7)), il peut tenter une procédure de recours devant le juge des enfants puis demander l’asile.

Au 31 décembre 2020, 23 461 mineurs non accompagnés étaient pris en charge par les conseils départementaux. En 2020, 27,7 % des mineurs confiés à l’ASE étaient des mineurs non accompagnés (8). Les financeurs des programmes d’accueil des MNA sont principalement les départements et, dans une moindre mesure, l’État qui octroie parallèlement une aide financière à la collectivité pour alléger la charge supplémentaire imposée aux ASE. Le coût annuel de la prise en charge des MNA par les départements est estimé entre 1,1 et 2,1 Md€ (9) par an, auquel s’ajoutent la participation de l’État à la gestion locale qui s’élève à 120 millions d’euros. Une addition des dépenses des départements et de l’État nous conduit à une estimation de 1,2 à 2,1 Md€ par an.

Difficultés de mise en œuvre des mesures

La mise en pratique de cette mesure drastique sur la gestion des mineurs non accompagnés vont se heurter à des obstacles d’ordre juridique et pratique :

D’une part, les révisions constitutionnelles en France répondent à une procédure relativement lourde fixée à l’article 89 de la Constitution, qui exige l’assentiment des 3/5e du Parlement réuni en congrès avant d’être soumises au referendum. Si la candidate peut tenter de contourner l’accord du Parlement et du Conseil constitutionnel en passant par l’article 11 de la Constitution, relatif aux projets de loi référendaires, cette démarche n’est pas garantie au regard des controverses entourant l’usage de cet article pour des révisions constitutionnelles, plus jamais utilisé à cet effet depuis le Général De Gaulle.

D’autre part, la marge de manœuvre de la France sur ce sujet est contrainte par ses engagements internationaux. Depuis 2013, l’Union européenne a fixé des règles communes relatives à l’accueil et au traitement des mineurs étrangers non accompagnés dans ses directives 2013/32/UE et 2013/33/UE, auxquelles s’accompagnent la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, qui protège l’intérêt supérieur de l’enfant à son article 24. Par ailleurs, la France a reconnu a reconnu un effet direct devant les juridictions nationales à la Convention internationale sur les droits de l’enfant (CIDE) des Nations unies 1989, texte fondateur en matière de protection de l’enfance.

Impact macroéconomique

Les modalités et procédures d’accueil liées à la politique du droit d’asile n’influe que très peu sur l’économie structurelle du pays.

(1) Le Figaro, Immigration: Marine Le Pen veut renvoyer les mineurs isolés dans leur pays d’origine, 29/09/2020.

(2) Le CESEDA pose une interdiction d’éloignement des mineurs isolés étrangers : interdiction de prononcer une obligation de quitter le territoire français (article L. 511-4-1° du CESEDA), d’ordonner une expulsion (article L. 521-4 du CESEDA) ou de condamner un mineur étranger à une peine d’interdiction du territoire français (article 20-4 de l’ordonnance du 2 février 1945 relative à l’enfance délinquante).

(3) Décision n° 2018-768 QPC du 21 mars 2019.

(4) Bourgi Hussein, Burgoa Laurent, Iacovelli Xavier et Leroy Henri, Rapport d’information n° 854 (2020-2021) fait au nom de la commission des lois et de la commission des affaires sociales du Sénat, « Mineurs non accompagnés, jeunes en errance : 40 propositions pour une politique nationale », 29 septembre 2021.

(5) Ibid.

(6) Ces jeunes sont en moyenne plus âgés que les MNA recueillis, avec une proportion importante de jeunes en réalité majeurs, et proviennent principalement des pays d’Afrique du Nord. Surtout, ils ne sont le plus souvent pas pris en charge par l’ASE et ne s’inscrivent dans aucun parcours d’insertion.

