D'abord rejeté en première lecture par l’Assemblée nationale le 25 octobre, puis adopté par le Sénat le 2 novembre, le projet de loi de programmation des finances publiques (PLPFP) pour la période 2023-2027 est désormais soumis à l'examen d’une commission mixte paritaire. Convoquée dans les tout prochains jours, cette commission réunit des députés et des sénateurs, dont l'objectif est de parvenir à un accord sur un texte commun, en l'espèce, celui de la LPFP pour 2023-2027. À la lumière de cet événement parlementaire - et dans la perspective de la nouvelle législature - l'Institut Montaigne propose une analyse du fonctionnement de ce mécanisme essentiel et initialement innovant de la Vème République.
En quoi consiste une commission mixte paritaire ?
Afin de ne pas reproduire les dérives de la IVème République (1946-1958) - marquée par une instabilité ministérielle récurrente en raison de l'importance politique considérable confiée au Parlement - la Constitution de la Vème République a rétabli un régime bicaméral plus équilibré dans lequel l'Assemblée nationale a souvent le dernier mot sur un texte en cas de désaccord persistant avec le Sénat. La Constitution du 4 octobre 1958 a introduit un mécanisme original permettant d’éviter une navette infinie entre les deux assemblées, à savoir la commission mixte paritaire (CMP).
Prévue par l'article 45 de la Constitution, la CMP est une innovation en matière de procédure parlementaire, dont le but est de rapprocher les points de vue des deux chambres, afin de "proposer un texte [commun] sur les dispositions restant en discussion". Elle a la particularité d'offrir un lieu de débat serein et approfondi à huis clos dans lequel ni le gouvernement, ni ses conseillers, ni les collaborateurs parlementaires ne peuvent assister aux échanges.
Seuls sept députés, sept sénateurs, leurs suppléants - au nombre de sept pour chacune des assemblées - et quelques fonctionnaires composent la CMP. La composition de cette commission obéit à des règles bien définies soumises à des considérations d’ordre technique (présence du président et du rapporteur de la commission saisie au fond de l'examen du texte), politique (présence de quatre représentants de la majorité et de trois représentants de l’opposition parmi les délégations de chaque assemblée depuis 2009) et prenant en compte l'équilibre entre les groupes politiques, car les sièges sont attribués en proportion de leur importance au sein de chaque assemblée. En outre, le président de la CMP, son vice-président et les rapporteurs pour l'Assemblée nationale et le Sénat forment le Bureau de cette instance de compromis.
En somme, il s'agit du seul lieu où le législateur est libre de débattre sur un projet ou une proposition de loi sans la présence du gouvernement.
"Guide pratique" de la CMP
Le deuxième alinéa de l'article 45 de la Constitution énonce qu’une CMP peut être convoquée à l’initiative du Premier ministre, ou par les présidents de l'Assemblée nationale et du Sénat depuis la révision constitutionnelle de 2008 - ce qui n’a eu lieu qu'à une seule reprise jusqu’à présent, pour la proposition de loi visant à rendre obligatoire l'installation de détecteurs de fumée dans les lieux d'habitation, finalement adoptée en mars 2010. Rappelons que cette décision ne peut intervenir qu'après deux lectures au moins dans chaque assemblée ou après une seule lecture dans chaque assemblée lorsque le gouvernement opte pour engager la procédure accélérée, à condition que les Conférences des Présidents des deux assemblées ne s'y soient pas opposées. S'agissant du projet de loi de finances (PLF) ou du projet de loi de finances pour la Sécurité Sociale (PLFSS), la procédure accélérée est de droit compte-tenu des délais courts prévus par la Constitution, la CMP peut donc intervenir après une seule lecture, dans chaque chambre. En ce qui concerne le PLPFP, la procédure accélérée a justement été engagée dès le 26 septembre dernier.
Ajouter un commentaire