Mettre en place un grand plan pour la dépendance : interdiction des établissements privés à but lucratif, recruter 9 à 10 aidants pour 10 patients
« Nous interdirons les Ehpad privés à but lucratif – il n’y aura pas de nouvelles autorisations […]. Aujourd’hui, vous avez six accompagnants pour dix pensionnaires. Nous voulons nous rapprocher d’un pour un. Dix accompagnants, dont huit soignants, pour dix pensionnaires pour sortir de la maltraitance ».
Le taux d’encadrement moyen en Ehpad est aujourd’hui de 65 %, c’est-à-dire qu’il y a en moyenne 6,5 infirmiers et aides-soignants pour 10 pensionnaires. La mesure proposée par le candidat le ferait augmenter jusqu’à 90 % ou 100 %. À ce niveau d’encadrement la mesure conduirait à un recrutement d’environ 200 000 salariés (en équivalents temps plein).
Avec une hypothèse de prise en charge par les finances publiques de 100 % de ces recrutements, le coût estimé de la mesure est de 9,8 Md€ par an à court terme. Le coût de la mesure pourrait être moindre en retenant des paramètres différents, notamment un taux d’encadrement à 90 % et un taux de prise en charge du surcoût par les finances publiques de 80 % (1). Avec ces hypothèses le coût de la mesure serait de 5,6 Md€.
L’estimation médiane de la mesure est ainsi de l’ordre de 7,7 Md€. Ce coût augmenterait au fil des années, avec la hausse attendue du nombre de pensionnaires en raison de la démographie française.
Impact macroéconomique / sur le pouvoir d’achat
La mesure pourrait avoir un effet bénéfique sur les dépenses de santé des résidents en Ehpad. Selon le Conseil d’analyse économique, « des corrélations significatives ont été observées entre de faibles taux d’encadrement de personnel infirmier et aide-soignant et […] les taux d’hospitalisation des résidents » (2).
La mesure aurait un effet positif sur l’emploi et donc potentiellement sur le pouvoir d’achat des personnes recrutées pour la fraction d’entre elles qui seraient précédemment sans emploi. Compte tenu des difficultés de recrutement dans ce secteur et de l’importance des recrutements supplémentaires envisagés, il existe un risque fort qu’une partie importante des postes soient non pourvus. Une hausse des salaires ainsi que le financement de formations seraient à prévoir en complément, ce qui majorerait le coût de la mesure.
En revanche, le financement de la mesure par l’impôt pourrait avoir un effet négatif sur le pouvoir d’achat des contribuables qui seraient concernés, voire sur l’activité économique, en fonction du choix de financement qui sera retenu. L’impact sur la hausse des prélèvements obligatoires serait majoré à moyen terme (2030) par la tendance à la hausse du nombre de places en Ehpad (+ 18 %), qui pourrait conduire à un besoin de financement de la mesure de l’ordre de 0,5 points de PIB.
(1) Niveau de prise en charge par la sécurité sociale de la hausse du taux d’encadrement proposée dans le rapport Libault (2019) relatif à la dépendance.
(2) Bozio, Antoine, et al., Quelles politiques publiques pour la dépendance ?, Notes du conseil d’analyse économique, vol. 35, no. 8, 2016, pp. 1-12.
Le taux d’encadrement moyen actuel retenu (65 %) est celui estimé dans le dernier rapport annuel de la CNSA pour l’ensemble du secteur corrigé du taux d’occupation (3). Il est plus élevé dans le secteur public (72 %) mais cela découle pour partie d’une plus faible mutualisation des fonctions support.
La mesure proposée par le candidat vise un taux d’encadrement de 100 %. Cette évolution conduirait à un recrutement d’environ 203 000 salariés en équivalents temps plein, les effectifs passant de 377 000 à 580 000 (4).
Le coût moyen retenu est celui du coût salarial annuel moyen des secteurs public et privé non lucratif pour les fonctions d’infirmier (53 328€) et d’auxiliaire médical (43 391€) (5).