(7) Bourgi Hussein, Burgoa Laurent, Iacovelli Xavier et Leroy Henri, Rapport d’information n° 854 (2020-2021) fait au nom de la commission des lois et de la commission des affaires sociales du Sénat, « Mineurs non accompagnés, jeunes en errance : 40 propositions pour une politique nationale », 29 septembre 2021.

(8) Ibid.

(9) Il s’avère toutefois difficile de retracer avec précision les dépenses d’aide sociale à l’enfance directement imputables aux MNA.

Au 31 décembre 2020, 23 461 mineurs non accompagnés étaient pris en charge par les conseils départementaux. Ce chiffre a évolué de 80 % entre 2016 et 2020 après avoir doublé entre 2014 et 2016. Selon l’Assemblée des départements de France (ADF), les MNA représentent aujourd’hui entre 15 % et 20 % des mineurs pris en charge par l’ASE.

En France, le financement de la politique d’accueil des mineurs non accompagnés (MNA) incombe majoritairement aux départements. Pour les années 2018 et 2019, l’Assemblée des départements de France (ADF) évalue à environ 2 milliards d’euros les dépenses annuelles globales des départements liées à la prise en charge des MNA par l’aide sociale à l’enfance (ASE). Selon un rapport du Sénat de 2021 (1), il s’agit là d’une estimation large  : l’ADF évalue en effet à 50 000 euros par an et par jeune le coût global de la prise en charge d’un jeune par l’ASE, pour un effectif estimé de 40 000 MNA au cours de ces années. Or comme l’indiquent les sénateurs, le tarif journalier d’hébergement des mineurs pris en charge par l’ASE est très variable et évolutif, et le chiffre de 50 000 euros par an est probablement surévalué.

L’État ne dispose toutefois d’aucune évaluation nationale du coût moyen de l’accueil d’un mineur non accompagné. En se basant sur les statistiques plus restrictives de la direction générale de la cohésion sociale (DGCS) sur les effectifs, qui font apparaître une moyenne de 22 000 mineurs non accompagnés pris en charge sur les cinq dernières années, les dépenses annuelles totales des départements s’élèveraient à 1,1 milliard d’euros (2). Les chiffres de l’ADF paraissent d’autant plus surévalués que l’Inspection générale des affaires sociales (IGAS) rappelle que 28 % des MNA admis à l’ASE sont en réalité pris en charge à l’hôtel, dispositif supposé transitoire dont le coût journalier est d’environ 75 euros soit 25 000 euros annuels par MNA, ce qui représente la moitié du coût de prise en charge formelle d’un jeune par l’ASE, selon le chiffrage de l’ADF.

En tout état de cause, comme le rappelle la Cour des comptes dans un référé du 8 octobre 2020, il est difficile de retracer avec précision les dépenses d’aide sociale à l’enfance directement imputables aux MNA en raison de l’absence de comptabilité analytique dans la majorité des départements, qui les empêche en effet de distinguer ce qui relève des MNA dans leurs dépenses.

Le principal financeur de la politique d’accueil des MNA reste donc le département mais l’État intervient également à deux phases du processus d’accueil  : en « amont », de manière forfaitaire, avant une éventuelle reconnaissance de minorité et en « aval », une fois que le jeune reconnu mineur est placé auprès de l’aide sociale à l’Enfance (ASE). Devant le développement du phénomène des MNA à partir de 2016, les crédits alloués par l’État, portés par la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances » des lois de finances, ont visé à alléger la charge des départements relative à la phase initiale d’évaluation de la minorité et de la mise à l’abri des jeunes, mais aussi à la contrainte supplémentaire pesant sur l’ASE. Au total, les crédits de l’État ouverts pour 2021 au titre des MNA s’élèvent à 120 millions d’euros, ce qui représente un recul de 25,7 % par rapport à la loi de finances initiale (LFI) pour 2020, après une augmentation de 14,7 % entre 2019 et 2020. La participation financière de l’État baisse dans ses deux composantes, comme le retrace le tableau ci-dessous (3).

