Marine Le Pen propose de « renvoyer les étrangers qui n’ont pas eu d’emploi pendant un an » et ne peuvent subvenir à leurs besoins. Elle estime que cette mesure permettrait d’économiser près 1,35 Md€ par an.
L’Institut Montaigne estime à 300 000 personnes le nombre de chômeurs étrangers en France, dont 109 000 chômeurs de longue durée. L’arrêt de l’allocation de retour à l’emploi au-delà d’un an pour ce public pourrait générer une économie médiane de l’ordre de 1,2 Md€ par an. Les « renvois » dans le pays d’origine implique néanmoins un coût, de l’ordre de 300 M€, réduisant d’autant le bénéfice financier de la mesure. Au total, l’économie annuelle serait de l’ordre de 0,9 Md€ par an.
Par ailleurs, la mise œuvre de la mesure pourrait se heurter à la protection constitutionnelle et internationale découlant du droit d’asile et du droit à la vie familiale normale.
Marine Le Pen estime que cette mesure rapporterait 5,4 Md€ sur le quinquennat.
Marine Le Pen propose de renvoyer les étrangers qui n’ont pas eu d’emploi pendant un an et ne peuvent subvenir à leurs besoins. Elle chiffre l’économie pour l’assurance chômage sur le quinquennat à 5,4 Md€ (1,35 Md€ par an sur quatre ans, en sachant que la candidate a annoncé qu’elle laisserait un délai de huit mois à un an aux personnes dans cette situation pour trouver un emploi) à raison de 90 000 chômeurs étrangers de longue durée pour un montant moyen d’indemnisation de 15 000 €.
L’analyse n’a pas permis de recouper l’ensemble des éléments servant au chiffrage. Par ailleurs, la candidate n’a pris en compte aucun coût tenant aux mesures d’éloignement.
Nombre de chômeurs étrangers de longue durée
En 2020, 2,351 millions de personnes en France représentant 8 % de la population active sont au chômage selon l’Insee. Le taux de chômage varie selon les catégories de population : il s’établit à 6,9 % pour les étrangers issus de l’Union européenne (45 000 personnes au chômage) et 18,4 % pour les étrangers hors de l’Union (255 000 personnes) (1).
Au total, le nombre de chômeurs étrangers peut ainsi être estimé à 300 000, dont 109 000 chômeurs de longue durée (soit 36,4 % des chômeurs étrangers) soit une hypothèse plus élevée que celle utilisée par la candidate (90 000).
Montant de l’indemnisation chômage
Le montant de l’indemnisation chômage varie en fonction du ou des salaires perçus au cours des 24 mois précédant la fin du contrat de travail (ou 36 mois pour les allocataires de 53 ans et plus).
Selon Pôle emploi (2), ce montant est de 15 000 € par an en moyenne pour l’ensemble de la population. Pour autant, les immigrés disposent d’un niveau de vie annuel moyen de 20 040 € contre 24 650 € pour l’ensemble de la population tenant à des revenus moins élevés. Par conséquent, le niveau de l’indemnisation pourrait se situer à un niveau inférieur. Ce niveau d’indemnisation se situerait, selon les hypothèses envisageables, entre 6 324 € et 13 116 € par an :
Hypothèse haute | Médiane 50% des allocataires percevaient moins de | 13 116 € |
Hypothèse médiane | 25% des allocataires percevaient moins de | 11 160 € |
Hypothèse basse | 5% des allocataires percevaient moins de | 6 324 € |
Montant de l’économie sur l’assurance chômage
L’économie réalisée sur l’assurance chômage serait alors de :
En Md€ | |
Hypothèse haute | 1,4 |
Hypothèse médiane | 1,2 |
Hypothèse basse | 0,7 |
D’autres économies potentielles, par exemple sur les minima sociaux, sont exclues du chiffrage car traitées par d’autres mesures de la candidate, comme en matière d’allocations au logement.
Coût engendré par les « renvois » dans le pays d’origine
Il convient de prendre en compte le coût engendré par les « renvois » du fait de la perte d’un titre de séjour découlant d’une période de chômage de plus d’un an.
En 2019, 31 404 personnes (3) dont le titre de séjour avait expiré ont quitté le territoire en fonction des différents modes de départ. Par conséquent, le « renvoi » de 109 000 personnes étrangères ayant perdus leur emploi depuis plus d’un an aurait un impact très important sur le nombre de personnes à « reconduire ».
En 2019 | Nombre | En pourcentage |
Éloignements forcés | 18 906 | 60% |
Éloignements et départs spontanés | 7 231 | 23% |
Éloignements et départs aidés | 5 267 | 17% |
Total | 31 404 | 100% |
Les éloignements forcés et les départs aidés ont coûté en 2019 près de 90,6 M€ (4). En rapportant les coûts des éloignements par personne au nombre de personnes étrangères ayant perdu leur emploi depuis plus d’un an répartis selon les 3 voies de départ, le coût des éloignements serait de 315 M€ par an.
