« Je ne veux pas que nos jeunes partent à l’étranger, je veux qu’ils restent en France, je veux qu’ils construisent des entreprises, je veux qu’ils envisagent leur avenir en France »
La mesure consiste à exonérer l’ensemble des contribuables âgés de moins de 30 ans d’impôt sur le revenu.
La proposition de Marine Le Pen a été annoncée dans le cadre d’une interview télévisée et n’a pas fait l’objet de chiffrage précis par la candidate (Jordan Bardella, président du RN, évoquant dans une interview un coût de 2 milliards d’euros pour cette mesure). De la même manière, ses modalités de mise en œuvre demeurent inconnues tout comme la temporalité de la mesure.
À ce stade de la campagne et des informations disponibles, la mesure annoncée consiste en une exonération générale et absolue de l’impôt sur le revenu au bénéfice des contribuables jusqu’à 30 ans.
En l’absence de données relatives au revenu fiscal en fonction de l’âge, le chiffrage réalisé dans le cadre de la présente fiche est sujet à caution. Il ressort des simulations effectuées que le coût de cette mesure s’élèverait à un peu plus de 3,6 Md€ par an à droit constant soit 18 Md€ sur le mandat (pour les deux hypothèses retenues).
Au-delà des difficultés techniques inhérentes au chiffrage, cette mesure est probablement inconstitutionnelle (cf. supra).
Commentaires de l’équipe de campagne
Contactée, l’équipe de campagne de Marine Le Pen estime le coût de cette mesure plus faible (autour de 2 milliards d’euros par an), sans précision à ce stade sur la méthodologie employée pour atteindre ce montant.
Impact sur le pouvoir d’achat
Le gain de pouvoir d’achat, à cadre fiscal constant, atteindrait, en moyenne, 374 € par an pour chaque contribuable concerné.
1ère méthode de chiffrage
En l’absence de données portant sur le revenu imposable en fonction de l’âge, les simulations ont été réalisées à l’aune des revenus d’activité moyens de la population active (source Insee).
Pour les moins de 25 ans, ceux-ci atteignent 7 490 € contre 19 220 € entre 25 et 39 ans. Ces montants tiennent comptent de la quotité de travail effective.
Pour des raisons de commodité, deux groupes ont été créés :
- Le premier regroupe les actifs de moins de 25 ans (revenu annuel de 7 490 €) ;
- Le second englobe les actifs de 26 à 30 ans (revenu annuel de 19 220 €).
Après avoir déterminé le revenu d’activité pour cette classe d’âge, le revenu fiscal a été obtenu en appliquant un abattement forfaitaire de 10 %.
Une fois le revenu fiscal connu, le montant de l’impôt sur le revenu a été calculé selon les barèmes et taux actuellement en vigueur.
Ces éléments ont été croisés avec la part de la population âgée de 18 à 30 au 1er janvier 2019 qui atteint :
- 6,1 millions de personnes pour le premier groupe ;
- 3,9 millions de personnes pour le second groupe.
En retenant l’hypothèse des deux groupes décrits ci-dessus, la particularité de cette mesure vient de ce qu’elle ne concerne pas les 18-25 ans dont les revenus sont actuellement trop faibles pour être soumis à l’IR. Les seuls bénéficiaires seraient donc les actifs âgés de 26 à 30 ans dont le niveau de revenu les rend redevables de l’impôt.
Selon les simulations réalisées, le coût de la mesure s’établirait à environ 3,6 Md€ par an.
Classe d’âge | Âge | Population (au 01/01/19) | Total |
18 – 25 ans | 18 | 845 937 | – |
19 | 800 716 | – | |
20 | 783 525 | – | |
21 | 754 642 | – | |
22 | 756 046 | – | |
23 | 739 682 | – | |
24 | 716 463 | – | |
25 | 714 161 | 568 286 474,14 € | |
26-30 ans | 26 | 749 884 | 596 712 694,16 € |
27 | 763 138 | 607 259 432,12 € | |
28 | 781 915 | 622 201 042,10 € | |
29 | 790 072 | 628 691 893,28 € | |
30 | 800 741 | 637 181 643,34 € | |
TOTAL | 9 996 922 | 3 660 333 179,14 € |
2nde méthode de chiffrage
Une seconde méthode de chiffrage reposant sur le calcul du taux moyen d’imposition par décile aboutit à un chiffrage similaire à celui de la première hypothèse. Il atteint en effet environ 3,65 Md€ par an soit 18,25 Md€ sur la mandature.