Titre : Évolution des crédits et des dépenses de l’État au titre des mineurs non accompagnés (en millions d’euros)

LFI pour 2019 Exécution 2019 LFI pour 2020 Exécution 2020 LFI
pour 2021
Montant de la participation « amont » (évaluation et mise à l’abri) 74 M€ 93,2 M€ 115 M€ 50 M€ 103 M€
Montant de la participation « aval » (aide exceptionnelle au titre des dépenses d’ASE) 67,2 M€ 33,7 M€ 47 M€ 15,8 M€ 17 M€
Total des crédits demandés / dépensés au titre des MNA 141,2 M€ 126,9 M€ 162 M€ 65,8 M€ 120 M€

Source  : Mission d’information du Sénat (2021)

En « amont », l’État octroie aux départements une participation forfaitaire à la phase d’évaluation et de mise à l’abri. Depuis un accord intervenu le 17 mai 2018 entre le Gouvernement et l’Assemblée des départements de France (ADF) renforçant l’appui de l’État aux départements, ces derniers reçoivent une aide de 500 euros par jeune au titre de son évaluation sociale et sanitaire et 90 euros par jeune et par jour, dans la limite de quatorze jours, puis 20 euros par personne et par jour dans la limite de neuf jours complémentaires (4). Cela représente un montant total de 1940 euros par jeune (contre 1250 euros sous le régime antérieur). En « aval », l’État octroie, depuis l’aggravation des coûts liés aux MNA en 2017, une contribution exceptionnelle dégressive aux dépenses d’ASE des départements ayant subi une pression supplémentaire (5). Le montant total de cette contribution avait été fixé à 12 000 euros par jeune supplémentaire pris en charge par l’ASE, le total dépensé s’élevant à 96,2 millions d’euros cette année-là. Cette contribution partielle de l’État a été reconduite les années suivantes mais réduite de 50 %, passant à 6 000 euros par jeune en 2019 (33,7 millions d’euros de dépenses totales) et 2020 (15,8 millions d’euros de dépenses au total dû à la baisse du nombre de MNA).

En conclusion, le coût de prise en charge des mineurs non accompagnés peut être estimé, en additionnant les dépenses des départements et de l’État et selon que l’on retienne le coût des MNA estimé par le Sénat ou déclaré par l’ADF, à un budget variant entre respectivement 1,2 Md€ et 2,1 Md€. Il convient par ailleurs de noter que si la candidate évoque la possibilité, sans la documenter, d’arrêter l’arrivée de nouveaux mineurs non accompagnés sur le territoire, les dépenses liées aux mineurs déjà présents sur le territoire et pris en charge par l’ASE seront toujours présentes.

Historique de la mesure

Les réglementations relatives aux MNA en France vont dans le sens d’une plus grande prise en charge et protection de ces derniers, dans le sens des accords internationaux ratifiés en la matière. Depuis 1989, les MNA sont protégés à l’échelle internationale, au même titre que les autres mineurs, par la Convention internationale sur les droits de l’enfant (CIDE) ratifiée par la France le 7 août 1990. Le Conseil d’État a exceptionnellement reconnu à cette convention un effet direct ce qui implique la possibilité de se prévaloir directement de ses dispositions devant les tribunaux, sans besoin de texte de transposition. En particulier, l’article 20 de cette convention impose aux États de prendre des mesures adéquates (protection et aide spéciale) afin de protéger l’enfant privé de son milieu familial. À ce titre, le Comité des droits de l’enfant indique que les États doivent notamment « pleinement respecter leurs obligations en matière de non-refoulement » (6).

En France, un mineur n’a pas à justifier d’un titre de séjour. Pour cette raison, il ne peut être considéré en situation irrégulière et ne peut donc pas faire l’objet d’une mesure d’éloignement (reconduite à la frontière ou placement en rétention). Sur le territoire français, les MNA relèvent donc des dispositions de l’article 375 du code civil et L. 221-1 du Code de l’Action Sociale et des Familles sur l’enfance en danger et peuvent être fondés à demander l’asile et à obtenir une protection internationale. Depuis 2007, les missions de l’aide sociale à l’enfance (ASE) visent spécifiquement la prise en charge des MNA à l’article L112-3 CASF (7).