Montant de l’économie de l’ensemble de la mesure
Selon les hypothèses, l’économie obtenue serait alors seulement de :
En Md€ | |
Hypothèse haute | 1,1 |
Hypothèse médiane | 0,9 |
Hypothèse basse | 0,4 |
Mise en œuvre
L’article L. 421-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile prévoit expressément le renouvellement du titre de séjour pour un étranger se trouvant privé involontairement de son emploi pendant la période d’indemnisation par Pôle emploi. Lors du renouvellement suivant, s’il est toujours privé d’emploi, il est statué sur son droit au séjour pour une durée équivalente à celle des droits qu’il a acquis à l’allocation d’assurance mentionnée à l’article L. 5422-1 du code du travail.
Cette mesure viserait donc à modifier cet article par une loi.
Il faut tout de même prendre en compte les protections constitutionnelles et internationales dont bénéficient les étrangers.
Aux termes de la décision du Conseil constitutionnel du 13 août 1993 : « Aucun principe non plus qu’aucune règle de valeur constitutionnelle n’assure aux étrangers des droits de caractère général et absolu d’accès et de séjour sur le territoire national« . L’étranger se trouve par définition dans une situation différente du national. Les étrangers hors citoyens de l’Union sont soumis, pour leur entrée et leur séjour en France, à un régime de police administrative.
Ainsi, si des motifs tirés des nécessités de l’ordre public et de l’intérêt de la défense nationale peuvent légalement justifier un refus de carte de séjour (voir à ce sujet l’arrêt du Conseil d’État du 22 juillet 1977, Mytteis-Hager), le juge administratif exerce en la matière un contrôle normal (c’est-à-dire qu’il regarde de près la proportionnalité entre la mesure de police administrative et le motif invoqué), y compris sur le point de savoir si la présence de l’intéressé en France constitue une menace pour l’ordre public (Conseil d’État, Section, 17 octobre 2003, Bouhsane).
Une fois autorisés à séjourner et à travailler, les intéressés ne peuvent faire l’objet d’une mesure d’éloignement que pour des motifs d’ordre public.
Le Conseil d’État veille à ce que les arrêtés d’expulsion soient motivés en la forme comme l’exige la loi du 11 juillet 1979 (Conseil d’État, Section, 24 juillet 1981, Belasri), même lorsqu’ils sont pris suivant la procédure d’urgence absolue (Conseil d’État, Section, 13 janvier 1988, Albina).
Une étape supplémentaire dans la protection des étrangers a été franchie depuis que le Conseil d’État a jugé que l’article 8 de la CEDH sur le droit au respect de la vie familiale doit être appliqué par l’administration lorsqu’elle enjoint à un étranger de quitter le territoire national. Le juge administratif exerce un contrôle de proportionnalité entre la mesure portant atteinte au droit à la vie familiale et l’intérêt public à éloigner l’intéressé (Conseil d’État, Assemblée, 19 avril 1991, Belgacem).
Il est loisible au législateur de définir un cadre plus restrictif. Il lui est même loisible, en ce qui concerne les étrangers présents sur le sol national, de modifier dans un sens plus restrictif le droit au séjour qui leur est accordé. Seule l’existence d’exigences constitutionnelles ou conventionnelles (c’est-à-dire garanties par un traité ou une convention internationale) comme le droit d’asile ou celui de mener une vie familiale normale peut borner l’intervention du législateur.
Si l’immigration de travail peut, contrairement à l’immigration familiale et à l’asile, être régulée, sa place dans les titres de séjour est faible.
Par conséquent, seuls les étrangers bénéficiant d’un titre de séjour pour le seul motif économique pourraient être concernés par cette mesure. Au 31 décembre 2020, ils n’étaient que 255 288.
Les autres personnes disposeront d’une protection constitutionnelle tenant au droit d’asile ou au droit à la vie familiale normale.
Détail des titres valides au 31 décembre 2020 (5)
Total | |
Motif économique | 255 288 |
Motif familial | 1 237 833 |
Motif étudiant | 214 545 |
Motif humanitaire | 434 086 |
Visiteurs et divers | 297 352 |
Renouvellement de plein droit | 905 612 |
Total | 3 344 716 |
(1) Ministère de l’Intérieur, direction générale des étrangers en France, 2021, Activité, emploi et chômage des immigrés en 2020
(2) Pôle emploi, 2021, Montant de l’allocation chômage versée aux demandeurs d’emploi indemnisés par l’assurance chômage : situation au 31 décembre 2020
(3) Ministère de l’Intérieur, direction générale des étrangers en France, 2021, Éloignements et départs des étrangers en situation irrégulière
(4) Rapport annuel de performance annexé au projet de loi de règlement 2019, Immigration, asile et intégration | budget.gouv.fr
(5) Ministère de l’Intérieur, direction général des étrangers de France, 2021, Admissions au séjour – Les stocks de titres valides au 31 décembre
Mettre fin à l’accueil des mineurs non accompagnés
Réserver le RSA et les prestations de solidarités aux étrangers ayant travaillé au moins 5 ans en France
Supprimer le droit du sol
Réformer la politique de l’asile
Accorder les prestations familiales aux seuls foyers dont au moins un des parents est français
Faire un référendum sur l'immigration
Restreindre l’immigration familiale
Interdire la régularisation des clandestins