Estimations à court terme (2022-2025) en fonction de différents paramètres | |||
Coût annuel Md€ | taux d’encadrement | ||
90 % | 100 % | ||
Taux de prise en charge par les finances publiques | 80 % | 5,6 Md€ | 7,8 Md€ |
100 % | 7,0 Md€ | 9,8 Md€ |
Avec une hypothèse de prise en charge par les finances publiques de 100 % de ces recrutements, le coût estimé de la mesure est de 9,8 Md€ par an à court terme. Le coût de la mesure pourrait être moindre en retenant des paramètres différents : taux d’encadrement à 90 % et 80 % de prise en charge du surcoût par les finances publiques (6). Avec ces hypothèses le coût de la mesure serait de 5,6 Md€. Dans un scénario médian, la dépense annuelle supplémentaire s’établirait donc à 7,7 Md€.
Ces estimations portent sur un horizon de court terme. En effet, à moyen terme, il conviendra également de tenir compte de l’augmentation tendancielle du nombre de résidents en Ehpad : toute hausse du taux d’encadrement majore le coût d’une augmentation du nombre de places. Le surcroît de recrutement correspondant est estimé à 38 000 emplois à l’horizon 2030, soit un coût supplémentaire d’environ 1,8 Md€ par an. Le surcoût total à moyen terme (2030) serait donc compris entre 6,9 et 11,6 Md€.
Historique de la mesure
En 2006, le plan de solidarité grand âge 2006-2012 avait fixé une cible de taux d’encadrement de 100 %.
Le 25 février 2020, une proposition de loi (7) « instaurant un taux d’encadrement responsable dans les établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes » a été déposée à l’Assemblée nationale. En journée, la proposition de loi envisageait un taux d’encadrement des assistants de soins de minimum 12,5 % des effectifs de personnes âgées et de 4 % pour les infirmiers.
La LFSS pour 2022 prévoit une généralisation des planchers de présence médicale et d’infirmier de nuit dans les EHPAD. À partir de 2023, la hausse des personnels (infirmiers, aides-soignants, encadrants, professionnels spécialisés) des EHPAD se poursuivrait pour atteindre un total de 10 000 ETP supplémentaires au cours des cinq prochaines années. À l’horizon 2025, la branche autonomie consacrerait près de 300 M€ supplémentaires au renforcement des ressources humaines dans les EHPAD.
Benchmark
D’après le Conseil d’analyse économique, « en comparaison d’autres pays de l’OCDE, les taux d’encadrement dans les structures d’hébergement collectif pour personnes âgées restent faibles en France » (8). En Suisse, le taux d’encadrement dans les équivalents des EHPAD est de l’ordre de 85 % (9).
Mise en œuvre
Une loi de financement de la sécurité sociale serait nécessaire pour prévoir les financements. Une concertation avec les secteurs privés non lucratif et privé lucratif. Ce dernier secteur continuerait en effet d’exploiter les établissements existants, seules les créations d’établissement ne seraient plus permises.
(3) CNSA, Situation économique et financière des EHPAD entre 2017 et 2018, mai 2020.
(4) D’après les dernières données disponibles : CNSA, Situation économique et financière des EHPAD entre 2017 et 2018, mai 2020. Compte tenu de la tendance à la hausse du nombre de résidents en EHPAD, cette évaluation est un minimum.
(5) CNSA, Situation économique et financière des EHPAD entre 2017 et 2018, mai 2020.
(6) Niveau de prise en charge par la sécurité sociale de la hausse du taux d’encadrement proposée dans le rapport Libault (2019) relatif à la dépendance.
(7) Nº 2714.
(8) Bozio, Antoine, et al., Quelles politiques publiques pour la dépendance ?, Notes du conseil d’analyse économique, vol. 35, no. 8, 2016, pp. 1-12.
(9) TRISAN, La prise en charge des personnes âgées dépendantes en France, en Allemagne et en Suisse, octobre 2018.
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