Cette baisse démographique est une "aubaine" pour notre système éducatif dans la perspective d’un rééquilibrage de notre investissement au profit des premières années de scolarisation.
Elle explique notamment que l'exécutif puisse poursuivre le dédoublement des classes de grande section (GS) en REP - 1 170 emplois sont programmés dans le cadre du PLF 2023 pour achever la politique de dédoublement des classes - tout en supprimant 1 117 postes dans le premier degré. Ainsi, la politique du dédoublement des classes, qui a d’abord consisté en une réorientation des postes "plus de maîtres que de classes", bénéficie également de la diminution démographique et se fait donc à coût presque nul.
Plus généralement, tout en supprimant des postes - le schéma d’emploi diminue d'environ 2 100 postes - l'exécutif poursuit l'amélioration du taux d’encadrement dans le premier degré - le nombre moyen d'élèves par classe est passé de 23,6 élèves en 2016 à 21,6 en 2022 et devrait être de 21,3 en 2023 - et le stabilise dans le second degré.
L'on doit se réjouir que Bercy ne se soit pas contenter de l'application d’une "règle de trois", qui aurait conduit à la suppression de 5 000 postes, permettant ainsi à l'exécutif de poursuivre l'amélioration des taux d'encadrement.
Mais cette importante diminution du nombre d'élèves, qui impacte particulièrement les premières années de scolarisation, ne doit-elle pas nous interroger sur l’opportunité d'engager une politique éducative plus volontariste encore ? La baisse démographique offre à notre pays l'occasion de s'engager dans la voie du dédoublement des classes de moyenne section de maternelle en REP et REP +, à coût quasi constant. Une autre voie d’action serait d'initier un programme de type Perry Preschool, ciblé sur les zones d'éducation prioritaires, comme l'Institut Montaigne le recommandait dans son rapport L'avenir se joue dans les quartiers pauvres.
Le plan maternel que prépare le ministre de l'Éducation nationale doit être l'occasion d'une telle réflexion eu égard aux effets bénéfiques que l'engagement d'une telle politique pourrait avoir sur la réduction des inégalités scolaires.
Fonds d'innovation pédagogique et autonomie des établissements
Le projet d’expérimentation des écoles du futur lancé à Marseille le 2 septembre 2021 dans le cadre du plan "Marseille en Grand" est désormais étendu à l'ensemble du territoire. Son objectif peut se résumer de la façon suivante : face à l’hétérogénéité territoriale des besoins éducatifs, l'État ne doit pas appréhender globalement l’enseignement comme un système unifié. En somme, le jacobinisme éducatif doit céder sa place à une approche locale des défis pour mieux s’adapter à la diversité des problématiques quotidiennes et des besoins spécifiques.
En conséquence, les projets d'établissement les plus innovants et les plus impactants pourront bénéficier de financements dédiés via un fonds d'innovation pédagogique doté de 500 M€ sur 5 ans. Le PLF 2023 prévoit que 150 M€ seront ainsi déployés dès cette année.
Si l'on formule l'hypothèse qu'un cinquième des écoles ou établissements du second degré soumettent un projet recevant l'approbation du ministère de l'Éducation nationale, chaque établissement recevra donc une dotation d'environ 12 000 euros.
Sans aller plus avant sur la question de l'autonomie des établissements que sous-tend l'instauration de cette politique, on s'étonnera tout de même, de façon générale, que le renforcement de l'évaluation des établissements ne soit pas considéré comme un préalable nécessaire et complémentaire de cette plus grande autonomie. Plus particulièrement, l'octroi des financements dédiés doit être conditionné à l'évaluation de la mise en œuvre et de l'efficacité du projet d'établissement.
Les études conduites par l'OCDE tendent à montrer la nécessité d'une culture de l'évaluation pour qu'un accroissement de l'autonomie des établissements ait un impact positif sur les résultats des élèves. Le corollaire de l'autonomie est la responsabilisation des équipes par l'évaluation de l'efficacité de leur travail pour la réussite des élèves. C'est d'ailleurs pourquoi le conseil de l'évaluation de l'école (CEE) a été institué en 2019.
Dès lors, pourquoi l'évaluation, si nécessaire à l'efficacité de cette politique, ne fait-elle pas l'objet d'une orientation politique forte dans ce PLF ?
Par ailleurs, on peut s'interroger sur le statut du CEE, qui diffère des statuts des organismes évaluatifs. On pense par exemple au Haut Conseil de l’évaluation de la recherche et de l'enseignement supérieur (HCERES), dont le statut d'autorité administrative indépendante en fait une institution dont les évaluations ont un poids bien plus important et engageant. Il pourrait donc apparaître judicieux d'une part de faire du CEE une autorité administrative indépendante afin de donner plus de poids aux évaluations dans notre pays et d'autre part, de lui conférer davantage de moyens pour accompagner le développement des écoles du futur.
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