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Budget base zéro : décider sous la contrainte |
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Alors que les débats sur le budget 2026 s’enlisent, la France est arrivée au bout d’un modèle fondé sur la reconduction automatique de la dépense. Avec un déficit record et une dette qui dérive plus vite que dans n’importe quel pays comparable, l’impasse n’est plus tenable. Que doit-on sanctuariser au titre de nos engagements ? Et sur quelle justification politique ? Dans la continuité de notre étude “Finances publiques : la fin des illusions”, nous publions aujourd’hui une nouvelle note d’éclairage “Budget base zéro : décider sous la contrainte”, portée par Marie-Pierre de Bailliencourt, notre directrice générale, et Nicolas Laine, responsable des publications aux études France, avec le concours de notre Comité Directeur. En posant l’exercice du “budget base zéro” - à partir d'une page blanche - la note documente, pour la première fois, ce que signifierait l’obligation de hiérarchiser pour replacer les choix politiques au cœur de la décision publique et engager l’impératif redressement de nos finances publiques. Pour se faire, nous avons reconstitué la trajectoire réelle des finances publiques et évalué l’ampleur de l’ajustement nécessaire pour retrouver un équilibre crédible. Le verdict est sans détour : 140 Md€ d’économies - que nous chiffrons de manière inédite - sont nécessaires d’ici 2029 pour stabiliser la dette. Un effort que la plupart de nos voisins ont déjà consenti. La note avance ensuite quatre scénarios illustratifs de “budget base zéro”, qui rendent visible le poids réel de chaque choix politique. Tous impliquent des renoncements majeurs. Le débat politique les contourne, nous les mettons sur la table. |
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 “Nous avons voulu ce travail de réflexion sur la construction budgétaire afin de montrer que l’inaction budgétaire a atteint ses limites : ne pas choisir, c’est défaire l’action publique. Le budget base zéro est par essence une méthode de choix : c’est la condition pour redonner un sens politique à chaque euro dépensé. À rebours d’un débat sur le budget 2026 qui esquive les priorités, cet exercice remet l’essentiel sur la table : décider enfin ! La question n’est plus de savoir s’il faut ajuster, mais comment, selon quelles priorités, et avec quelle ambition. Reprendre la maîtrise de la dépense, c’est retrouver la liberté de décider. Le projet présidentiel à venir devra trancher courageusement, nous y contribuerons avec détermination.” - Marie-Pierre de Bailliencourt, Directrice générale de l'Institut Montaigne  "S’ils empruntent des voies différentes, les scénarios illustratifs convergent vers les mêmes constats : d’abord, que les débats actuels ne sont pas à la hauteur des 140 milliards d’euros d’économies que nous devrons mettre en œuvre ces quatre prochaines années ; ensuite, que le retour à l’équilibre budgétaire n’est pas un exercice technique à confier à l’administration mais un choix de société qui doit être débattu démocratiquement ; enfin, que c’est en explicitant et en assumant ces choix – plutôt qu’en les subissant – qu’il sera possible de renouer avec une trajectoire pérenne de nos finances publiques." - Nicolas Laine, Responsable des publications aux Études France |
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| Une incapacité structurelle à choisir qui a mené à une impasse budgétaire |
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La France n’a plus voté un budget à l’équilibre depuis 1974. La mécanique budgétaire repose toujours sur la poursuite des dépenses de l’année précédente, agrémentée d’ajustements minimes. Les diagnostics s’empilent, les recommandations se répètent mot pour mot depuis vingt ans, sans jamais être appliquées. Cette inertie a produit une dérive continue : les dépenses sociales ont capté l’essentiel de la dynamique et représentent désormais 56 € sur 100 € de dépense publique, avec un poste “retraites” trois fois supérieur au budget de l’éducation. Résultat : un déficit le plus élevé de la zone euro, un ratio de la dette désormais presque deux fois supérieur à celui de l’Allemagne, dont la trajectoire pointe vers 235 % du PIB en 2050, si rien ne change. Cette situation empêche de concilier durablement désendettement, maintien de la dynamique des dépenses sociales et financement des investissements d’avenir et de défense. |
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| Quatre scénarios de “budget base zéro” qui révèlent les arbitrages réels et les renoncements implicites |
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Comme il ne saurait y avoir de modèle social viable sans une économie prospère, certains choix s’imposent d’eux-mêmes. Quelles que soient les options retenues, la discontinuité ou la réorientation de la manne publique sont désormais inévitables : - le rabot uniforme à 8% qui correspondent aux 140 Md€ d’économies nécessaires
- le maintien intégral du modèle social qui dérive nécessairement avec l’évolution des dépenses volumétriques de santé, de retraite et de protection sociale
- un choc de compétitivité qui promeut prioritairement la croissance pour pouvoir sauvegarder à moyen terme un modèle social universel
- le redressement par l’austérité en cas de choc majeur - mise sous tutelle financière ou conflit armé
| *Il est important de préciser que l’exercice n’émet pas de recommandations, mais montre ce que chaque choix implique. Il fait apparaître ce que le contexte économique et la mécanique budgétaire française ont dissimulé pendant des décennies : l’impossibilité de tout financer, l’obligation d’arbitrer et la nécessité de reconstruire la décision publique autour d’une hiérarchisation explicite des priorités. |
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À propos de l’Institut Montaigne Créé en 2000, l’Institut Montaigne est un espace de réflexion, de propositions concrètes, et d’expérimentations au service de l’intérêt général. Think tank de référence en France et en Europe, ses travaux sont le fruit d’une méthode d’analyse rigoureuse, critique et ouverte qui prennent en compte les grands déterminants sociétaux, technologiques, environnementaux et géopolitiques afin de proposer des études et des débats sur les politiques publiques. Association à but non lucratif, l’Institut Montaigne organise ses travaux autour de quatre piliers thématiques : la cohésion sociale, les dynamiques économiques, l’action de l’État et les coopérations internationales. Menés dans la collégialité et l’indépendance, l’Institut Montaigne réunit des entreprises, des chercheurs, des fonctionnaires, des associations, des syndicats, des personnes issues de la société civile et d’horizons divers. Nos travaux s’adressent aux acteurs publics et privés, politiques et économiques, ainsi qu’aux citoyens engagés. Depuis sa création, ses financements sont exclusivement privés, aucune contribution n'excédant 1,2 % d'un budget annuel de 7,2 millions d'euros. |
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