En 2013, le droit européen s’est emparé de la question et a fixé des règles communes aux États membres relatives à l’accueil et au traitement des mineurs étrangers non accompagnés à l’article 24 de la directive 2013/33/UE et à l’article 25 de la directive 2013/32/UE qui prévoit des garanties spécifiques pour les mineurs non accompagnés dans le cadre de la procédure de demande d’asile. La même année, une circulaire de la Ministre de la justice (Circulaire Taubira du 31 mai 2013) a mis en place un système de répartition des MNA par département, piloté par une cellule nationale dépendant de la protection judiciaire de la jeunesse (PJJ). Par la suite, la loi du 14 mars 2016 relative à la protection de l’enfant a permis l’inscription de ce dispositif de mise à l’abri, d’évaluation et d’orientation dans le Code de l’Action Sociale et des Familles (art 48- L221-2-2 du CASF) et dans le Code Civil (art 49- 375-5 du CC).

S’agissant de la procédure d’accueil des MNA lors de leur arrivée sur le territoire, celle-ci a été précisée par le Décret n°2016-840 du 24 juin 2016 pris en application de l’article L. 221-2-2 du CASF et relatif à l’accueil et aux conditions d’évaluation de la situation des mineurs privés temporairement ou définitivement de la protection de leur famille. Le placement du jeune à l’ASE dépend de la décision du Procureur de la République saisi par le conseil départemental après une première évaluation par ce dernier de la situation du jeune pour confirmer sa minorité. En cas d’incertitude sur la minorité du jeune et en l’absence de documents d’identité, la loi n°2016-297 sur la protection de l’enfance a validé la possibilité de recourir à des examens radiologiques osseux aux fins de détermination de l’âge (8).

Le mineur non accompagné peut également bénéficier de la protection de l’asile. En effet, s’il estime être en danger d’être persécuté « du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques« , il peut solliciter l’asile au titre de la Convention de Genève. À cet égard, la loi n°2015-925 du 29 juillet 2015 relative à la réforme du droit d’asile a validé la possibilité, dans des cas restreints, du maintenir des mineurs non accompagnés en zone d’attente, comme elle a validé le principe de placement en rétention d’enfant.

Benchmark

En octobre 2021, la division de la législation comparée du Sénat a publié une étude sur le traitement des mineurs étrangers non accompagnés dans sept pays européens (Allemagne, Belgique, Espagne, Italie, Pays-Bas, Royaume-Uni, Suède). Il en ressort les éléments suivants  :

S’agissant d’abord de la procédure de détermination de l’âge, dans l’ensemble des pays étudiés, celle-ci commence par l’examen des documents d’identité et un entretien avec l’individu. Le recours à des examens médicaux n’est pas systématique et n’intervient que dans un second temps, en cas de doute sur l’âge déclaré par le supposé mineur, et avec son accord. Le Royaume-Uni se distingue par l’impossibilité pour les autorités d’exiger une investigation médicale, même si des rapports médicaux peuvent être fournis par le demandeur lui-même. La procédure néerlandaise exige quant à elle une recherche préalable du mineur dans les autres États membres de l’UE avant d’entamer une évaluation médicale. En Italie et en Espagne, seuls les parquets des mineurs et, en Belgique, le service des Tutelles du ministère de la justice peuvent exiger une évaluation médicale, tandis qu’elle relève de la responsabilité de l’Office de la jeunesse en Allemagne et des services de l’immigration aux Pays-Bas et en Suède. Dans tous les pays, conformément au droit de l’UE, en cas de doute persistant à l’issue de la procédure, une présomption de minorité s’applique.