Pour parvenir à ce résultat, ce taux d’imposition a été appliqué au salaire moyen des jeunes actifs répartis en deux classes d’âge :
- Jusqu’à 25 ans (revenu annuel à 7 490 € et taux moyen de 4,6 %);
- Les 26-30 ans (revenu annuel estimé à 16 220 € et taux moyen de 8,7 %).
Classe d’âge |
Revenu salarial moyen (en €) | Salaire annuel moyen en équivalent temps plein | Volume de travail moyen en équivalent temps plein | Population concernée (Insee, recensement) | Masse salariale recalculée totale (en Md€) | Taux moyen d’IR avec le revenu moyen de la tranche d’âge | Pondération IR (en Md€) | Total par tranche d’âge (en Md€) |
Moins de 25 ans | 7490 | 17 680 | 42 % | 5 474 811 | 41 | 5 % | 1,9 | 1,0 |
26-30 ans | 16 220 | 21 106 | 77 % | 3 762 754 | 61 | 9 % | 5,3 | 2,7 |
31 à 39 ans | 20 673 | 26 900 | 77 % | 8 215 910 | 170 | 12 % | 20,5 | 10,5 |
40 à 49 ans | 25 030 | 30 150 | 83 % | 8 572 773 | 215 | 12 % | 26,0 | 13,2 |
50 à 54 ans | 26 340 | 31 370 | 84 % | 4 423 986 | 117 | 12 % | 14,1 | 7,2 |
55 ans ou plus | 25 280 | 33 480 | 76 % | 9 309 392 | 235 | 12 % | 28,5 | 14,5 |
TOTAL | 96,3 | 49,0 | ||||||
Coût de la mesure | 3,650 |
La pondération d’IR correspond à l’IR calculé à partir d’un taux moyen sur la tranche de salaire concernée par la catégorie d’âge, estimé comme le produit des taux moyens en fonction du décile de salaire (1) et de la masse salariale qui est recalculée à partir du revenu moyen de la tranche d’âge. En principe, ceci devrait donner l’impôt sur le revenu total versé, mais c’est sans compter les exonérations et abattements divers (notamment l’abattement sur les plus petits salaires qui constitue un petit tiers de la masse salariale potentiellement imposable) (2). Une règle de trois sur la part de l’impôt sur le revenu issue des traitements et salaires sur les deux tranches d’âges considérées donne le résultat.
Mise en œuvre
La mesure doit être introduite par voie législative sous réserve de l’examen de sa conformité à la constitution.
L’article 13 de la déclaration des droits de l’homme et du citoyen (DDHC) dispose que « pour l’entretien de la force publique, et pour les dépenses d’administration, une contribution commune est indispensable : elle doit être également répartie entre tous les citoyens, en raison de leurs facultés« .
Le Conseil constitutionnel a eu l’occasion de préciser que les dispositions de l’article 13 de la DDHC s’opposent à une rupture caractérisée du principe de l’égalité devant les charges publiques entre tous les citoyens (décision 85-200 DC du 16 janvier 1986).
S’il est loisible au législateur de mettre à contribution prioritairement certaines catégories de redevables de l’impôt ou au contraire d’en exonérer d’autres, les dérogations accordées doivent être fondées par un motif d’intérêt général (décision n°2009-599 DC du 29 décembre 2019 par exemple).
En proposant d’exonérer d’impôt sur le revenu l’ensemble des contribuables de moins de 30 ans, indifféremment de leur statut et de leurs ressources, cette mesure tend à créer une différence de traitement injustifiée vis-à-vis du reste de la population active.
La mesure concerne tous les salariés de moins de 30 ans, du public et du privé, assujettis à l’impôt sur le revenu.
Historique de la proposition
Cette proposition n’a jamais été appliquée en France.
(1) Ces données sont estimées à partir du site de publication des statistiques fiscales de la DGFiP https://www.impots.gouv.fr/portail/node/14434 (deuxième fichier xls présenté sur les impôts des particuliers, données 2019).
(2) Cf. notamment données du site https://www.impots.gouv.fr/portail/node/14434, quatrième fichier présenté, permettant de faire une règle de trois pour évaluer le total de l’IR versé à partir des traitements et salaires. Il s’agit de la part des salaires et traitements bruts dans le montant des revenus totaux déclarés. Cette proportion est multiplié au montant prévisionnel d’IR pour 2022 (source : Voies et moyens tome 1 annexé au PLF 2022).
Sortir les biens immobiliers de l'assiette de calcul des droits de succession à hauteur de 300 000 euros
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