En matière d’accueil et de prise en charge, deux tendances peuvent être identifiées selon que les garanties mises en œuvre relèvent principalement du droit de la protection de l’enfance (Allemagne, Espagne, Royaume-Uni) ou du droit des étrangers (Belgique, Italie, Pays-Bas, Suède). Dans tous les cas, les mineurs se voient assigner un tuteur et ont droit à un hébergement et à la prise en charge de leurs besoins en nourriture, habillement, hygiène personnelle et soins de santé, souvent dans des conditions plus favorables que les adultes demandeurs d’asile. Certains pays, à l’instar de l’Allemagne, de la Belgique et des Pays-Bas, ont mis en place des centres d’accueil spécialisés pour les mineurs isolés, notamment durant la phase de premier accueil et d’orientation. Aux Pays-Bas, en Suède et au Royaume-Uni, il existe un lien étroit entre la procédure de demande d’asile et le parcours de prise en charge des mineurs isolés. À l’inverse, en Espagne, le dépôt d’une demande d’asile par les mineurs étrangers hébergés dans des centres de protection de l’enfance est rare et l’assistance juridique peu développée.

À l’exception des Pays-Bas, les collectivités territoriales sont généralement en première ligne pour assurer la prise en charge des mineurs isolés, que ce soit au niveau communal (Allemagne, Italie, Suède et Royaume-Uni), régional (Espagne) ou dans une moindre mesure communautaire (Belgique). À l’image de la France, des remboursements ou des subventions sont ainsi versés par l’État aux collectivités concernées, à travers des mécanismes pérennes de financement (Allemagne, Belgique, Italie, Suède) ou de façon ponctuelle, en cas d’afflux de mineurs isolés (Espagne). Enfin, l’Allemagne, la Suède et le Royaume-Uni ont mis en place des procédures de répartition des mineurs isolés sur le territoire national afin de partager de façon plus équitable la charge relative à l’accueil de ce public, tout comme en France à partir de 2013.

Pour une idée de la différence de financement et des coûts de la prise en charge des mineurs isolés entre ces pays, l’étude du Sénat révèle les données suivantes  :

  • En Allemagne, où les dépenses sont principalement assumées par les Länder, qui remboursent les dépenses engagées par les offices de la jeunesse des communes pour les MNA, les coûts d’hébergement varient très fortement entre Länder  : de 149 euros à 215 euros par jour durant la prise en charge provisoire et de 151 euros à 218 euros durant la prise en charge régulière. Dans le cadre de son soutien, l’État fédéral a versé chaque année aux Länder, entre 2016 et 2019, une compensation forfaitaire pour les mineurs étrangers non accompagnés de 350 millions d’euros.
  • En Belgique, l’agence fédérale pour l’accueil des demandeurs d’asile reçoit une dotation de l’État de 410,7 millions d’euros, auxquels s’ajoutent près de 8,6 millions d’euros provenant de sources européennes et de recettes diverses.
  • Au Pays-Bas, le ministère de la justice et de la sécurité a versé à Nidos (institution indépendante agréée assurant la tutelle des mineurs étrangers isolés), au titre de l’accueil des mineurs isolés, une somme de 130 millions d’euros en 2018, de 91 millions d’euros en 2019 et de 75 millions d’euros en 2020. Le budget total de l’agence COA, qui accueille environ 20 % de l’ensemble des mineurs isolés, s’élevait à 807 millions d’euros en 2020. Le coût annuel moyen de la prise en charge d’un mineur étranger isolé par Nidos est estimé à 24 950 euros dans le budget de l’État pour 2020 et 2021234.
  • Au Royaume-Uni, le Home Office verse aux collectivités locales une aide au titre de l’accueil d’un mineur non accompagné. Les montants pour l’année courant du 1er avril 2020 au 31 mars 2021 sont étaient de £143 par personne et par nuit pour une collectivité locale atteignant ou dépassant le seuil de 0,07 % de MNA dans la population mineur (environ 164 euros) et £114 par personne et par nuit pour une collectivité locale en-deçà du seuil de 0,07 % (environ 131 euros).
  • En Suède, l’Office des migrations accorde des aides importantes aux communes et acteurs locaux pour les dédommager des coûts supplémentaires engendrés par l’accueil des MNA. Le budget de l’Office en 2019 s’est élevé à environ 24 milliards SEK (2,36 milliards d’euros) pour une dépense réalisée, la même année, de 22,1 milliards SEK (2,18 milliards d’euros). Pour compenser les frais engagés au titre de l’asile, l’Office des migrations a ainsi versé plus de 15,2 milliards SEK (1,5 milliard d’euros) en 2019 aux municipalités et aux régions. Ce montant était de 25,5 milliards SEK en 2018 (2,52 milliards d’euros) et de plus de 42,3 milliards SEK en 2017 (4,18 milliards d’euros). Selon les termes du règlement sur la compensation de l’État pour les demandeurs d’asile, à titre d’exemple, une commune qui est municipalité d’arrivée pour un mineur isolé peut recevoir une aide de 3 000 SEK par enfant et par jour (environ 297 euros) le temps que l’Office statue sur la municipalité d’accueil du demandeur.

Mise en œuvre

Marine Le Pen envisage de faire passer ses mesures sur le contrôle de l’immigration, comprenant celles sur le droit d’asile et les mineurs non accompagnés, par la voie du référendum. Dans la partie de son programme relative à l’immigration, elle propose un projet de loi fictif intitulé « Citoyenneté, Identité, Immigration » qui inclut des révisions d’articles de la Constitution ainsi que des modifications de dispositions législatives. Ses mesures sur les MNA figurent à l’article 1er du titre 1er du projet de loi envisagé, qui prévoit de compléter l’article 34 de la Constitution.

La procédure de révision de la Constitution de 1958 est définie à l’article 89. L’initiative de la révision revient soit au Président de la République sur proposition du Premier ministre (projet de révision), soit aux membres du Parlement (proposition de révision). Dans les deux cas, le texte de la révision doit être voté en termes identiques par l’Assemblée nationale et par le Sénat. Enfin, pour devenir définitive, la révision doit être obligatoirement approuvée par référendum lorsqu’il s’agit d’une proposition de révision constitutionnelle. En cas de projet de révision initié par le président de la République, le texte peut être approuvé par référendum ou par la majorité des 3/5e des suffrages exprimés des deux chambres du Parlement réunies en congrès. Quoiqu’il en soit, la révision constitutionnelle initiée dans le cadre de l’article 89 doit être approuvée par les deux chambres du parlement avant sa soumission au peuple français par référendum.

Cependant, il existe une voie spéciale de révision constitutionnelle issue de l’article 11 de la Constitution. Cette disposition permet au président de la République de soumettre directement à référendum tout projet de loi portant sur l’organisation des pouvoirs publics, sur des réformes relatives à la politique économique, sociale ou environnementale de la nation et aux services publics qui y concourent, ou tendant à autoriser la ratification d’un traité qui aurait des incidences sur le fonctionnement des institutions. L’article 11 permet au chef de l’État de contourner une éventuelle opposition des assemblées parlementaires, dont l’accord est obligatoire dans le cadre défini par l’article 89. La seule obligation faite au gouvernement est de présenter une déclaration du projet de loi devant chaque assemblée et d’en débattre avec elles. L’usage de cette procédure à des fins de révision constitutionnelle a suscité de nombreuses controverses quant à sa conformité même à la Constitution et n’a été utilisée que deux fois pour des révisions constitutionnelles (elle reste naturellement utilisée pour des projets de loi classiques) par le Général de Gaulle.

Par conséquent, si la candidate souhaite faire passer son projet de loi, qui intègre des révisions constitutionnelles, et le soumettre à référendum, elle devra normalement faire usage de l’article 89 de la Constitution. Si elle ne pense pas pouvoir obtenir l’accord des deux chambres du parlement sur son texte, elle pourra tenter d’utiliser l’article 11 pour soumettre directement son projet au vote des français mais cette procédure n’a plus été utilisée pour des révisions constitutionnelles depuis le Général de Gaulle et l’Assemblée du contentieux du Conseil d’État considère depuis longtemps que l’article 11 ne peut être utilisé pour modifier la Constitution. Quoiqu’il en soit, que ce soit pour la partie constitutionnelle ou législative de son projet de loi, la candidate devra justifier la compatibilité de ses dispositions avec le champ d’application limitativement défini de l’article 11, ce qui semble délicat concernant les sujets relatifs aux mineurs non accompagnés, qui n’ont pas de lien direct avec l’organisation des pouvoirs publics.

Il convient en outre de noter qu’en vertu de la jurisprudence du Conseil constitutionnel, les lois constitutionnelles échappent à tout contrôle de constitutionnalité, celui-ci se déclarant incompétent au regard de la souveraineté du pouvoir constituant. Par ailleurs, le Conseil constitutionnel est compétent pour contrôler la constitutionnalité des propositions de loi de l’article 11 (soumises par un cinquième des parlementaires soutenus par un dixième des électeurs) mais rien n’est précisé sur les projets de lois issus de cet article. En tout état de cause, aucune contestation postérieure du referendum n’est possible une fois qu’il a été voté par le peuple français souverain.

Le choix d’une révision constitutionnelle par la voie du référendum peut donc s’avérer nécessaire pour la candidate si elle souhaite faire passer ses mesures sur l’asile car cela lui permettrait de contourner non seulement le contrôle du Parlement mais aussi celui du Conseil constitutionnel, qui serait compétent dans le cas d’une loi. Des dispositions législatives portant ces mesures risquent en effet la censure par les membres du Conseil constitutionnel en vertu de la protection du droit d’asile par la Constitution alors qu’une révision constitutionnelle rendrait les modifications législatives postérieures conformes à la Constitution. En outre, une consécration constitutionnelle résisterait mieux aux changements législatifs futurs, dus par exemples à une résistance parlementaire ou à une alternance politique, ainsi qu’au contrôle de la Cour européenne des droits de l’Homme, bien qu’une révision constitutionnelle subséquente doit normalement être réalisée en cas d’opposition ferme de la Cour européenne, l’ordre juridique supranational de la CEDH étant théoriquement supérieur à l’ordre juridique interne.

(1) Bourgi Hussein, Burgoa Laurent, Iacovelli Xavier et Leroy Henri, Rapport d’information n° 854 (2020-2021) fait au nom de la commission des lois et de la commission des affaires sociales du Sénat, « Mineurs non accompagnés, jeunes en errance : 40 propositions pour une politique nationale », 29 septembre 2021.

(2) Ibid.

(3) Bourgi Hussein, Burgoa Laurent, Iacovelli Xavier et Leroy Henri, Rapport d’information n° 854 (2020-2021) fait au nom de la commission des lois et de la commission des affaires sociales du Sénat, « Mineurs non accompagnés, jeunes en errance : 40 propositions pour une politique nationale », 29 septembre 2021.

(4) Décret n° 2019-670 du 27 juin 2019 relatif à la participation forfaitaire de l’État à la phase de mise à l’abri et d’évaluation des personnes se déclarant mineures et privées temporairement ou définitivement de la protection de leur famille et arrêté du 28 juin 2019 pris pour son application.

(5) Cette contribution est octroyée pour 75 % des nouveaux mineurs non accompagnés dans un département sur une année.

(6) Le Défenseur des droits, Les mineurs non accompagnés au regard du droit, 2022.

(7) Cet article prescrit depuis 2007 la « prévention des difficultés que peuvent rencontrer les mineurs privés temporairement ou définitivement de la protection de leur famille et d’assurer leur prise en charge« .

(8) Médecins du monde, L’accès aux droits et aux soins des mineurs non accompagnés en France. Cadre légal et dysfonctionnements, 2017.

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